MARDI 17 OCTOBRE

17/10

Me Kempf demande l’accès aux notes d’audience. La Juge et lui sont en désaccord, elle lui dit que ces notes ne seront pas disponibles avant la fin des débats. Becker se joint à Kempf.

CAMILLE 

La présidente demande s’il y avait-il assez d’armes airsoft pour tout le monde, C. répond que probablement mais que n’étant pas spécialiste elle ne saurait dire ce qu’elle avait précisément en main. S’agissant de savoir s’il y avait eu des tirs, C. répond que les répliques ne fonctionnaient pas toutes (système de billes) et qu’il n’y a pas eu de tirs. Elle répond sur le déroulement de l’après-midi, les participant.es ont fait des binômes, pas toujours les mêmes et ont fait deux ou trois parties. 

La juge l’interroge sur l’arme à canon scié et ses munitions trouvées dans le camion de F., C. répond qu’elle n’a jamais vu cette arme dans le camion de F.

La juge reprend sur l’airsoft et énumère les répliques trouvées dans le camion, demande comment cela s’est passé.

C. explique le déroulement des parties, qui ouvre les pièces, passe devant, derrière, et quand le tour de la maison est fait la partie est terminée. C. explique que c’était l’occasion de faire des choses toustes ensemble et de casser les codes entre mecs et femmes. A la question de savoir si cela lui a plu, elle répond qu’elle a trouvé ça marrant, qu’il y a eu des anecdotes, mais qu’elle n’en n’a jamais refait.

La juge cite So. et dit que cela avait l’air de beaucoup tenir à cœur de F. de faire ces parties. C. répond que tout le monde était motivé ce jour-là, que la veille les répliques avaient été présentées et qu’iels avaient pris le temps d’apprendre à les manipuler, les autres femmes n’étant pas présentes ce jour-là.

La juge revient sur la sonorisation du 02 mai 2020 où C. et F. reparlent de l’activité de l’après-midi. C. explique que c’est normal qu’iels en reparlent puisque ça les a occupé.es une partie de la journée, que F. cherche comment il pourrait améliorer les prochaines parties, mais qu’elle est moins intéressée par les détails techniques.

C. est éprouvée et rencontre des difficultés pour commenter des dialogues qu’elle n’a pas sous les yeux, elle a besoin d’une pause pour se ressaisir. Elle explique que tout cela pèse énormément sur sa vie depuis trois ans. 

La juge enchaîne et poursuit la lecture des retranscriptions. Elle oriente ses questions sur la volonté de F. de transmettre et le présente comme quelqu’un qui souhaiterait « enseigner » ce qu’il connaît. Ce à quoi C. répond qu’il est normal que lorsqu’on présente une activité, on souhaite qu’elle plaise à toustes.

Puis la juge l’interroge sur le rapport avec le Rojava, sur la base des sonorisations. C. répond que cela n’a aucun rapport, que F. ressent parfois le besoin de parler du Rojava lorsque que certaines choses y font écho. Cet après-midi là, tout le monde s’est approprié les choses à sa manière, c’était de la rigolade. 

La juge cite une retranscription dans laquelle le terme « brown » est employé et lui demande ce que cela signifie, C. dit n’en avoir aucune idée.

C. et F. reparlent des maniements effectués lors de la présentation de la veille, alors que tout le monde n’était pas présent, mais c’est totalement secondaire, le principal étant que tout le monde se soit senti à l’aise.

La juge demande s’il y a eu de nouvelles propositions pour cette activité, C. répond que c’était rigolo mais qu’iels avaient envie de faire d’autres choses, et qu’i n’y a donc pas eu de nouvelle proposition de refaire des parties d’airsoft.

Procureur :

Il relance C. sur le fait qu’il n’y aurait pas eu qu’une partie d’airsoft à l’écoute des retranscriptions (So et B. parlent de plusieurs parties). C. lui répond qu’elle a l’impression de tourner en rond sur cette question, qu’elle a déjà expliqué qu’il s’agissait de discussions sur le temps de présentation, la veille du jour où ont eu lieu les parties. 

