MERCREDI 18 OCTOBRE

18/10

Question juridique de Me Kempf

13h30. Me Kempf ouvre la séance par une demande de la défense, la déclassification du Secret Défense sur l’expert en explosifs présent la semaine passée, Sylvain B. Il demande de prendre le temps de se poser les bonnes questions, de s’émanciper du dossier pour apprendre des choses, et se demander quelles sont les conséquences juridiques de cet évènement, à savoir le fait que le dit expert ait révélé des élément inédits, potentiellement Secret Défense.

Il précise avoir sollicité les notes d’audience pour pouvoir travailler et revenir sur ce qui a été dit exactement par MrB. sans qu’il y ait contestation. Mais cette demande a été précédemment refusée.

Il rappelle que sur le plan pénal, le SD permet d’éviter qu’une information révélée (mais aussi un objet, etc.) puisse nuire à la défense nationale. Il rappelle également que porter à la connaissance un SD peut entrainer une enquête de flagrance de la part du parquet (Jusqu’à 7 ans de prison, 3 ans si c’est par “imprudence”).

Bref, sa question porte sur ce qui est classé SD et ce qui ne l’est pas, le dit expert retransmet des informations de manière parcellaire et il est difficile de faire le tri. MrB. donnera par exemple des informations tirées de conversation entre collègues (que la recette d’explosif puisse se balader entre différents groupes armés), mais parlera également de l’origine selon lui de cette recette amonitrate fondu/sucre. Est ce que cette information est SD? Ça a son importance, puisque ces informations sont utilisées pour nourrir le fantasme de la DGSI sur les “revenants”, ces personnes qui partent en zone de guerre et qui rentreraient pour tout faire péter. Il notera aussi que MrB. reproduit les discours et références de la DGSI, dans des phrases comme “le TATP comme au 13 novembre”, ou qu’il fait des parallèles tordus pour faire émerger une pseudo dangerosité. 

Au vu du nombre de questions, les explosifs semblent être un élément important du dossier, il demande donc à voir ce qu’il y a comme éléments classifiés. La déclassification permettrait de se donner les moyens de voir la vérité, de pouvoir observer ce qui pourrait être critiquable dans les dires de l’expert, et de ce fait d’écarter des pièces si elles sont problématiques. 

“Est-ce que nous disposons de la possibilité véritable de discuter d’un rapport d’expertise ?”

Cela entraine selon la défense un problème de loyauté. Il demande donc la déclassification des informations en SD, et que si on ne déclassifie pas, alors que personne ne puisse utiliser ces renseignements (“à armes égales” en gros).

Réaction du procureur : Il commence par dire encore une fois qu’il est admiratif de l’énergie mise en place par la défense pour retarder l’issue des débats et de la décision (il ne dira pas “dilatoire” mais c’est tout comme) et il re-cite les demandes qui ont déjà été faites concernant la déloyauté, et dit que si on remet en cause les procédures des forces de l’ordre en GAV, les “sonorisations”, les interrogatoires, les pratiques du juge d’instruction, les expertises, alors on n’a plus rien, plus de procédure – #youpi -).

Il résume ce qu’a dit l’expert en 3 points :

–> en 20 ans de carrière il n’a jamais vu ce type d’explosif

–> idem pour ses collègues français et européens

–> recette vue au Caucase, chez les djihadistes Tchétchènes et diffusée entre différents groupes armés irako-syriens.

Il fait 3 observations:

–> on n’a jamais demandé à un expert de justifier de l’ensemble de ses connaissances et support, il s’agit de la technique même de l’expertise, de sa compréhension, et il serait difficile de justifier des éléments constitutifs de son analyse, de sa compréhension et de ses connaissances. Cela nie donc la sériosité de l’expertise et son existence même.

–> Quand MrB. dit qu’il n’a jamais vu cette recette en France et en Europe, cette information ne peut pas venir d’une expertise judiciaire, mais forcément de ce qu’il a pu consulter et lire de par ailleurs. L’information il l’a, mais le contenu est classifié. Il a prêté serment.

–> Puis il cite différents extraits d’écoutes ou de GAV : S. qui dirait qu’un artificier et un « revenant » du Rojava ensemble ça parle d’explosif, B. qui dirait à propos de la recette qu’il leur a été demandé de ne pas la réutiliser pour pas que ce soit connu en France, etc. Selon lui MrB a juste redit ce qui ressort des « sonorisations ».

Réaction de Kempf : Il souligne qu’ils sont en désaccord sur ce qu’a dit MrB, et re-souligne l’importance d’accéder aux notes de la greffière. Selon lui, l’esprit de la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme est en contradiction avec ça et l’on doit pouvoir remettre en question la parole des experts, contester les modalités pratiques et scientifiques de l’expertise. 

Il dit qu’il faut faire preuve de curiosité, avoir envie de creuser, de savoir, et il imaginait que le PNAT aussi aurait envie de connaitre la vérité. Il conclut en demandant si cette audience est juste là pour mettre un coup de tampon sur une décision qui aurait déjà été prise.

Les procureurs sourient avec leurs sourires narquois de procureurs.

14h20. Pause pour délibérer.

15h10. Sans grande surprise, la demande est renvoyée à plus tard, lors des débats sur le fond à la suite des auditions.

S.

Appelé à la barre pour les questions sur les armes retrouvées chez lui.

La présidente fait l’inventaire de ces armes, il y en a 3, non déclarées.

– une catégorie B , à canon scié avec un silencieux

– une carabine catégorie C 

– une carabine prêtée par son beau-père, catégorie B

La présidente demande de précisions sur la première carabine, les conditions dans lesquelles elle a été obtenue.

S. répond qu’elle a été trouvée dans un cabanon abandonné dans le camping dans lequel il faisait du gardiennage, un caravaning. Ça remonte à 2017, 2018, il ne sait plus exactement, « tous les hivers se ressemblent là-bas ».

La juge lui demande « Vous avez décidé de garder cette arme malgré son calibre ? »

Il répond avoir attendu et demandé autour de lui si c’était à quelqu’un, et qu’il n’a aucune notion de la legislation concernant les armes.

