JEUDI 12 OCTOBRE

12/10

L’audience aujourd’hui porte sur la questions des « explosifs » (aussi appelés « pétards »).

WILLIAM

La présidente resitue le contexte en précisant que W. est présent à Parcoul, et cite les personnes présentes à ce moment-là, en avril 2020. Rapidement, elle pose une question qui démontre un parti pris, celui de l’instruction : essayer de mettre à jour un lien entre F et les essais d’explosifs : « Est-ce que vous estimez qu’il y a un lien entre l’arrivée de F. et le début des essais, comme vous l’avez dit en garde à vue ? »

W. précise que non, il n’y a pas de lien avec F. mais que c’est plutôt lié à la vidéo du bateau (un petit bateau en bois brûle sur la rivière avec de la musique style symphonie. Des fusées et pétards partent dans les flammes, très drôle et très amateur :), le tout avec des rires, des chiens qui passent et un commentaire de la personne qui filme « c’est naaaaaaaaaze » ) lien pour voir la vidéo ICI. Il ne se rappelait plus l’élément déclencheur du bateau, cela lui est revenu plus tard. C’est le confinement, il n’y a plus de pétards pour finir de couler le bateau de manière plus glorieuse et iels décident de fabriquer elleux-mêmes des pétards.

Il se saisit de la question de la présidente pour répondre sur les conditions de la garde à vue, et la valeur à accorder à ses paroles dans ce cadre. Il explique que les flics lui ont mis une grosse pression, en off, c’est à dire en coupant la vidéo, en lui disant que F. « était en train de faire de la merde » et qu’il fallait balancer un maximum contre lui pour s’en sortir. Ils ont des moyens de pression : W. dit qu’il manque de courage, qu’il veut voir son grand-père agonisant, qu’il veut voir son chien. Il revient sur la plupart de ses déclarations. Notamment à la question « Est-ce que F. est un leader charismatique ? ». A ce moment-là, il se rend compte que la DGSI veut la tête de F.

La juge oriente ensuite sur la préparation : qui apporte le matériel, qui est à l’initiative des recherches de recettes d’explosifs, qui a le savoir-faire, en orientant encore les suspicions vers F. W. rappelle qu’il s’agissait de faire des pétards, de manière ludique, que l’ambiance était bonne, que c’était sans malice, et plutôt dans une idée féstive suite à la vidéo du bateau. La durée approximative des essais a duré 2-3 après-midi. Que tout le monde allait et venait sur ces tentatives, qu’ils tâtonnaient, ne savaient pas faire, qu’ils ont cherché et trouvé sur internet.

La juge lui fait remarquer que ça aurait été préférable de le dire avant, pendant l’instruction. Elle fait une remarque sur le fait qu’elle comprend que les conditions ne sont pas les mêmes pendant l’instruction, et que bon, « Mieux vaut tard que jamais… » sympa !

Le garage sur le terrain contenait des produits, notamment de l’acétone et de l’acide. Pour ce qui est de la recette nitrate sucre, W. en a déjà entendu parler dans le monde paysan, il n’est pas surpris. 

Elle cite les auditions et lui demande pourquoi étant le seul intéressé par la pyrotechnie (évocation d’une possible formation qui ne s’est jamais faite), il est aussi le seul à n’avoir pas assisté à l’essai final :

« A la base, on confectionnait des pétards, il y a eu des échecs répétés. Quand ça a réussi j’étais avec les chiens, le gros boom, j’ai cru qu’ils étaient tous morts et ils sont revenus tous choqués, ça m’a surpris, le bruit était intense ». Il explique qu’il commençait à se lasser des essais ratés et étant « mono-maniaque de la sécurité », c’était un peu trop « bidouille » à son goût. Il s’en est désintéressé et a préféré aller s’occuper des chiens à ce moment-là. Si cela avait été une question de danger, il n’aurait jamais laissé ses ami.es prendre le moindre risque et les en aurait dissuadé.es.

« Iels rentrent comme des gamins qui ont fait une bêtise et qui se sont faits peur ». 