Le proc évoque un extrait où F. parle de leadership et insinue que F. se définirait en tant que « leader ». C. lui répond qu’à l’inverse parle des autres qui mènent la danse, et qu’il souhaite faire attention à ne pas prendre trop de place et que chacun.e puisse prendre le leadership à tour de rôle. 

Le procureur fait remarquer que le terme « travail » revient à plusieurs reprises dans les conversations. C. lui rétorque qu’il extrait le terme de son contexte, et que dans ce passage, F. fait référence à son travail corporel. C’est un terme que F. utilise régulièrement et dans beaucoup d’autres contextes : communication, lecture, activités, ce qui souligne la mauvaise foi du procureur.

Le proc cite alors la GAV de So qui affirme que F. souhaitait partager son expérience.

C. rappelle le côté performatif des GAV, chacun.e a son regard, son vécu, son ressenti. Dans les dynamiques de groupe, beaucoup sont dans la rigolade et certain;es parfois ne font pas toujours attention aux personnes autour d’elleux et peuvent être blessant.es sans s’en rendre compte, notamment les mecs.

Le procureur lui demande si elle a pris plaisir à ces parties d’airsoft et cite sa GAV, ce à quoi C. répond qu’à ce moment de sa GAV elle est agacée de l’insistance autour de cet après-midi. Elle a à la fois pris du plaisir à jouer dans une dynamique de groupe, mais elle a aussi pleuré suite à un moment qui l’avait blessée. 

« Tout n’est pas rires ou larmes et je ne suis pas sûre que vous êtes capable, M. le procureur, de comprendre la complexité des échanges humains ».

Avocats :

Me Arnoult rappelle que la conversation dure seulement 6 minutes bien qu’elle ait été définie par l’accusation comme étant très longue. Il revient sur les déclarations de So en GAV qui relate bien la rotation de binômes. 

Me Chalot demande à C. si cela était une activité secrète, C. répond que pas du tout, elle en a même parlé à sa mère, qui l’a évoqué par la suite lors des enquêtes de personnalité.

Me Kempf souligne le fait que la juge ait posé une question sur l’arme au canon scié au millieu de l’interrogatoire sur les parties d’airsoft. La juge reconnaît que cela concernait les armes et que ce n’était pas bien placé. Il s’interroge sur les critères qui déterminent la retrasncription ou non d’une sonorisation. Est-ce pour être utile à la manifestation de la vérité ? 

C. avoue ne pas bien comprendre, cela ne représente qu’une infime partie de leurs vies. 

Me Kempf cite alors des extraits où le vocabulaire utilisé par C. et F. est celui du jeu : « ludique », « jeu », puis demande à C. la définition de performatif. Il fait remarquer que ce sont les enquêteurs eux-mêmes qui ont utilisés le terme « d’entraînements » s’agissant des parties d’airsoft lors de la GAV de So, alors que cela ne fait pas partie de son vocabulaire. Sur le PV de sa GAV, sa réponse commence « A votre question » sans que la question soit inscrite sur le PV, ce qui est illégal, les questions doivent paraître sur les PV.

Me Bouillon 

Elle dénonce le fait que dans le dossier, des recherches ont été faites sur un rappeur (musique de fond sonore), sur les avocates elleux-mêmes (légal team), mais aucune recherche n’a été effectuée sur la pratique de l’airsoft.

Elle s’est donc elle-même renseignée et lit des citations d’un site d’airsoft officiel : « leader », « chef », « progression », « debrief », « entraînement », sont des termes courant dans la pratique de l’airsoft.

LOIC

La juge rappelle que Loic apparaît dans l’enquête à partir de février 2020 avec M. et F., avec qui ils se sont retrouvés dans une maison abandonnée.

Elle demande à L. depuis quand l’association « La passion des amis » existe, L. répond que cette association a été très peu utilisée, peut-être un an ou deux. La juge précise que l’asso existe depuis 2018 et que le siège a été transféré à son adresse en 2019. L. explique que l’association est désormais clôturée et qu’elle a très peu été vivante, qu’il l’a créée par envie de passer du temps avec des gens en faisant des activités. 