Elle enchaine: « Avez-vous pensé à en faire autre chose que de la conserver ? »

Il répond qu’il l’a gardé pour effectuer des essais pour un clip, il voulait tirer dans un coussin pour voir si les plumes volaient (les plumes ne volent pas). Elle est tombé ensuite dans l’oubli, il l’a zappé.

La juge lui fait remarquer qu’il n’est pas passionné par les armes, pourtant il en a 3 en sa possession, dans un court délai de temps. (??2017 wesh)

S. explique les raisons de ces possessions d’armes, l’une à l’allure « post-apocalyptique » lui semblait intéressante pour son esthétique notamment, comme potentiel accessoire sur les tournages de cinéma. La 3ème est un prêt par le père de sa compagne, il l’a conservée pour les mêmes raisons, pour son esthétique. 

A la question »Savez-vous tirer ? », il répond à la négative. Elle lui demande alors si il a déjà voulu passer le permis de chasse, ou s’inscire dans un club de tir, S précise : « Non, mais plutôt par manque de temps ».

La présidente ironise sur le fait que cela puisse être une passion comme les autres, elle fait la morale sur les dangers.

Elle passe alors à la 2ème carabine et évoque l’audition de M. T., qui lui a vendu cette carabine ainsi que des munitions. Il dit que ça remonte à environ 7 ans, Simon dit hiver 2016 ou 2017.

J : « Vous n’êtes jamais allé au ball-trap ? » 

S : « Non » 

J : « Quel est votre intérêt pour la possession de cette arme ? »

S : « Pour chasser les nuisibles sur le terrain de ma mère dans le sud, protéger le poulailler.. mais finalement je l’ai vite rangée, je l’ai cachée dans la cheminée à Vitry parce qu’on faisait des travaux et que je ne voulais pas que les entrepreneurs tombent dessus. Si je ne la vois pas j’y pense pas. J’ai oublié de la descendre sur le terrain dans le sud. Les munitions, il y en avait une quarantaine. Je les avais utilisées peu de temps après, au camping, pour m’entrainer. J’en ai jamais rachetées. »

J : « Utilisée pour le gardiennage du camping ?  » 

S : « Non »

La présidente revient sur l’audition de M. T., et dit que sa version n’est pas la même en disant que M. T. disait que S. possédait cette arme pour tuer des ragondins près de la rivière. 

S. répond que c’est sensiblement la même chose, bien que ce soit pour d’autres nuisibles que les ragondins dans le sud.

J : « Vous n’êtes jamais allé avec lui au stand de tir ? » 

S : « Non »

La 3ème carabine quant à elle ne lui appartient pas, son beau-père l’ayant prêtée à sa fille (donc sa compagne) pour un clip qu’elle réalisait. Il avait proposé pour ce même clip la carabine à canon scié mais elle a préféré l’esthétique de l’arme de sa famille.

J : « Dans le milieu dans lequel vous travaillez, n’y a t-il pas de moyens de vous procurer des costumes et des accessoires ? Des répliques d’armes ? « 

S. répond que si, qu’il y a de la solidarité dans le milieu pour se prêter des choses, mais que cela demande un peu de temps et d’énergie, qu’il existe des armureries du spectacle et que c’est plutôt le cas pour des projets plus importants, alors que là il avait de quoi faire sans passer par là (clip petit budget et non officiel).

J: « vous n’avez ni les compétences ni les autorisations pour vous en servir, ce n’est pas comme n’importe quel autre accessoire ».

S. rappelle qu’il n’a pas d’autres accessoires, à savoir pas de cartouches qui vont avec, et que l’une d’entre elles est rangée avec les accessoires de théatre.

J : « Vous n’avez pas vous même de passion pour l’airsoft ? » 

S : « Non »

J : « on ne vous a jamais proposé d’en faire ?  »

S : « Je ne sais plus mais je n’en avais pas le temps. »

Son avocate vient remettre des photos du clip en question. La juge regarde et s’interroge sur la carabine contre des zombies.

S : « C’est pas moi qui ai fait le scénario ! »  Rires

Le procureur

Pr : « Donc, comme vous semblez le dire, c’est votre métier qui vous permet de détenir des armes ? » il fait notamment référence au tournage du film « Rust », où Alec Baldwin a tué quelqu’un avec une arme à feu utilisée pour une des scènes.

S : « Non, c’est pas malin c’est sûr », mais pour lui, il la considère comme un « objet brut », un accessoire en tant que tel, d’autant plus sans munitions.

Pr : « Vous aviez des munitions lorsque que vous avez obtenu l’arme. »

S : « Oui, en effet, j’en ai eu avec l’arme, mais une boite d’une quarantaine seulement, rapidement utilisées au début pour essayer des effets spéciaux, par exemple tirer dans un oreiller et voir si les plumes volent, et comme je n’avais pas de permis de chasse, je n’en ai pas racheté. »

Le procureur fait référence à des écoutes où S. parle de Georges Besse, patron de Renault qui avait été assassiné en 1986 par Action Directe, « quand tu fais de la merde tu t’en manges une », et il fait le lien avec la détention de plusieurs armes illégales de sa part, en disant que cette référence interroge.

S : « Pour moi il n’y a aucun rapport, vous m’avez déjà sorti cette écoute pour les explosifs et maintenant sur les armes. Je vous ai déjà expliqué que c’est une conversation de deux mecs bourrés, à celui qui pisse plus haut et je fais référence à un bouquin que j’ai même pas lu… » 

Le procureur questionne sur la possession d’un silencieux et sur le fait qu’il aurait pu lui même l’installer. S. répond ne pas avoir les compétences pour ça, que c’est juste pour son esthétique comme accessoire.

Pr : « Pourquoi ne pas avoir régularisé votre situation sur la détention d’armes illégales (permis de chasse…) ? »

S répond qu’il n’a pas eu le temps de s’en occuper entre son travail, sa vie, ce n’était pas une priorité.

Le procureur fait une remarque sur priorités de Simon qui aurait pu prendre 4 jours pour régulariser cette situation, plutôt que de passer 4 jours à fabriquer des explosifs.

Simon répond ces 4 jours pris pour les explosifs étaient pour lui liés à son travail.

Avocate S

Questions sur le 22 long rifle, notamment en lien à son usage non approprié pour la chasse, précise que son utilisation sur les sangliers n’a aucun intérêt (petites blessures), et que sur un renard ou un ratgondin par exemple, cela ne le tue pas mais le blesse et le fait agoniser ensuite.