La présidente l’emmène sur le fait qu’iels n’aient plus discuté du sujet et cherche à savoir s’il y a eu un accord entre elleux pour ne plus en parler. W. explique qu’un accord tacite de passer à autre chose et de ne plus reparler de cet épisode a semblé alors évident à tous.tes.

La juge l’interroge sur les étapes de la recette, W. lui répond que 4 ans plus tard il ne se rappelle plus, ni des circonstances de recherche de la recette, ni des étapes de fabrication. Il se rappelle juste qu’une douille récupérée au stand de tir leur a servi de récipient pour y mettre le résultat final (quantité approximative 2g). 

La juge évoque le fait qu’il voulait faire une formation d’artificier mais qu’il avait évoqué avec S.P. des difficultés administratives.

La présidente relit les déclarations de S.P. en GAV sur la question de l’allumage des cristaux dans des douilles et sur le fait d’avoir le temps de s’éloigner, réflexion à laquelle W. participe. Mme P. dit avoir agi par « effet de groupe ».

La présidente demande si tout le monde se sentait obligé de participer aux activités, W répond que pas du tout, ça allait et venait.

La présidente utilise les déclarations de S.P. pour demander si c’était lourd que F parle régulièrement du Rojava et elle oriente ses questions sur le lien entre sa présence sur une zone de guerre et la fabrication d’explosifs.

W. répond qu’il n’y avait aucun rapport entre les deux, et qu’il n’a jamais posé de questions sur l’expérience de F. au Rojava par pudeur.

Sur les propos de H. en GAV, la présidente cite « la cérémonie du bateau » et cherche à savoir pourquoi l’histoire du bateau n’est pas arrivée plus tôt.

Assesseuse 1 : 

L’assesseuse cherche à savoir comment étaient fêtés les évènements au cours de ce mois et cherche une raison précise à cet épisode du bateau.

Puis elle lui demande ce qui lui a fait peur, W. répond que c’était des bidouillages à l’arrache avec des recettes que personne ne maîtrisait.

Elle lui demande s’il a cherché à trouver des recettes de pétards auprès d’amis pour son projet professionnel, W. répond que non, pas du tout. Au passage, elle se trompe dans sa question et commence par « Vous aviez un artificier avec vous… » puis elle se reprend et se corrige. Elle mélange tout.

Elle lui demande s’il connaissait le TATP, W. répond qu’il ne connait pas le mot TATP et qu’il ne se souvient plus des mots-clés utilisés lors de la recherche sur internet.

Procureure : 

Elle lui rappelle que ce n’était pas sa première garde à vue et qu’il avait été assisté d’un avocat à chaque audition. W répond que ce n’était pas le meilleur.

Elle le décrit comme étant quelqu’un qui paraît très soumis en GAV et cite ses réponses. W répond qu’il était très inquiet pour son chien, que le flic lui en donnait des nouvelles, qu’il était perdu.

La proc cite ses réponses aux auditions devant le JI, à qui W. avait répondu qu’il avait donné noms et adresses et qu’il souhaitait sortir de prison.

Puis elle lui rappelle ses propos sur F. et lui demande qui il est pour lui, « un leader charismatique », s’il a « l’âme d’un leader ». W. répond qu’il s’est déjà exprimé là-dessus, qu’il regrette ses propos qui ont été prononcés parce que c’est ce que le JI avait envie d’entendre et qu’il est aujourd’hui désolé de ce qu’il a dit.

Sur la fabrication d’explosifs, la proc tente de souligner des contradictions entre ses propos en GAV et ses propos actuels sur le caractère festif de ces essais. Elle tente aussi de le piéger sur les propos qu’il aurait tenu sur F. qui aurait été présenté comme le « leader », celui qui donne les instructions. W. rétorque que sur les écoutes on entend clairement que c’est collectif et que tout le monde tâtonne, mais qu’en GAV il cherchait à se dissocier de F. par crainte d’aller en prison.

La proc lui demande d’où venaient les mèches. W. répond que ce sont les siennes, il en avait aussi utilisé pour le bateau.

Elle lui demande alors son degré de connaissance au sujet de l’utilisation d’une spatule en bois pour mélanger des produits chimiques (elle cite une sonorisation), il lui répond que c’était juste de la déduction, de la logique.