La juge lui demande pourquoi il ne l’a pas lui-même présidé mais a demandé à une amie de le faire, L. répond qu’il a un problème avec tout ce qui est administratif, et qu’à cette époque il était concentré sur ses études. 

A la question de savoir si l’airsoft était pratiqué dans le cadre de cette association, L. répond ne pas se souvenir du moindre lien entre l’airsoft et l’association. Il n’y a pas de cotisations, ils ne sont que trois membres.

La présidente cite une personne interrogée affirmant le contraire et lui demande s’il aime pratiquer l’airsoft.

L. s’étonne de la réponse de cette personne, alors qu’elle n’a jamais elle-même pratiqué l’airsoft. Il répond également que lui-même ne l’avait jamais pratiqué à ce moment-là, et que l’association avait pour but de faire aussi du théatre et d’autres activités. 

C’est plus tard, sur proposition de F., qu’il a participé à l’achat d’une réplique d’airsoft (200 euros) pour le pratiquer.

La juge cite ses déclarations en GAV : « Nous nous sommes revus avec F., il voulait pratiquer l’airsoft ». L; récuse cette déclaration. Il explique que F. lui avait confié sa chienne et avait laissé son camion chez sa mère et qu’il était donc logique qu’ils se revoient à son retour du Rojava. L’idée de pratiquer l’airsoft est venue bien plus tard, au fil de conversations. Lors de sa GAV il n’a pas donné tous ces détails car face à la violence de la GAV il s’est renfermé sur lui-même.

La juge continue de citer ses auditions sur le fait « de copier, d’apprendre à manier des armes ». L. répond que pratiquer l’airsoft était une façon de passer du temps avec son ami. Et que c’était aussi lié avec sa tendance à être très anxieux, un peu « parano » s’agissant de l’état du monde et de la possibilité d’un cataclysme. 

A la question de pourquoi cette activité plutôt qu’une autre, L. répond être très ouvert à toutes sortes d’activités, même s’il n’est pas particulièrement attiré par les armes à la base.

La juge demande qui a trouvé la maison abandonnée, L. ne se rappelle pas mais ce n’est pas lui. Sur comment elle avait été repérée, L; explique que dans les milieux squats les gens ont l’oeil pour repérer les bâtiments abandonnés. 

Sur le fait qu’ils auraient été habillés en tenue « militaire », L. explique qu’il est très fréquent dans les milieux punks d’utiliser des vêtements militaires car ils sont peu chers et résistants. 

La juge demande ce qui se passe dans la maison, L. lui répond qu’ils la nettoient car il y a des bris de verre et qu’ils ont des chiens. 

La juge lui rappelle qu’il a fait part de son anxiété à pratiquer l’airsoft et lui demande ce qu’il en était s’agisssant de F. et de M. L. répond qu’ils souriaient, que tout le monde rigolait, que lui-même l’airsoft n’est pas trop son truc et qu’il « tirait un peu la tronche » lorsqu’on lui a présenté des répliques d’armes, mais qu’il souhaitait passer du temps avec ses amis. Il dit n’en avoir rien retiré de particulier. Il ne se souvient pas si les parties se sont pratiquées sur une seule journée ou deux jours consécutifs.

L. ne se rappelle pas avoir évoqué de « peur grandissante » ce jour-là lors de sa GAV, même s’il se souvient ne pas avoir tiré de fierté d’avoir « joué à la guerre » car cela peut être mal perçu dans les milieux « de gauche ». On a droit à un petit laïus de la présidente : « Vous faites ce que vous voulez, vous n’êtes pas obligé de raconter ce que vous faites à tout le monde ». Ah bon, on fait quoi depuis trois ans, là ? 

La juge l’interroge sur une « réunion » qui aurait eu lieu ce jour-là concernant l’airsoft et dont il a déclaré au JI ne pas se souvenir. L. doute fortement qu’ils aient abordé ce sujet, mais pense qu’ils ont peut-être évoqué le sujet en buvant des coups le soir. L. évoque le fait qu’à cette période avec F. ils partageaient des activités sportives comme la course à pied, les étirements, qui permettaient de créer une dynamique dans le corps.