Elle souligne l’aberration entre « tuer un patron du CAC40 » et la possession de cette arme.

Av : « A t’on retrouvé des munitions lors des perquisitions ? » (énumération de plusieurs lieux fouillés lors des perquisitions)

S : « Non »

L’avocate précise qu’une boite de 100 cartouches ne coute que 3.99€ et est achetable en ligne facilement. Pour montrer l’accessibilité financière, et pratique, pour s’en procurer, et que S. ne devait donc vraiment pas en avoir besoin pour ne pas faire cette démarche.

Elle re-questionne S. sur l’origine des armes retrouvées chez lui, origines que S. peut facilement énumérer. Elle insiste sur le fait que la 3ème arme ne lui appartient pas mais est à sa compagne et se trouve dans leur lieu de vie commun.

Elle précise enfin qu’en France, il y a entre 5 et 6 millions d’armes non déclarées chez ses concitoyens et que jusqu’en 2012 il n’y avait pas besoin d’autorisation pour les carabines 22.

M.

La juge commence par lui poser des questions sur l’airsoft, sur son envie de monter un club.

M. la coupe assez vite en lui disant qu’il souhaite faire une déclaration, ce qu’il fera à plusieurs reprises tout au long de son lonnnnggg interrogatoire.

Il veut notamment redire que, sous la pression, il peut avoir dit des choses contradictoires lors de ses déclarations à la DGSI et au juge d’instruction. Il rappelle le contexte, 10 mois de détention, avec peu d’accès au dossier, sans recul, terrorisé.

Il dit qu’aujourd’hui il se sent prêt à répondre, même sur les contractions, même si il a peur aussi aujourd’hui d’être en face d’elle.

J: “C’est le propre d’une audience de re-baliser, de confirmer ou infirmer, de comprendre pourquoi vous avez dit certaines choses.”

Elle enchaine sur le fait que d’après les notes, il aurait donné l’impression de sourire en GAV lors des interrogatoires. Il répond que si il riait, il devait certainement rire jaune.

La juge reprend sur les questions d’airsoft, de l’envie de monter une association ou un club.

M. répond que c’était une idée parmi d’autres, comme l’envie d’un terrain. Il dit qu’il ne faut pas trier, par exemple “on fait des ateliers de Kravmaga, de boxe, ok, mais on fait plein d’autres choses, comme des cantines, de la solidarité…” Bref, ça fait partie de ses envies, mettre en place des activités différentes sur un terrain. Il n’a pas de terrain de toute façon, donc ça n’a pas été mis en place.

La juge demande si il a déjà manipulé des armes. Il répond que oui, en Guyane, il a essayé un fusil de chasse dans la forêt (en formation de guide). Il précise qu’il ne fait pas de parallèle avec l’airsoft ludique, que c’est très différent.

La juge passe du coq à l’âne.

Elle dit qu’en interrogatoire il a dit qu’il ne connaissait pas L. M. répond qu’on lui a montré des photos pas très ressemblantes, qu’il le connaissait très peu, et qu’encore une fois quand on a une “association de malfaiteurs” qui pend au nez… ça lui a fait peur

La juge lui demande s’il a son permis de chasse. M. répond que ça a peu d’intérêt pour lui, qu’il n’est pas consommateur de viande pour l’instant, mais que peut-être plus tard, dans un cadre d’autonomie, il pourrait l’envisager.

La juge cite une écoute ou R. lui demande de venir avec des drones et des kalachnikovs. M. répond qu’ils n’ont pas le même humour que la juge, qu’ils surenchérissent. Que si R. avait envie de dégommer des drones avec des kalach, alors il serait avec eux sur ce banc.

Interruption de l’avocat qui précise que dans les retranscritpions d’écoutes il est précisé “rire”, “plaisanterie”, à de nombreuses reprises lors de ce passage.

M. revient sur la sélection des informations, et aussi notamment sur le fait que lors des perquisitions, dans le matériel d’airsoft, le matériel de protection n’apparait pas, notamment les protections pour les dents, les lunettes, etc.

La juge reprend sur l’airsoft et lui demande s’il pratique régulièrement.

M. répond qu’il n’a pas trop pratiqué même si il aime ça, qu’il a dû faire 3 parties en tout, notamment le 11 et le 12 à Pins Justaret, qu’il a peu utilisé le matériel car il n’a pas trop eu l’occasion, et que jouer seul est bof et qu’il n’a pas trop trouvé de compagnon pour cette pratique, « dans les clubs d’airsoft c’est beaucoup de beaufs ». Il y a joué un peu avec F. et avec D.

Juge : “Vous dites à un moment que D. dit des choses fausses.”

M : “J’en avais rien à faire, ça n’a aucune importance de me rappeler qu’on a posé un sac de réplique d’airsoft à tel endroit…”

Juge: “J’essaye de comprendre pourquoi vous vous êtes arc-bouté à ce moment là en GAV”.

M : “C’est simple, association de malfaiteurs terroriste, 30 ans.”

Juge : “On revient sur une autre catégorie d’armes retrouvé dans votre camion, notamment un lance-pierre et des billes en acier”

M : “je ne savais pas que c’était illégal, j’ai travaillé à Décathlon… depuis petit j’en ai, j’adorais Denis la Malice. Je trouve ça fou d’être devant vous aujourd’hui, en antiterro, et de parler de lance-pierre !”

La juge aborde sa consommation excessive d’alcool, lui demande s’il confirme et s’il était soigné pour cela.

J : »d’après les enquêteurs, des sourires accompagnent vos réponses…” en GAV

M: “On me dit à ce moment-là que je suis le lieutenant du leader charismatique ! Alors que je fonctionne sur un système horizontal, je suis le lieutenant de personne ! Et j’avais un masque, comment c’est possible de voir ça ? »

Juge: “Une réaction nerveuse peut etre?

M : « C’est une interprétation. »

La juge aborde le fait qu’il soit allé en Irak, « pas pour faire du tourisme ». Pourquoi ne pas l’avoir dit en GAV ?”