La procureur lui ressort encore une fois ses antécédents judiciaires en faisant un parallèle et en mettant en perspective sa déclaration de rester dans la légalité et de ne plus manipuler de produits dangereux. Elle parle d’explosifs, W. lui répond : « J’ai toujours appelé cela des pétards » et lui rappelle, à sa demande,  qu’il n’y avait pas d’explosifs lors de sa condamnation en 2010.

Elle le reprend alors « des explosifs, les mots ont un sens ! », elle en profite pour lui demander s’il est conscient que la manipulation d’explosifs en droit commun peut mener à une peine de 10 ans. 

L’avocate prend la parole : « W. a toujours utilisé le terme pétards ! ».

Questions de l’avocate (Bonvarlet): 

Elle lui demande si c’est sa première GAV anti-terro et s’il en a été informé dès le début.

– « Oui, avec un fusil d’assaut sur la tempe, c’est la panique à tous les étages, je suis terrorisé ».

W explique que son monde s’écroule.

Puis l’avocate le questionne sur le moment « off » en GAV. W. explique que les caméras sont éteintes, que l’inspecteur lui avait dit que F. était « sur le point de faire de la merde », et que son avocat commis d’office lui conseille de balancer le plus possible car il risque 15 ans de prison.

– « A ce moment-là, on vous ment. Quelle valeur ont des déclarations faites suite à une manipulation ? » 

– « Aucune ».

L’avocate revient sur l’épisode du bateau. Elle revient aussi sur les points de vocabulaire entre le terme « pétard » et « explosif ». 

Elle lui demande où se passent les essais, lorsqu’ils jouent avec un briquet, et s’ils ont vraiment conscience du danger, W. répond qu’ils ont lieu dans le camion de F. et dans le jardin à proximité, et qu’ils n’ont pas vraiment conscience du danger.

L’avocate rappelle que l’expert prétend qu’il faut une connaissance incroyable pour la fabrication de tels produits, et qu’il y a 4 chances sur 5 de faire brûler le mélange avant l’étape finale. Ce qui est arrivé.

Elle revient sur l’utilisation de la spatule en bois préconisé par W. alors que F. proposait en métal. Cela prouve bien que F. n’est pas spécialiste.

Questions Me Kempf : 

– « Définissez l’association de malfaiteurs terroriste »

– « Si peut-être on a l’idée de faire quelque chose on se fait arrêter ».

– « Ca c’est une définition critique. Quelle est la définition juridique ? »

– « Je ne sais pas donner de définition de l’AMT ».

– « C’est important de savoir pourquoi on est arrêté, mais même moi en droit je ne sais pas ce que ça veut dire… »

Puis il lui demande de revenir sur les conditions de son transport à Levallois-Perret. 

W. décrit : « de Plestin à Rennes, on m’a mis une camisole et une cagoule sur la tête. En train de Rennes à Paris pareil, camisole et masque de ski opaque, les gens étaient un peu flippés… »

Sur ces conditions de GAV: « Toute petite cellule, hyper glauque, toilettes, caméra, température en dessous de 19°C,  pas de lumière du jour, pas d’heure. Les lumières s’éteignent dans le couloir quand il fait nuit. Juste un jus d’orange au petit dej. On m’a donné un avocat commis d’office mais j’étais dans la paranoïa, je ne savais pas si je pouvais lui parler. Le fait d’être en GAV à la DGSI accusé de terrorisme m’a plongé dans un délire psychologique ».

– « Pourquoi avez-vous refusé de signer vos 4 premières dépositions ? »

– « Pas d’explication rationnelle »

– « Pourriez-vous définir ce qu’est une commission rogatoire ? « 

– « Je ne sais pas »

– « Comprenez-vous les faits reprochés ? Vous souvenez-vous de votre réponse ? « 

– « Non »

Kempf cite la réponse : « Je comprends le sens mais pas en quoi ça me concerne ». 

Au sujet de la pause technique lors de l’interrogatoire : « La DGSI m’a menti en me disant que F. allait « faire de la merde ». Kempf souligne que cela remet potentiellement en cause la légitimité de l’officier de police.