S’agissant des notes de M. mentionnant les termes « trouver un terrain en Arriège », « pseudos », « Tekmil ».

L. répond qu’il ne sait pas ce qui se trouve dans ces notes mais qu’il se souvient que dans les conversations du soir, lorsqu’ils buvaient des coups ensemble, l’acquisition d’un terrain en Arriège a pu être évoquée, car de nombreux.ses habitant.es de Toulouse cherchent un terrain en Arriège. Pour le reste, cela ne lui évoque rien.

Assesseuse de droite : 

Elle lui demande si le document « création milice » lui rappelle quelque chose. L. dit se rappeler d’une brochure sur ce thème ayant circulé, comme des dizaines d’autres brochures. 

Procureure :

La proc lui demande pourquoi il a utilisé Mme F. comme prête-nom. L. lui répond qu’il n’aime pas s’occuper d’administratif et que cela lui permettait aussi de passer du temps avec elle.

Elle enchaîne en lui demandant pourquoi les documents concernant l’asso se trouvent sur l’ordinateur de F. et pas sur le sien, ce à quoi L. répond qu’il lui a demandé un coup de main administratif, pour ne pas avoir à le faire.

Elle tente de le piéger sur la contradiction entre son affirmation de ne pas aimer pratiquer l’airsoft et le fait de créer une association à cet effet. L. répond que l’association avait pour but de faire des activités et que pour cela il a fait appel à deux ami.es cher.es à son coeur pour l’épauler.

Elle revient sur ses déclarations en GAV. Il explique que dans le contexte de la GAV, tout son monde s’écroule, qu’il ne comprend pas être arrêté pour une après-midi d’airsoft et les activités anodines de ses ami.es. Qu’il y voit des actes anodins et qu’il se retrouve en GAV avec une arrestation terroriste, du coup, oui, ce qu’il dit est décousu, il n’y comprend plus rien.

Elle lui rappelle qu’il a refusé de répondre aux questions autour d’un éventuel « projet » pour ne pas trahir ses amitiés.

L. lui répond que F. a divers projets et qu’il est une personne pleine d’en-train, qui déborde d’énergie, parfois trop, qu’il est un bout-en-train, qu’il aime faire la fête.

Elle cite « prendre les armes là où elles sont », « s’en prendre aux keufs ». L. lui rétorque que des propos comme ça il en a entendu souvent, l’idée du « grand soir », de « prendre les armes », ce ne sont que des mots. Dans notre milieu il est courant de dire que les forces de l’ordre représentent le système et qu’il faut abolir le système.

La proc insiste sur la proposition de F. de fabriquer des explosifs, L. lui rétorque que F. ne lui parle jamais du Rojava et qu’il ne voit pas comment il aurait pu lui parler d’explosifs du Rojava.

La proc poursuit en lui parlant de la « clandestinité » de leurs moyens de communication, L. répond qu’ils utilisent Signal et éteignent leurs téléphones, comme dans d’autres endroits.

Elle s’interroge sur les raisons de cette « clandestinité », l’airsoft étant légal. L. répond qu’ils jouent à se faire peur et donc créent une ambiance autour de ça.

Puis elle aborde les notes de M., « protocole de recrutement », « PNL », et lui demande si cette mention « PNL » se réfère à lui. L. lui explique que depuis fin 2019 il parle de PNL à tout bout de champs et que c’est sûrement pour cela. Elle cite les termes « blessé ou tué », cela ne lui dit rien.

S’agissant du document « Création milice » retrouvé chez F. et M., la proc demande s’il y a des échos avec les notes de M. « serment », « recruter », L. répond qu’il n’en sait rien. 

La proc l’interroge sur le fait qu’il est question d’entrainement aux premiers secours et au fait de poser un garrot. L. répond que dans leur pratique de l’airsoft, ils ont évoqué l’exemple d’une personne à terre et de comment faire pour la tirer et lui faire un garrot, mais que c’était très sommaire.