M. explique avoir fait une escale en Irak pour aller au Rojava, “on sait que c’est criminalisé”. Elle lui coupe à de nombreuses reprises la parole, parle à sa place. Il explique que le long du trajet avec F. en camion, ils se sont faits contrôler à plusieurs frontières, qu’il a trouvé ça louche, et qu’à l’aéroport on lui a posé des questions sur qui l’accompagnait, des questions ciblées sur F. Ça ne l’a pas découragé, mais étonné. Selon les récits, il y a plutôt des problèmes et contrôle au retour, pour les personnes de gauche, mais pas à l’aller. Pendant la GAV, je n’ai pas voulu le dire au début, et puis à un moment j’ai dit avoir voulu soutenir les kurdes.” 

Puis il explique avoir renoncé au passage à ce moment-là car c’était trop dangereux. Il explique que tous ces proches étaient au courant qu’il partait au Rojava, “par respect pour ma mère et mon frère, par honnêteté”. “Dans les premiers interrogatoires je n’en ai pas parlé par peur”.

Juge : “est ce que vous vous êtes entrainé avec F. ou autre avant votre départ? Avec des répliques d’armes, c’est aussi pour s’entrainer.”

M : “Mais on parle d’entrainement avec 3 parties ludiques ? Pour se familiariser à la rigueur, mais le mot entrainement, non.”

Juge : « Je voudrais écarter la Colombie du débat »

M : “Ça a eu un impact sur moi, aujourd’hui tant mieux ça a été effacé, mais imaginez si j’y avais été seul !”

Juge: “ca ne me gène pas d’en parler mais je n’y vois pas un intéret majeur. La Colombie ne sera pas remise au centre. Mais dans votre séjour, y a-t-il eu un apprentissage au maniement des armes ?”

M : Il n’y en a pas eu”

La juge reprend sur l’airsoft et sur leur rencontre à Pins Justaret. 

Juge: “Pour y faire quoi?”

M : “une partie d’airsoft ludique avec 2 amis dans une maison.”

Juge : “Qui a trouvé cette maison ? C’est un beau terrain de jeu.”

M : “peut-être moi, peut-être F. Sur un trajet en Ariège, la maison est au bord d’une route, avec des habitations à coté, elle n’est pas paumé, elle est visible. On a découvert les lieux, une personne se cachait dans une pièce, les autres devait la trouver.

Juge : “Est-ce que pour L. c’était sa premiere fois ?”

M : “On n’était pas doués donc j’imagine que oui ».

Juge : “Encore une fois, cétait vraiment ludique? Il y a tout de même une certaine proximité avec le maniement des armes.

M : « Je me familiarisais avant mon retour au Rojava, avec des répliques, pour me mettre en confiance ». 

Juge : mais en 2019 les frontières ont bougé… Daesh… (elle sous-entend que la lutte contre Daesh est finie en 2019, preuve qu’elle ne connait pas le contexte sur place).

M : je ne suis pas Rambo, ce qui m’intéresse aussi c’est le confédéralisme démocratique, en dehors de combatttre au Rojava. Ce qui peut être défensif aussi, pas comme une attaque. Et sur place il peut se passer n’importe quoi.

Juge : “Pins Justaret c’est juste le 11-12 ?

M : « Oui ».

Juge : « le 25 mai, vous y étiez ? »

M : « Oui, on est parti dans l’idée de faire de l’airsoft, et on a fait une beuverie autour d’un feu avec d’autres camions. Il me semble que L. et F. ont fait du sport aussi. »

Elle le questionne également sur la fréquence à laquelle ils se voient, sur les lieux, les raisons. Il répond parfois pour faire de la mécanique sur leur Mercedes, pour faire de l’airsoft, pour des beuveries, des discussions, “rien de transcendant”.

16h15. On passe sur le sujet des « notes ».

 M. refait une déclaration, à propos de ses notes. “Il y a maintes raisons pour lesquelles j’en ai pas parlé, personne n’est au courant de ces notes, c’est mes notes, personne ne sera nommé”. M. dit d’emblée qu’il est sujet aux pertes de mémoire.

Juge : Est-ce qu’une personne est désignée pour prendre des notes ?

M : pas forcément prise par une personne mais par qui a envie.

J : Réinsiste sur le séjour au lac, sur le fait qu’il ne se souvienne pas (en Gav) de la présence de L.

M. parle de ses pertes de mémoire et du fait que cette journée était complètement insignifiante.

La juge aborde les notes sur le Tekmil mais, n’ayant plus de voix, elle propose une suspension courte pour s’en remettre, vers 17h05.

Reprise à 17h20.

La présidente ré-aborde donc le sujet des notes prises par Manu, les décrivant comme un bloc de bureau de 25 pages, avec plusieurs feuilles volantes. Elle décrit les différents feuillets.

Le feuillet 29 porte la mention de la date du 25 mai, avec une mention d’ODJ.

S’en suit un flottement d’une bonne minute où elle cherche des trucs sur sont ordi.

Manu coupe ce blanc qui traine : « J’peux dire une p’tite chose ? »

Rires de la salle, et de la juge.

Elle finit sa recherche et lui donne la parole.

Il explique qu’en prison il n’a pu avoir accès aux notes de son carnet que sous retranscription écrite de la DGSI, plutôt que des photocopies des pages du carnet.

Et que c’était ainsi difficile pour lui de comprendre de quoi ils parlaient sous cette forme, sans la mise en page, les liens entre les mots, les lignes, etc..

« Je captais pas ce qui était noté. »

La présidente décrit les feuillets volants, retranscrits dans un ordre aléatoire.

J : « On va essayer de comprendre la logique générale de ces notes, par ordre chronologique ».

Il est écrit « Réunion 11/02/2020 » (à Pins Justaret)

Il y a cafouillage dans les numéros de pages entre les deux versions pour s’y retrouver.

Manu demande à avoir les feuilles de ce carnet, et les retranscriptions, pour réussir à suivre et répondre à la juge. Son avocate les lui donne.

La présidente énumère les différentes lignes/tirets sur cette page, et questionne Manu sur les termes présents.

Puis elle l’interroge sur le terme « Tekmil », il lui explique que ça vient du Rojava, ce sont des réunions où les membres font une critique et autocritique de soi et des autres, qui permet de faire redescendre la pression et que les gens ne s’engueulent pas. 

