MARDI 17 OCTOBRE

En passant

17/10

Me Kempf demande l’accès aux notes d’audience. La Juge et lui sont en désaccord, elle lui dit que ces notes ne seront pas disponibles avant la fin des débats. Becker se joint à Kempf.

CAMILLE 

La présidente demande s’il y avait-il assez d’armes airsoft pour tout le monde, C. répond que probablement mais que n’étant pas spécialiste elle ne saurait dire ce qu’elle avait précisément en main. S’agissant de savoir s’il y avait eu des tirs, C. répond que les répliques ne fonctionnaient pas toutes (système de billes) et qu’il n’y a pas eu de tirs. Elle répond sur le déroulement de l’après-midi, les participant.es ont fait des binômes, pas toujours les mêmes et ont fait deux ou trois parties. 

La juge l’interroge sur l’arme à canon scié et ses munitions trouvées dans le camion de F., C. répond qu’elle n’a jamais vu cette arme dans le camion de F.

La juge reprend sur l’airsoft et énumère les répliques trouvées dans le camion, demande comment cela s’est passé.

C. explique le déroulement des parties, qui ouvre les pièces, passe devant, derrière, et quand le tour de la maison est fait la partie est terminée. C. explique que c’était l’occasion de faire des choses toustes ensemble et de casser les codes entre mecs et femmes. A la question de savoir si cela lui a plu, elle répond qu’elle a trouvé ça marrant, qu’il y a eu des anecdotes, mais qu’elle n’en n’a jamais refait.

La juge cite So. et dit que cela avait l’air de beaucoup tenir à cœur de F. de faire ces parties. C. répond que tout le monde était motivé ce jour-là, que la veille les répliques avaient été présentées et qu’iels avaient pris le temps d’apprendre à les manipuler, les autres femmes n’étant pas présentes ce jour-là.

La juge revient sur la sonorisation du 02 mai 2020 où C. et F. reparlent de l’activité de l’après-midi. C. explique que c’est normal qu’iels en reparlent puisque ça les a occupé.es une partie de la journée, que F. cherche comment il pourrait améliorer les prochaines parties, mais qu’elle est moins intéressée par les détails techniques.

C. est éprouvée et rencontre des difficultés pour commenter des dialogues qu’elle n’a pas sous les yeux, elle a besoin d’une pause pour se ressaisir. Elle explique que tout cela pèse énormément sur sa vie depuis trois ans. 

La juge enchaîne et poursuit la lecture des retranscriptions. Elle oriente ses questions sur la volonté de F. de transmettre et le présente comme quelqu’un qui souhaiterait « enseigner » ce qu’il connaît. Ce à quoi C. répond qu’il est normal que lorsqu’on présente une activité, on souhaite qu’elle plaise à toustes.

Puis la juge l’interroge sur le rapport avec le Rojava, sur la base des sonorisations. C. répond que cela n’a aucun rapport, que F. ressent parfois le besoin de parler du Rojava lorsque que certaines choses y font écho. Cet après-midi là, tout le monde s’est approprié les choses à sa manière, c’était de la rigolade. 

La juge cite une retranscription dans laquelle le terme « brown » est employé et lui demande ce que cela signifie, C. dit n’en avoir aucune idée.

C. et F. reparlent des maniements effectués lors de la présentation de la veille, alors que tout le monde n’était pas présent, mais c’est totalement secondaire, le principal étant que tout le monde se soit senti à l’aise.

La juge demande s’il y a eu de nouvelles propositions pour cette activité, C. répond que c’était rigolo mais qu’iels avaient envie de faire d’autres choses, et qu’i n’y a donc pas eu de nouvelle proposition de refaire des parties d’airsoft.

Procureur :

Il relance C. sur le fait qu’il n’y aurait pas eu qu’une partie d’airsoft à l’écoute des retranscriptions (So et B. parlent de plusieurs parties). C. lui répond qu’elle a l’impression de tourner en rond sur cette question, qu’elle a déjà expliqué qu’il s’agissait de discussions sur le temps de présentation, la veille du jour où ont eu lieu les parties. 

Le proc évoque un extrait où F. parle de leadership et insinue que F. se définirait en tant que « leader ». C. lui répond qu’à l’inverse parle des autres qui mènent la danse, et qu’il souhaite faire attention à ne pas prendre trop de place et que chacun.e puisse prendre le leadership à tour de rôle. 

Le procureur fait remarquer que le terme « travail » revient à plusieurs reprises dans les conversations. C. lui rétorque qu’il extrait le terme de son contexte, et que dans ce passage, F. fait référence à son travail corporel. C’est un terme que F. utilise régulièrement et dans beaucoup d’autres contextes : communication, lecture, activités, ce qui souligne la mauvaise foi du procureur.