Sur le paintball, L. dit ne pas faire de différence avec l’airsoft. 

Avocat.es :

Me Simon 

Me Simon demande à L. combien de temps il est resté dans l’escalier(partie d’airsoft), il répond qu’il a dû s’ennuyer.

Puis elle lui demande s’il connaît M., il répond que oui, c’est un ami de F., ils se sont vus 2-3 fois. 

A la question de savoir si pour M. les parties d’airsoft étaient liées à son intention de se rendre au Rojava, il répond que c’est possible que cela ait été central pour lui. 

Me Tort

L’avocate va mener un interrogatoire vigoureux, en bousculant L., sur ses conditions de GAV. Elle commence par le questionner sur son arrestation et son arrivée à Levallois Perret, dans les locaux de la DGSI. 

Il raconte : alors qu’il était dehors et marchait vers son camion, il apperçoit plusieurs véhicules. Deux individus en sortent cagoulés, le mettent en joue, lui demandent son identité, lui passent les menottes, et l’emmenent à l’intérieur de la maison de sa mère, qui accueillent aussi des locataires, puis lui donnent les raisons de son arrestation. Il ne comprend pas. Il se dit que c’est absurde. Il est emmené en train avec une camisole et un sac sur la tête, puis sort du train, la camisole est ôtée, on lui remet les menottes, ses douleurs aux cervicales reprennent, puis il est mis en cellule, totalement déboussolé. Il aperçoit des chaussures devant les autres cellules. 

On lui parle du Rojava, il fait le lien avec F. 

L’avocate lui demande d’être plus précis, elle le cite sur un PV de sa première audition : « il ne faut pas faire miroiter des choses aux gens ». Il explique qu’au long du trajet les policiers lui ont fait miroiter que s’il balançait il pourrait sortir sans charge. 

Lors de cette première audition, on lui pose des questions politiques, sur ses convictions, il  avait peur que cela puisse arriver un jour, il le vit comme un cauchemar. Dans les PV il apparaît qu’il parle lui-même de ses fréquentations, l’avocate lui demande si c’est à cause de propos tenus en « off » par les agents.

L. explique qu’il est angoissé depuis 32 ans, qu’il se sait jugé sur ses opinions, qu’il vit son cauchemar. M° Tort lui demande combien il y avait d’agents pour l’interroger et si c’était toujours les mêmes ; oui, toujours la même agente principale. Est-ce que lui avait toujours le même avocat ? ; non, il a eu 4 avocat-e-s différents lors de sa garde à vue. Ca met pas vraiment en confiance… 

Il parle de son impossibilité à dormir, dans ces conditions, et qu’il demande à voir un médecin. Il en voit un effectivement, qui lui préscrit du Tramadol 100 mg, en deux prises. M° Tort va éclairer cette prescription : le Tramadol est un antalgique puissant, de la famille des opioïdes. Absolument pas nécessaire pour des troubles du sommeil, et surtout à ne jamais prescrire en première intention. Le Tramadol doit être prescrit uniquement si des antalgiques ont déjà été administrés sans succès. Elle fait la longue liste des effets secondaires : vertiges, difficultés à parler, propos incohérents, et lui demande s’il était en état de répondre correctement aux questions de la DGSI, ce à quoi L. répond que non. On l’a assomé avec ce médoc ! ; entre deux interrogatoires. M° Tort dit que les flics ont « attendri la viande » avant de la cuisiner. 

L’avocate lui demande à quoi il répond et s’il est influencé par ce qui lui est dit en « off ». L. répond qu’en aucun cas ses amis, dont F., ne peuvent vouloir s’en prendre par la violence à des êtres humains ni même à des institutions au nom de la démocratie. Avec beaucoup d’émotion et de fatigue, il dit que c’est inconcevable quand on est « anarchiste » de vouloir s’en prendre aux personnes. Qu’on est « tous frères ». On voit beaucoup de regards émus dans la salle à ce moment là.