Elle lui demande qui est la personne dont le pseudo est « Soli » et lui demande si c’est lui, il lui répond que comme dit auparavant il ne donnera aucun nom. Puis elle l’interroge sur les termes « reprise en main et montage/démontage », « jouet », « armes », il lui répond que ça fait référence à l’airsoft. « TW » signifie talkie-walkie.

La juge lui demande pourquoi utiliser des termes d’anglais et si ces mises en situation pourraient resservir. M. répond que ce sont des notes à lui-même, pour un éventuel retour au Rojava.

La juge lui rappelle que devant le JI il aurait affirmé que ces notes n’auraient pas été prises à Pins Justaret, ou alors peut-être dans la nuit du 11 février, et ce qu’il en est aujourd’hui. M. lui répond qu’en fait oui, après recontextualisation.

La présidente en revient aux termes. « Travail groupe jouer », « pouvoir faire ennemi », M. répond qu’il s’agit toujours d’airsoft.

« Discussion sous », M. lui répond que c’est vague, que c’est sûrement par rapport au terrain.

Sur le feuillet 2, il est noté « ODJ 11 février » suivi d’une énumération de mots. M. répond que c’est un ordre du jour, avec des estimations de temps, (mais complètement aléatoire) les sujets dont il voulait discuter.

Sur le terme « recrutement », la juge lui demande si cela a un rapport avec l’airsoft. M. ne se rappelle plus exactement, ça peut être « recruter » des personnes pour jouer à l’airsoft, mais aussi question de répondre à un questionnaire pour « recrutement » au Rojava.

J : « Boxe ? » 

M : « Oui ».

J : « Réunion internationale » 

M. n’y était pas, il y a cafouillage dans les dates de la part de la juge entre les mois de mai et de mars. C’était du 9 au 16 mars, au moment du confinement. Il s’agit sûrement d’un rassemblement anarchiste en suisse.

La juge lui demande pourquoi il est écrit « Avocat ». M répond que c’est pour l’expulsion éventuelle du squat, et pour le retour du Rojava.

Sur le terme « Rechercher arme ». 

M. explique que c’est une erreur de retranscription, et qu’il est écrit « ReCHECKER armes ».

La juge fait remarquer qu’il utilise toujours le même vocabulaire « armes », « jouets ».

M lui répond que c’est toujours pareil, la même chose, qu’il s’agit d’airsoft.

J : « Débat de fond sécurité/technologie » 

M. explique qu’il s’agit de s’anonymiser par rapport au Rojava, de se protéger. Mais que c’est aussi l’hygiène de base dans les milieux militants, une habitude.

J : « cleaning » 

M : « Je pense que c’est toujours pour l’airsoft, le nettoyage des répliques. »

J : « Vous avez vraiment besoin de tout écrire ? »

M : « Oui, par exemple, depuis le début du procès je note tout, j’écris pour me rappeler. »

J : « Thunes » 

M : « Argent. Plein de raisons possibles… »

La juge passe au feuillet 6 à la suite de ce qui semble être un retour d’infos. Elle lui demande qui est « Raph ». M. refuse de répondre à la question. Sur qui est « Domi », il répond que c’est lui. Elle lui demande si les autres surnoms désignent F. et L., M. refuse à nouveau de répondre à la question. 

La juge l’interroge sur le terme « Permis de chasse ». M. répond que c’est pour avoir la possibilité d’un mode de vie plus autonome.

Sur le terme « achat au black », M. répond qu’il s’agit d’un fusil d’airsoft au black, qui ne se vendait pas en magasin, et que c’est évidemment moins cher qu’en magasin. 

Elle lui demande l’interêt de demander à d’autres personnes de faire de l’airsoft, M répond que oui, comme il lui a dit ça lui plait, et qu’à 2 ou 3 ce n’est pas très ludique.

J : « Krav maga » ? 

M : éventuellement, même si ça me botte pas forcément.

La juge continue de citer ses notes : « Réunion Internationale en Suisse », avec plein de mots accolés. Quel était le contenu de la réunion ? 

M répond qu’il n’as pu retrouver les infos sur internet malgré ses recherches et que son intérêt était moyen pour cet événement.

A la question de pourquoi les avoir alors notés, M répond que ce sont des prises de notes pour en discuter plus tard. 

J : « Il y a quand même des personnes notées pour aller là bas, pour représenter un groupe ? Emmanuel, Raph ?

M : « C’était une prise de contact avec des personnes qui allaient au rassemblement, et qui étaient intéressés pour aller au Rojava, pour discuter des procédures qu’il a lui même rencontrées pour aller là bas.

Il précise qu’il n’est pas recruteur, il dit qu’il a eu accès à des questionnaires sur le Rojava. Dans la logique du fonctionnement politique au Rojava il est demandé de faire un retour sur le questionnaire.

La présidente revient sur les termes « Tekmil », « ma position face à vous 2 », « voir protocole de groupe »… Elle lui fait remarquer que ces réunions sont assez formalisées, lui demande si c’est une forme d’organisation, si c’est pour progresser.

M explique que le Tekmil c’est surtout une position, un fonctionnement, une façon de faire. Respectueuse. C’est valable pour tout, pour un atelier. Genre la veganaise (revient sur exemple de Bastien la veille. Rires de la salle) ne se passe pas bien, on se prend la tête, on fait un tekmil pour apaiser les choses.

Au terme « recrutement purge », M répond qu’il est peut-être question de faire un jeun à se moment là ? Il ne se rappelle pas trop.

La juge cite : « préparer serment ». 

M : « Vous allez me parler de la brochure « la milice machin », j’ai énormément de brochures, celle-là je ne l’ai pas lue. Mais en la feuilletant, j’avais vu ce mot et je me suis rappelé avoir entendu dire qu’au Rojava il y avait un serment de fait, je voulais en savoir plus, prêter un serment ne me parle pas dans ma façon de faire. C’était plutôt pour en faire un sujet de conversation.

J : « C’est couplé avec l’outil PNL ». Le lien avec Loic semble évident à la présidente vu qu’il s’y forme à ce moment. 

M lui répond que le lien n’est pas « évident », que Loic n’est pas l’unique spécialiste de la PNL, qu’ils en ont parlé les brèves fois où il se sont vus..

La présidente fait remarquer que le terme « recrutement » revient plusieurs fois.

M explique que c’est toujours par rapport au Rojava, qu’il ne pouvait pas mettre « contrat d’embauche » (rires de la salle).