Le proc cite alors la GAV de So qui affirme que F. souhaitait partager son expérience.

C. rappelle le côté performatif des GAV, chacun.e a son regard, son vécu, son ressenti. Dans les dynamiques de groupe, beaucoup sont dans la rigolade et certain;es parfois ne font pas toujours attention aux personnes autour d’elleux et peuvent être blessant.es sans s’en rendre compte, notamment les mecs.

Le procureur lui demande si elle a pris plaisir à ces parties d’airsoft et cite sa GAV, ce à quoi C. répond qu’à ce moment de sa GAV elle est agacée de l’insistance autour de cet après-midi. Elle a à la fois pris du plaisir à jouer dans une dynamique de groupe, mais elle a aussi pleuré suite à un moment qui l’avait blessée. 

« Tout n’est pas rires ou larmes et je ne suis pas sûre que vous êtes capable, M. le procureur, de comprendre la complexité des échanges humains ».

Avocats :

Me Arnoult rappelle que la conversation dure seulement 6 minutes bien qu’elle ait été définie par l’accusation comme étant très longue. Il revient sur les déclarations de So en GAV qui relate bien la rotation de binômes. 

Me Chalot demande à C. si cela était une activité secrète, C. répond que pas du tout, elle en a même parlé à sa mère, qui l’a évoqué par la suite lors des enquêtes de personnalité.

Me Kempf souligne le fait que la juge ait posé une question sur l’arme au canon scié au millieu de l’interrogatoire sur les parties d’airsoft. La juge reconnaît que cela concernait les armes et que ce n’était pas bien placé. Il s’interroge sur les critères qui déterminent la retrasncription ou non d’une sonorisation. Est-ce pour être utile à la manifestation de la vérité ? 

C. avoue ne pas bien comprendre, cela ne représente qu’une infime partie de leurs vies. 

Me Kempf cite alors des extraits où le vocabulaire utilisé par C. et F. est celui du jeu : « ludique », « jeu », puis demande à C. la définition de performatif. Il fait remarquer que ce sont les enquêteurs eux-mêmes qui ont utilisés le terme « d’entraînements » s’agissant des parties d’airsoft lors de la GAV de So, alors que cela ne fait pas partie de son vocabulaire. Sur le PV de sa GAV, sa réponse commence « A votre question » sans que la question soit inscrite sur le PV, ce qui est illégal, les questions doivent paraître sur les PV.

Me Bouillon 

Elle dénonce le fait que dans le dossier, des recherches ont été faites sur un rappeur (musique de fond sonore), sur les avocates elleux-mêmes (légal team), mais aucune recherche n’a été effectuée sur la pratique de l’airsoft.

Elle s’est donc elle-même renseignée et lit des citations d’un site d’airsoft officiel : « leader », « chef », « progression », « debrief », « entraînement », sont des termes courant dans la pratique de l’airsoft.

LOIC

La juge rappelle que Loic apparaît dans l’enquête à partir de février 2020 avec M. et F., avec qui ils se sont retrouvés dans une maison abandonnée.

Elle demande à L. depuis quand l’association « La passion des amis » existe, L. répond que cette association a été très peu utilisée, peut-être un an ou deux. La juge précise que l’asso existe depuis 2018 et que le siège a été transféré à son adresse en 2019. L. explique que l’association est désormais clôturée et qu’elle a très peu été vivante, qu’il l’a créée par envie de passer du temps avec des gens en faisant des activités. 

La juge lui demande pourquoi il ne l’a pas lui-même présidé mais a demandé à une amie de le faire, L. répond qu’il a un problème avec tout ce qui est administratif, et qu’à cette époque il était concentré sur ses études. 

A la question de savoir si l’airsoft était pratiqué dans le cadre de cette association, L. répond ne pas se souvenir du moindre lien entre l’airsoft et l’association. Il n’y a pas de cotisations, ils ne sont que trois membres.

La présidente cite une personne interrogée affirmant le contraire et lui demande s’il aime pratiquer l’airsoft.

L. s’étonne de la réponse de cette personne, alors qu’elle n’a jamais elle-même pratiqué l’airsoft. Il répond également que lui-même ne l’avait jamais pratiqué à ce moment-là, et que l’association avait pour but de faire aussi du théatre et d’autres activités. 

C’est plus tard, sur proposition de F., qu’il a participé à l’achat d’une réplique d’airsoft (200 euros) pour le pratiquer.

La juge cite ses déclarations en GAV : « Nous nous sommes revus avec F., il voulait pratiquer l’airsoft ». L; récuse cette déclaration. Il explique que F. lui avait confié sa chienne et avait laissé son camion chez sa mère et qu’il était donc logique qu’ils se revoient à son retour du Rojava. L’idée de pratiquer l’airsoft est venue bien plus tard, au fil de conversations. Lors de sa GAV il n’a pas donné tous ces détails car face à la violence de la GAV il s’est renfermé sur lui-même.