Sur la question de son droit au silence l’avocate lui rappelle que c’est son droit le plus strict, et lui demande pourquoi il  a parlé par la suite. L. répond qu’il y a énormément de pression et d’insistance, qu’on lui « retourne le cerveau ». Me Tort note que ses droits ont été bafoués en GAV, L. répond qu’à ce moment-là pour lui c’est très confus, que tout se mélange,  et qu’il en vient même à douter de ce qu’il croit, de son passé, d’informations qui ne viennent pas de lui. 

Me Tort rappelle que lors de l’audition suivante on demande à L. de charger F. au maximum. L. en vient à douter à force qu’on lui parle de guerre, d’explosifs, et en vient à croire ce qu’on lui dit. Il est paumé. 

Lors de la dernière audition, alors qu’il va être déféré devant le juge, il reparle d’airsoft comme d’un jeu et se dit perdu. L. répond qu’il est impossible d’émettre des réponses sincères dans ces conditions, que plus on le met sous pression et pire c’est, et qu’il considère que les valeurs humaines sont alors bafouées. 

Me Tort souligne le fait que bien qu’étant un grand angoissé, il est friand de films « catastrophe » et de jeux de rôle. Ce à quoi L. répond qu’en effet, il aime se faire peur et « sortir la peur de lui ». 

L’avocate rappelle que l’airsoft n’est pas une pratique confidentielle, 45000 personnes le pratiquent. Ont-ils pour autant l’intention de créer des milices ? L. répond que non, il pense que c’est un exutoire, et que dans son cas c’est une façon de se confronter à la peur pour s’en libérer. 

S’agissant des notes de M., dans lesquelles il ne se reconnaît pas, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’était pas présent. 

Sur la date du 25 mai, l’avocate rapelle qu’il n’y a pas de moyen de savoir s’il y avait plus de trois personnes, car il n’y a pas eu de surveillance de la DGSI ce jour-là. Uniquement bornage téléphones et notes de M. L. répond qu’il n’en a aucune idée. 

La juge revient brièvement sur les scellés effectués dans son camion et en profite pour glisser une remarque sur le fait que son camion était particulièrement bien rangé. ??  (quel rapport wsh)

BASTIEN

La présidente demande à B. quel était le but de vouloir obtenir son permis de chasse. B. répond qu’il avait pour projet d’acheter un terrain avec W., d’y faire un potager et d’y vivre en auto-suffisance. Qu’en rencontrant des personnes qui vivent à la campagne, éleveurs, agriculteurs, il lui a paru utile d’avoir le permis de chasse s’il vivait en montagne ou autre, pour effectuer des tirs d’effarouchement par exemple. Au moment de passer son permis il y a pris goût, lors des différentes épreuves pratiques (sangliers en bois, ball trap…). 

A Parcoul, B. se rend au stand de tir, l’envie vient de lui et pas uniquement de W. Il s’y rend une à deux fois par semaine, il fait des rencontres au sein du club, cela lui plaît. Des personnes leur font essayer des armes historiques, cela lui plaît et c’est notamment pour ça qu’il a acquis un revolver à poudre noire. 

La juge l’interroge sur l’achat d’un fusil à pompe en mai 2020 et lui demande si c’est pour lui-même. 

B. répond qu’au départ ce n’est pas du tout l’arme qu’il avait prévu d’acheter, qu’il avait vu une autre arme qui lui plaisait mais qu’en tombant sur celle-ci il l’a achetée. N’ayant pas le budget, F. lui a prêté l’argent nécessaire à l’achat, dans l’idée ou de lui revendre ultérieurement, une fois son permis de chasse passé, ou de la conserver. 

La juge fait remarquer que c’est une grosse somme d’argent pour un emprunt (400 euros) pour acheter un tel objet. B. lui rétorque que F. lui a prêté l’argent et que c’est son choix d’avoir acheté un fusil avec.

La juge rappelle que les personnes que B. et W. croisaient au stand de tir ont toutes témoigné qu’ils étaient des personnes sérieuses et passionnées par le tir sportif, et qu’ils étaient très attachés aux règles de sécurité. Puis elle demande ce qu’il en était du stand de tir à Parcoul. B. répond qu’à Parcoul il n’a pas souvenir d’avoir prêté son arme, qu’ils avaient fabriqué un stand de tir artisanal et qu’ils appliquaient toutes les règles de sécurité. 