La juge mentionne que le tout premier point de ce document sur une unité milicienne est « comment recruter les membres ». M. lui répond qu’il ne l’a pas lu. En y ayant accès plus tard dans le dossier, il s’est dit qu’en effet ça pouvait prêter à confusion, mais il n’y a aucun lien pour lui. Ce à quoi la juge rétorque que pourtant la brochure était dans le même sac que ses notes. M. l’avait prise puis laissée dans son sac sans la lire. D’ailleurs il y en avait plusieurs autres dont il n’est pas fait mention dans le dossier.

J : « Pourtant les 9 points de ce fascicule sont en lien avec les notes ! » La juge énumère ces points, dont une allusion à une citation sur Mao, mélangé à la pratique de l’airsoft, c’est un gros mélange de tout et n’importe quoi ! Elle pointe des coïncidences très étranges avec la thématique militaire.

M. répond qu’il n’est pas maoïste. 

La présidente pointe une coïncidence très étrange entre ce qu’il met dans ses notes et la brochure. Elle insinue qu’il aurait pu avoir l’intention de mettre tout ça en pratique sur le territoire national et lui demande si tout cela est seulement pour le Rojava.

M : « Jamais je n’aurais pensé faire quoi que ce soit sur le territoire français. Je ne suis pas un assassin, un psychopathe et encore moins un terroriste !! » (Il s’agace et réfute fortement ces accusations sous-entendues).

Juge assesseuse de droite : 

J ass : « Pourquoi vous dites parfois « jouets » et parfois « armes » ? C’est un synonyme ? Vous savez que les mots ont un sens ? Vous comprenez que l’on puisse se questionner ? » (petite leçon au passage…)

M : « Oui je comprends qu’on puisse le prendre dans ce sens. Mais j’écris mal et vite, il n’a jamais été question d’armes réelles, on parle toujours d’airsoft. »

J. ass : « Ces notes ne parlent donc que d’airsoft, mais mélangé au Rojava. Il y est aussi écrit « création d’une milice », on pourrait avoir l’impression que ça passe à autre chose ».

M : « J’ai noté que je voulais lire la brochure, pour y penser ».

J. ass : « Alice ? Alix ? » (elle tente son coup au cas où). 

M : « Non. »

J. ass : « A quel moment vous avez pratiqué l’airsoft? À quel rythme ? »

M : « J’ai fait peu de parties, seulement celles du dossier, car il n’y avait pas assez de monde pour jouer, et les clubs sont relativement remplis de beaufs. Et ça pouvait être pratique aussi pour le Rojava, en mode opportuniste ». 

Il revient sur le 25 mai et précise qu’à cette date dans le carnet, il ne s’agit pas d’une réunion, que c’était seulement des choses qu’il voulait aborder sans moment spécifique. Il ajoute « on devait faire une partie d’airsoft et au final y’avait des camions, donc on a juste bu des coups avec les autres nomades ». 

J. ass : « La question du serment semble vous tenir à coeur ? »

M : « Oui, c’est une question qui m’intéresse, qui fait parti des sujets de conversation qui viennent et sont abordés ensemble ».

J. ass : « Et l’utilisation de pseudos ? »

M : « C’est en lien avec l’anonymisation et le Rojava. C’est quelque chose de courant aussi dans nos milieux, on s’appelle par nos pseudos ».

La Procureure

Pr : « Pour parlez de votre relation avec F., vous vous dites « comme les doigts de la main », qu’en est-il ? Fait-il partie de votre cercle très proche ou pas du tout ? » (le sens de la mesure…)

M : « Oui, on se connaît depuis le lycée, j’ai confiance en lui. »

Pr : « A quel moment vous retrouvez-vous après son retour du Rojava ? »

M : « En 2018, on fréquentait les mêmes milieux, notamment les concerts punk. Un jour j’ai reçu un SMS de lui. On s’était perdus de vue pendants quelques années, je suis parti vivre à Lille, on s’est vus de manière sporadique. »

La procureure lui demande si leurs liens se sont intensifiés après son retour et si leur proximité s’est accentuée.

M : « Oui et non, je faisais ma vie en même temps, pas plus à ce moment là, on est proche, j’allais en Ariège, on se voyait au PUM, en concerts punk. »

Pr : « Dans les écoutes, on semble comprendre que vous émettez l’hypothèse que lors d’une entrée de la BAC au PUM, ce serait en lien avec F. Pourquoi ? » (râles dans la salle)

Le rapport c’est juste qu’il était avec Flo à ce moment là c’est tout.

La procureure lui demande ensuite pourquoi il a contacté Air France pour le retour de F en Grèce. M. répond que c’est sûrement parce que F avait besoin des horaires et qu’il n’avait pas accès à internet.

La proc à un débit de parole plus rapide que Busta Rhymes.

La proc demande pourquoi son ami V n’est pas au courant qu’il fait de l’airsoft, M. ne voit pas pourquoi il lui en aurait parlé, que c’est juste une activité ludique.

La proc l’interroge sur la présence de la fameuse brochure dans son sac. M. répond qu’il l’a feuilletée avant de la mettre dans son sac après l’avoir récupérée dans un Infokiosque.

Elle lui demande si c’est lui qui a transmis ce document à W. car il a été également découvert sur son ordinateur. 

M. répond qu’il n’y a aucun lien, qu’il ne lui a pas transmis.

Pr : « Dans cette brochure on trouve que « la règle principale d’une unité milicienne est de travailler avec des personnes de confiance », vous avez quelque chose à en dire ? »

M : « Non. »

La procureure enchaîne sur les notes et lui demande ce que signifie « premiers secours ».

M. lui répond que c’est un sujet normal, abordé quand on part au Rojava, qui est un lieu de conflit. Concernant le lien avec la brochure, ça ne le concerne pas donc il ne peut pas répondre.

Puis la procureure fait un lien entre le livre de Mao (cité dans la brochure) et le fait de « prendre les armes là ou elles sont » ( ce qui a été dit par L. en GAV).

Elle revient sur les notes et lui demande ce qu’est le principe de « serment ».

M. lui répond qu’on peut prêter serment avant de partir au combat et que cela lui posait question.

La procureur fait le lien à fond entre la brochure et les notes, elle donne tout et se penche de plus en plus en avant pour manger le micro.