– « C’est ma parole contre la leur vu que c’était en off »

– « Le policier avait des nouvelles du chien, ce n’est pourtant pas mentionné dans les PV. »

– « Non, c’était dans les couloirs, avant de commencer. »

– « Pas de cigarettes alors que vous en demandiez ? « 

– « Non »

– « Vous êtes dépendant. Comment avez-vous réagi au sevrage ? « 

– « J’étais très stressé »

– « Le policier vous a-t-il tutoyé ? »

– « Tout du long. »

– « Pourtant le code de déontologie l’oblige à vous vouvoyer ».

La présidente intervient : 

– « Cela m’interpelle que vous doutiez de l’avocate commise d’office ».

– « J’étais en parano, dans un environnement que je ne connaissais pas, je ne savais pas en qui je pouvais avoir confiance ».

BASTIEN

La juge rapelle que B. a été placé en GAV avec les autres, qu’il a assez rapidement pris le parti de  s’exprimer sur un certain nombre de points, mais qu’il y a des moments de silence sous le coup de l’émotion. Elle précise aussi qu’il était sans avocat tout du long de la GAV, et qu’il a beaucoup pleuré.

B. dit qu’il était paniqué, qu’il ne comprenait pas ce qu’il faisait là : « J’ai beaucoup pleuré en GAV. J’ai demandé à voir un médecin pour mon traitement, que je n’aurais jamais au cours de la GAV. »

La juge rappelle que B. s’est expliqué sur les armes en sa possession, les gens qu’il fréquentait et son séjour à Parcoul.

La juge rappelle que B. a passé une longue période dans ce moulin, qu’il s’y installe avec plusieurs personnes. Elle lui demande par rapport à F., il n’était pas prévu dans ce projet, qui l’avait invité ? Il répond que c’est W., de son côté il ne le connaissait pas, il le rencontre à Parcoul pendant le confinement.

La juge lui demande de resituer les essais d’explosifs. Il se rappelle que c’est après le bateau et après l’arrivée de F.et C.

La juge revient sur ses auditions à la DGSI. Il rappelle que beaucoup de réponses ne viennent pas de lui, il est tétanisé. Il rappelle que tout était concentré sur F., on lui parlait uniquement de sa dangerosité. Il est alors téléguidé dans ses réponses par ce que lui disent les OPJ en face de lui. « En off on m’a dit que F. avait été arrêté le doigt sur la gâchette. Je voulais me détacher de lui et sauver ma peau. »

La juge l’interroge sur les feux d’artifice, si ça le passionne. B. lui répond que ce n’est pas sa passion mais qu’il aimait bien les pétards, de manière ludique.

Elle l’interroge alors sur les méthodes utilisées, la recette pour les essais qui concernent la « pâte marron », demande dans quel ordre les choses ont été testées.

B. lui répond qu’il y a eu plusieurs essais, il ne se rappelle plus très bien, c’était il y a 3 ans. Tout le monde était libre, allait et venait, peut-être qu’il y avait aussi en parallèle le séchage pour les cristaux. Pour la recette du détonateur, il y a eu des recherches collectives mais il ne se rappelle pas de plus. « Pour nous, on faisait des pétards, à côté de nos habitations, avec les chiens autour. On avait pas conscience de faire quelque chose de dangereux. » Il rappelle qu’iels cherchaient à s’occuper, à tuer l’ennui, pendant le confinement.

La juge s’interroge sur la provenance des pétards du bateau, B. lui répond que c’était des vieux pétards qui traînaient. Elle insiste alors sur le lien entre le bateau et la fabrication qui a suivi. B. n’a pas de souvenir d’une conversation qui a mené à ça, mais reste persuadé qu’il y a un lien direct. Il rappelle qu’iels ont passés un mois à faire des activités dans tous les sens, iels ont déliré, se sont bien marré.es et ont réparé plein de trucs.

Elle revient ensuite sur ses déclarations en GAV (toujours), au sujet « d’une grosse détonation, j’étais pas bien du tout, j’ai fait semblant d’être content, F. fanfaronnait ». Il répond qu’il a été impressionné par le bruit et l’écho dans la vallée, il pense que tout le monde a en fait donné le change. Il relativise aujourd’hui en disant qu’il n’y avait pas de cratère ni de dégâts à l’endroit de l’explosion. « Sur le chemin du retour on s’est dit que c’était trop dangereux, qu’on referait jamais ça ».