Puis la juge lui demande à quel moment les répliques d’airsoft ont été montrées, B. répond qu’il ne se souvient pas de maniements de répliques d’armes avant la partie d’airsoft. Il y a eu plusieurs parties, lors de la même après-midi. 

Puis la juge lui demande de décrire comment ces parties se sont déroulées. 

B. dit que c’est allé assez vite, iels ont décidé de faire un jeu, se sont mis.es à marcher en colonne, prenant le « lead » à tour de rôle, et ont traversé la maison. Il explique que « prendre le lead »  c’est donner les instructions : « ouvre la porte », « nettoie cette pièce », etc. Iels ont beaucoup ri quand H. a pris le lead car elle donnait des ordres sur un ton très militaire mais que ce n’était pas du tout sérieux, c’était un jeu.

La juge lui demande ensuite s’il a eu l’occasion d’échanger avec F. sur certaines choses de son passé, B. répond que non. Puis il explique qu’il est un fervent adepte des jeux de rôle, qu’au bout de deux heures ça s’est essoufflé et qu’iels sont passé.es à autre chose. Il n’y a pas eu d’autres propositions de nouvelles parties par la suite.

A la question de savoir ce qu’il en avait tiré, B. répond qu’iels ont bien rigolé, et rien d’autre.

La juge demande s’iels avaient toustes les six une réplique d’arme, B. répond que oui, 4 appartenant à F. et 2 étant des jouets de fête foraine appartenant à W, qu’il avait dans sa chambre. 

La juge revient sur les déclarations de So en GAV, B. répond qu’il a désormais tendance à se méfier de ce qu’ont dit les un.es et les autres en GAV. 

Elle lui demande si L. lui a déjà parlé de parties d’airsoft, B. lui répond qu’il serait très étonné de la part de L. qui est très anti-armes et antimilitariste, mais que pour un rôliste (adepte des jeux de rôle), cela l’étonne moins. 

Sur la place qu’a pris cette partie d’airsoft lors de leur séjour, B. lui cite une anecdote : « j’ai passé plus de temps à faire de la veganaise (mayonnaise vegan) que des parties d’airsoft. Elle n’a jamais voulu monter » (rires).

La présidente revient sur la présence d’une arme à canon scié que B. avait aperçu à Parcoul et lui demande s’il était étonné, il lui rétorque que ce n’est pas quelque chose de rare, beaucoup de gens à la campagne en possèdent. Elle cite ses PV de GAV lors desquels il semble connaitre toutes les répliques d’airsoft. B. répond qu’on a dû lui montrer des photos à ce moment-là car il ne pouvait pas se rappeler d’autant de détails.

La juge lui dit qu’en GAV il semblait émettre un doute sur le fait que F. ait été sniper. B. lui répond qu’il avait le sentiment que F. était une « grande gueule et qu’il avait des doutes sur la véracité de ses propos. Cela s’est passé il y a plus de trois ans, il ne se rappelle pas tous les détails. Par ailleurs, tout le monde buvait beaucoup d’alcool. 

La juge revient sur le fusil acheté avec l’argent de F. Lorsqu’il a dit « je le laisse galérer », c’est parce qu’il n’avait pas encore pris sa décision sur le fait qu’il le garderait ou pas. 

Elle lit des citations de GAV, B. lui répète plusieurs fois qu’il n’a aucun souvenir de si F. a tiré avec sa carabine et ne se rappelle pas non plus de ce qu’il en a dit en GAV. La juge revient sur une phrase prononcée en GAV faisant le lien entre airsoft et ZAD, B. dit n’avoir aucune idée de pourquoi il a tenu ces propos à l’époque.

La juge revient sur une expression qu’il aurait prononcé, « boxe ta face », B. répond qu’il faisait référence à un atelier « boxe » qui a duré 20 minutes, et à l’issue duquel F. s’est retourné le doigt et a terminé à l’hôpital.