M. précise qu’il y avait d’autres documents dans son sac, notamment « Comment parler kurde » et un autre, mais que rien d’autre n’est cité !

La procureure lui fait remarquer qu’il y a 3 pseudos dans ses notes, et qu’ils étaient 3, pour elle le lien est évident. M. refuse de se prononcer.

Puis elle enchaîne en lui demandant pourquoi F veut il les réunir tous les deux avec L. et si le moment passé à Pins Justaret est une préparation à un éventuel départ pour le Rojava. 

Il répond ce qu’il a déjà dit, que pour lui c’était une occasion de se familiariser à certaines choses pour son idée de départ.

Elle lui demande pourquoi ils font usage de talkies-walkies.

Il répond que c’est aussi lié au Rojava. C’est un objet technique à connaître, il faut aprendre à s’en servir, ce n’est pas juste appuyer sur un bouton et hop. 

La procureur fait le lien entre l’utilisation de talkies-walkies à ce moment-là, et le vol d’engrais préparé par F. et M. H.

M lui répond qu’il n’y a absolument aucun rapport entre les deux.

La procureur lui demande pourquoi sont mentionnés les termes « nettoyage ADN » et « objet incendiaire » et s’il y a un lien entre les deux. M. répond que ce sont des sujets qui étaient au programme de la réunion internationale, d’après son contact, et qu’il n’y est pas allé.

Sur la mention « est-ce qu’on est prêt à ce qu’un camarade soit blessé ou tué ? »

M. répond que c’est toujours pareil, qu’il s’agit du Rojava, bien sûr et que c’est une réflexion à avoir avant d’y aller.

Elle lui demande confirmation que lorsqu’il dit que cela lui semble évident, il dit cela parce qu’il s’agit d’un territoire de guerre.

M. confirme que oui, mais que rien n’était prévu ici.

La proc lui dit qu’à Saint Lieu la Fenestre sont mentionnés 3 alias, 3 personnes, et lui demande si ce sont les mêmes.

M. refuse de répondre à la question. 

La Procureure mentionne qu’il a également écrit le numéro de l’avocat Me Dosé, que M. affirme avoir noté pour son retour du Rojava. Il est noté à côté « pour Raf, premier contact par signal », avec un trait qui semble relier les deux.

M : « Je ne sais pas quoi dire sur ces notes, pour moi c’est évident que le numéro de l’avocat me concerne ».

La procureur l’attaque sur ses discussions « militaires », sur l’expérience de Flo. Il répond que beaucoup d’autres choses l’intéressent chez Flo et ne sont pas citées.

La proc l’interroge sur le fait qu’il ait reçu une « lettre d’ami.es depuis Toulouse » en détention, dans cette lettre il est écrit « rappelons qu’il n’y a ni innocents ni coupables » Ça parle aussi de solidarité et de défense collective.

M. répond qu’il a reçu plus d’une centaine de lettres en prison et qu’il n’est pas responsable de ce qui y est écrit. 

Pr : « Est-ce que ce « MOT D’ORDRE » vous a inspiré quelque chose ? »

( la salle rit ! )

Avocat-e-s : 

Avocate de L (Me TORT)

A : « Vous regardez vos notes, nous avons eu accès au dossier, est-ce que vous avez retrouvé dans le dossier l’intégralité de votre carnet ? »

M : « Non. »

A : « Ce bloc petits carreaux et ces 5 feuillets volants grands carreaux, dans le procès verbal, c’est à la suite, on dirait une suite logique, mais est-ce qu’on a la certitude qu’on les exploite dans le bon ordre ? On ne peut pas savoir si c’est exhaustif, si il y en a d’autres, si c’est dans le bon ordre. Certains feuillets ont été nommés « sans intérêt », on ne peut donc pas les consulter dans le dossier ». Elle s’étonne et montre une certaine incompréhension dans le choix des retranscriptions.

Elle fait également remarquer qu’il y a pleins d’autres infos, des trucs sur les impôts, des trucs à faire chez sa mère. A votre avis, quelle est la logique de la sélection de la DGSI ?

Aussi j’imagine qu’il y a d’autres personnes dans votre entourage proche qui parlent de psycho, de PNL, etc. Peut-on être sûr.es qu’à chaque fois vous parlez de L. ?

M : ça n’est pas impossible, car on en entendait parler beaucoup à l’époque, cela parle aussi d’autres personnes, oui.

A : « Concernant les surnoms, « Alix », « Alex », retranscrits à la va-vite, s’agit-il du même ?

M : « Non. »

A : « Y a-t-il un intérêt à changer de pseudo pour une même personne ? »

M : « Non, il n’y a aucun d’intérêt, ça serait plus perturbant qu’autre chose ».

Avocate de F (Me Bouillon) : 

A : « Vous faites mention dans ces notes de « camion et élec », d’« arroser les plantes », de « fermer les volets », qu’en est-il ?

M : « Dans ces notes, il est question de tout et n’importe quoi ».

A : et « procès » ? « Facture » ?

M : il est question du squat du Pum.

Avocat de F (Me Kempf) :

A : « Vous avez évoqué avoir été interrogé à Athènes sur F., c’est un élément nouveau, ça m’intéresse. Voulez-vous bien nous donner le contexte ? »

M : « Oui, le 13 juin 2019. En présentant mon billet d’avion, à l’aéroport, j’ai été emmené dans une salle à part et une policière m’a interrogé, sur pourquoi je partais la bas, comment, quel véhicule m’avait amené, quelle était sa plaque d’immatriculation. C’était en anglais, j’ai galéré. Ils voulaient savoir avec qui j’étais.

A : « La police avait déjà ciblé F. ? »

M : « Oui. Aussi j’ai vu dans les multiples contrôles de douane sur la route qu’il y avait quelque chose de bizarre, ça m’a fait tilt, je me suis dit que j’étais déjà surveillé avant de partir. »

A : « F songeait-il à retourner au Rojava ? »

M : « Oui, mais plus tard, sinon il serait reparti avec moi ».

Avocate de W. (Me Meyniard)

A : la brochure a été trouvé dans un infokiosque, vous ne vous rappelez plus où, ce pourrait-il qu’elle ait été trouvée à Sivens ?