Elle lui demande alors pourquoi personne n’a sonné la tirette d’alarme? Il lui répond que c’était du jeu et de l’insouciance.

La juge lui parle alors des scellés de son camion et des billes retrouvées. Il explique alors que c’est pour le tir à la poudre noire. Il a le carnet avec la facture et le permis nécessaire. Il ne comprend pas pourquoi cela a été envoyé en expertise explosif et non à l’expert armes. Cela concerne une arme tout à fait légale.

Comme un leitmotiv, la juge revient toujours à ses déclarations en GAV, alors qu’il n’a de cesse de dire de ne pas les prendre en compte. Il redit que toutes les questions portaient sur F. Il a mis beaucoup de temps à remettre en place ses idées, même après la GAV. Quand les questions sont posées de manière très orientée, avec le stress de la GAV, c’est dur d’être cohérent dans ses réponses.

« Je voulais me dissocier de cette personne, c’était un réflexe pour me protéger, de l’autodéfense ».

Assesseuse blonde 

Elle lui demande si il est d’accord avec Will sur le fait que la DGSI a chargé F. Bastien acquiesce.

« Je le connais sur seulement un mois passé ensemble. Je l’ai chargé en GAV et je ne pense pas ce que j’ai dit. Par exemple je leur ai dit que je ne lui confierais jamais ma chienne. C’est complètement faux, je lui confierais ma chienne les yeux fermés ».

A « Donc vous le connaissez ? « 

B « En 1 mois je ne pense pas qu’on puisse connaître quelqu’un ».

A « Donc vous avez dit des mensonges à la DGSI ? »

B « J’ai dit ce qu’ils voulaient entendre ».

A « Ce qui était vrai ou non ? « 

B « Je n’en sais rien ».

A « Merci ».

Procureurs

B. refuse de répondre aux questions, il fait une déclaration spontanée à la juge pour l’en avertir.

La proc se lance alors dans une salve de questions sans réponses :

Quelques extraits : « mauvaises personnes », « martyr », « connaissance explosif et sniper », « essai près d’une falaise »…

Le procureur de son côté lui demande :

« Vous vous évertuez à dire que vous vouliez fabriquer un pétard, je viens de faire la recherche sur le net et le résultat c’est de la poudre noire, mèche et rien d’autre. »

B. reste face à la juge, imperturbable.

Avocats 

Son avocat lui demande de revenir sur sa GAV avec ses mots :

« Je me suis fait arrêter à 6h du mat, ils m’ont plaqué contre le mur, fusil d’assaut sur la tempe. Je suis resté en caleçon, tout le temps de la perquisition de mon camion, dehors, en décembre. On m’a camisolé, on m’a emmené à l’hopital pour vérifier mon état puis de nouveu camisole et direction la gare. J’étais avec L. Ils nous ont changés de wagon parce que les autres usagers étaient terrifiés.

L. m’a demandé si ça allait, j’ai rien répondu, j’étais tétanisé. On nous a emmené ensuite à Levallois-Perret avec une cagoule sur la tête. J’ai subi la première audition puis on m’a donné mon premier repas dans la nuit (à jeun depuis plus de 24h, sans boire non plus). A la fin de ma 3ème audition, j’ai fait un gros malaise, j’avais des douleurs très intenses dans les bras. Les pompiers interviennent, ils parlent du syndrome de l’accoucheur, on me donne de l’Atarax, c’est un anxiolytique, je suis complètement déboussolé et défoncé. L’audition reprend. Dans la cellule il fait froid, il y a une lumière artificielle constante, on ne sait pas quel jour on est. Je ne me rappelle plus toutes les questions qui me sont posées, c’est très orienté sur les idées politiques. C’est le même OPJ tout au long de mes auditions, il me dit qu’il m’écoute depuis 8 mois, qu’il me connait, il essaye même de reprendre notre humour à Will et moi. 

Devant le JI je n’ai pas changé de discours parce que je me sentais bloqué par mes propos tenus devant la DGSI. »