Assesseuse de droite 

Elle revient sur une phrase prononcée en GAV où B. parle de mauvaises intentions. B. avoue avoir cherché à se décharger et s’être désolidariser de F. A la lecture de la question de la DGSI, B. lui fait remarquer que la question ne devait pas être celle-ci ou alors qu’il manque le contexte et le « off ». 

S’agissant de la conversation entre F. et C., B. réaffirme qu’il s’agissait bien d’un jeu, et non d’un exercice ou d’un « entraînement ». 

Elle lui dit qu’il aurait évoqué deux après-midi au cours des trois semaines, ce à quoi B. répond que c’est faux, F. est resté un mois et les parties d’airsoft n’ont eu lieu que sur un après-midi. 

Procureur

Lorsqu’il prend la parole le procureur décrit les répliques d’airsoft comme des répliques « d’armes lourdes », ce à quoi B. répond que c’est le principe même de l’airsoft de reproduire la réalité. 

Le proc demande à quelle fréquence iels ont utilisé le stand de tir artisanal à Parcoul. B. répond qu’iels ont dû le faire une fois, avec trois balles tirées. Le proc lui dit qu’en GAV il a parlé de 3 ou 4 fois. 

Puis le proc lui demande s’il voit des ressemblances avec les descriptions de L. s’agissant de la pratique de l’airsoft. B. répond que oui, le fait d’ouvrir les portes, avancer…

Puis le proc cite des propos « ce monde part en vrille totale » prononcés suite au visionnage d’une vidéo d’extrême-droite et insinue que c’est cela qui l’aurait incité à s’armer. B. répond que c’est totalement faux, qu’il a dans un premier temps passé son permis de chasse, puis acquis une carabine, et que c’est plus tard qu’ils ont vu cette vidéo d’extrême-droite mais que ce n’est pas du tout l’élément déclencheur. 

Le proc lui demande pourquoi le fusil à pompe semi-automatique à plusieurs coups l’a intéressé à ce moment-là, et est-ce que c’était au sortir du confinement. B. répond que oui, le proc lui rétorque alors qu’il avait déjà passé commande à ce moment-là, ce à quoi B. répond qu’il doit avoir un problème avec la chronologie. 

Le proc fait remarquer que devant le JI il avait émis les mêmes doutes quant aux intentions de F. B. répond qu’il se sentait piégé par les propos qu’il avait prononcés à la DGSI.

Le proc lui demande alors pourquoi on devrait le croire aujourd’hui. B. répond que désormais il n’est plus dans les mêmes conditions, que depuis il a réfléchi, et qu’il est sincère et réfléchi.

Avocat.es 

Me Bouillon 

Elle lui rappelle qu’en mai 2020 il emprunte 400 euros à F. S’il avait vraiment des doutes sur ses intentions, ne se serait-il pas empressé de le rembourser ? B. répond que si, car dans les mois qui ont suivi il a travaillé et aurait pu le rembourser s’il avait eu un doute.

Me Bonaglia

Pour l’anecdote, il explique que le stand de tir à Parcoul a été achevé par une mauvaise manipulation de drone. 🙂

Il revient sur la vidéo d’extrême-droite vue sur Youtube et évoquée en amont par B., et sur l’issue de la plainte pour avoir tiré sur un mannequin d’un membre de la France insoumise, classée sans suite par le procureur de la République.

Il lui demande s’il connaissait F. au moment de passer son permis de chasse, lorsqu’il a acquis sa carabine et commencé à se rendre au stand de tir, ce à quoi B. répond que non, il ne le connaissait absolument pas. 

Me Bonaglia revient sur la fin de la discussion dans le camion (largement citée par la juge et le procureur), lors de laquelle les trois comparses proposent de se prostituer pour gagner l’argent nécessaire à l’acquisition de B. 

Puis il pose la question de savoir pourquoi lors de la partie d’airsoft iels n’avaient pas fait deux équipes pour faire une équipe contre l’autre. B. répond qu’iels n’avaient pas d’équipement de sécurité et que c’est probablement pour cette raison qu’iels n’avaient pas fait deux équipes.