M : « C’est possible ».

Avocate de M. (Me VANNIER) 

A : »Combien de fois vous vous êtes vu avec F. en 2020 ? »

M : « Très peu ».

L’avocat de M. affirme que cela a été confirmé par l’instruction et lui demande ce qu’il a fait pendant le confinement. Elle lui demande s’il lui a été proposé de venir à Parcoul. M. répond que non, qu’il se trouvait en Ardèche avec sa compagne de l’époque, dans la forêt, « au top ». A la question de savoir s’il en aurait eu envie il répond que non, qu’il était très bien dans les bois. 

A : « Le 27 mai 2021, avez-vous eu l’autorisation d’accéder au dossier en détention ? »

M : « J’ai demandé aux matons » (il se fait reprendre par la juge qui souligne qu’on dit « surveillants » et qu’elle se rend compte qu’il a un 2ème type de vocabulaire qu’elle n’avait pas encore remarqué). M. explique qu’ils n’ont pas accès au dossier en détention, que le dossier se trouve sur un CD consultable par ordinateur 1h de temps en temps unniquement.

Elle pose différentes questions sur des discussions, notamment une discussion avec son ex compagne, sur une intervention de police au squat PUM, mais aussi sur une conversation avec F. au sujet de l’emplacement d’un falafel à Souleymanie.

Elle parle aussi de différentes notes, « possibilité d’être solvable », qui se réfèrent au squat, et fait remarquer que la question du terrain est omniprésente dans les feuillets. Il répond que c’est son projet de vie, que les questions d’autosuffisances lui importent.

Au sujet de l’utilisation de pseudos, M. répond qu’on s’anonymise tout le temps dans nos milieux militants.

L’avocate de M. pose une question sur D., qui a prétendu en GAV qu’il pensait avoir transporté un sac avec des armes, et qu’il était en colère car il croyait qu’on l’avait « pris pour un pigeon ».

M : « Ce sont des jouets d’airsoft ! »

Elle lui demande ce qu’il y avait d’autre dans son sac autre que la brochure. 

M. répond que s’y trouvaient aussi un livre sur l’hygiène alimentaire et un livre sur comment parler kurde.

Avocate de M. (Me SIMON)

L’avocate lui pose une question sur la brochure et ce qu’elle contient. Elle lui demande si il a un détecteur de mine. Elle se demande si lorsqu’on envisage une action terroriste en France, on a besoin d’un linguiste ? D’un nageur ?

Elle dira que comme lui, ses notes sont « éclatées » (rires de la salle).

A : « Vous parlez d’autocritique sur votre travail, de tekmil, est-ce que vous utilisez ces discussions un peu comme une communication non violente et du développement personnel ? »

M : « Oui. »

L’avocate fait remarquer qu’il y parle parfois de débat de fond, mais qu’il y a aussi des feuillets qui ne parlent que du squat, et que le terrain y est aussi omniprésent.

M. lui répond que c’est son projet depuis longtemps. Il souhaite vivre en auto-suffisance, dans la légalité. Il va avoir 40 ans, il trouve que c’est épuisant de se voir expulsé tout le temps. Son projet de vie, sa pratique de l’airsoft, son souhait de monter des projets collectifs, le Rojava, ses notes touchent à toutes ce différentes choses.

Les écoutes 

J : « Dans une conversation d’octobre 2020, on parle de l’acquisition d’une arme, vous parlez de différents prix, vous comprenez qu’on parle d’une vraie arme ou d’une réplique ? »

M : « Tout ce dont je me souviens c’est « coin coin coin coin coin » ! Désolé Mme la greffière, deux canards qui parlent (rires dans la salle), F. raconte beaucoup de choses, on dit « kalach légale », ça ne veut rien dire ! »

Proc : « Vous poursuivez la conversation autour de l’idée de « se préparer et de préparer d’autres personnes à lutter » (d’après une synthèse de la DGSI, les retranscriptions sont absentes, et les audios n’ont pas été transmis par la DGSI malgré la demande de la Défense)

M : « J’insiste sur le fait qu’il est 23h, nous sommes alcoolisés… C’est une conclusion hâtive et à charge faite par les inspecteurs en GAV. Ce sont des « branques qui fanfaronnent ».

La procureure cite un autre extrait de conversation où sont mentionnés des termes tels que « chiens de garde », « à partir du moment ou la 1ère balle va être tirée par les chiens de garde », « on pourrait jamais faire face à tout ça » et lui demande « Qui est ce « on » ? Vous incluez-vous dedans ? Est-ce que c’est banal de parler de « chiens de garde » lorsqu’on parle de la police ? ».

M. répond que c’est une discussion qui pourrait être entendue dans chaque famille, et que c’est très répandu dans la population, notamment depuis les gilets jaunes.

La procureur s’énerve et dit que non ce n’est pas banal, elle peut nous l’assurer (râle dans la salle).

La procureure enchaîne et essaie de le piéger en lui demandant si cela lui paraît également banal de parler d’arme légales et de kalachnikov ?

M : « kalach légale », ça me paraît un antipode (rires). « Un oxymore » reprend la juge.

Avocate de M. (Me SIMON)

A : « Qui a retranscrit ce procès-verbal ? Figurez-vous qu’il s’agit également du fameux matricule 856Si. On peut souligner au passage qu’on ne pourra pas lui poser la question. Donc, 20h, début de conversation, 23h, ça devient intéressant. On a une phrase de F, mais on n’a pas vos réponses, bon dommage, on doit se contenter de cette synthèse. On va donc partir de là. » 

L’avocate de M. enchaîne et parle de cours de grammaire, « la personne disait que », elle cite qu’il s’agit bien de discourt rapporté, indirect, selon la retranscription. « On m’a dit que » et non une opinion personnelle.

Avocat de F (Me Kempf) :

Il cite les livres « Les chiens de garde » de Paul Nizan et le documentaire « Les nouveaux chiens de garde » de Serge Halimi, où l’on fait référence respectivement aux philosophes puis aux médias de masse. C’est une expression polysémique.

Il parle aussi de la retranscription avec neuf […/…] en pleine discution. Il a mis 38 secondes en se chronométrant à relire un passage qui retranscrit 8 minutes de conversation . « Pas de question mais vous voyez ou je veux en venir ».