La juge continue de citer ses auditions sur le fait « de copier, d’apprendre à manier des armes ». L. répond que pratiquer l’airsoft était une façon de passer du temps avec son ami. Et que c’était aussi lié avec sa tendance à être très anxieux, un peu « parano » s’agissant de l’état du monde et de la possibilité d’un cataclysme. 

A la question de pourquoi cette activité plutôt qu’une autre, L. répond être très ouvert à toutes sortes d’activités, même s’il n’est pas particulièrement attiré par les armes à la base.

La juge demande qui a trouvé la maison abandonnée, L. ne se rappelle pas mais ce n’est pas lui. Sur comment elle avait été repérée, L; explique que dans les milieux squats les gens ont l’oeil pour repérer les bâtiments abandonnés. 

Sur le fait qu’ils auraient été habillés en tenue « militaire », L. explique qu’il est très fréquent dans les milieux punks d’utiliser des vêtements militaires car ils sont peu chers et résistants. 

La juge demande ce qui se passe dans la maison, L. lui répond qu’ils la nettoient car il y a des bris de verre et qu’ils ont des chiens. 

La juge lui rappelle qu’il a fait part de son anxiété à pratiquer l’airsoft et lui demande ce qu’il en était s’agisssant de F. et de M. L. répond qu’ils souriaient, que tout le monde rigolait, que lui-même l’airsoft n’est pas trop son truc et qu’il « tirait un peu la tronche » lorsqu’on lui a présenté des répliques d’armes, mais qu’il souhaitait passer du temps avec ses amis. Il dit n’en avoir rien retiré de particulier. Il ne se souvient pas si les parties se sont pratiquées sur une seule journée ou deux jours consécutifs.

L. ne se rappelle pas avoir évoqué de « peur grandissante » ce jour-là lors de sa GAV, même s’il se souvient ne pas avoir tiré de fierté d’avoir « joué à la guerre » car cela peut être mal perçu dans les milieux « de gauche ». On a droit à un petit laïus de la présidente : « Vous faites ce que vous voulez, vous n’êtes pas obligé de raconter ce que vous faites à tout le monde ». Ah bon, on fait quoi depuis trois ans, là ? 

La juge l’interroge sur une « réunion » qui aurait eu lieu ce jour-là concernant l’airsoft et dont il a déclaré au JI ne pas se souvenir. L. doute fortement qu’ils aient abordé ce sujet, mais pense qu’ils ont peut-être évoqué le sujet en buvant des coups le soir. L. évoque le fait qu’à cette période avec F. ils partageaient des activités sportives comme la course à pied, les étirements, qui permettaient de créer une dynamique dans le corps.

S’agissant des notes de M. mentionnant les termes « trouver un terrain en Arriège », « pseudos », « Tekmil ».

L. répond qu’il ne sait pas ce qui se trouve dans ces notes mais qu’il se souvient que dans les conversations du soir, lorsqu’ils buvaient des coups ensemble, l’acquisition d’un terrain en Arriège a pu être évoquée, car de nombreux.ses habitant.es de Toulouse cherchent un terrain en Arriège. Pour le reste, cela ne lui évoque rien.

Assesseuse de droite : 

Elle lui demande si le document « création milice » lui rappelle quelque chose. L. dit se rappeler d’une brochure sur ce thème ayant circulé, comme des dizaines d’autres brochures. 

Procureure :

La proc lui demande pourquoi il a utilisé Mme F. comme prête-nom. L. lui répond qu’il n’aime pas s’occuper d’administratif et que cela lui permettait aussi de passer du temps avec elle.

Elle enchaîne en lui demandant pourquoi les documents concernant l’asso se trouvent sur l’ordinateur de F. et pas sur le sien, ce à quoi L. répond qu’il lui a demandé un coup de main administratif, pour ne pas avoir à le faire.

Elle tente de le piéger sur la contradiction entre son affirmation de ne pas aimer pratiquer l’airsoft et le fait de créer une association à cet effet. L. répond que l’association avait pour but de faire des activités et que pour cela il a fait appel à deux ami.es cher.es à son coeur pour l’épauler.

Elle revient sur ses déclarations en GAV. Il explique que dans le contexte de la GAV, tout son monde s’écroule, qu’il ne comprend pas être arrêté pour une après-midi d’airsoft et les activités anodines de ses ami.es. Qu’il y voit des actes anodins et qu’il se retrouve en GAV avec une arrestation terroriste, du coup, oui, ce qu’il dit est décousu, il n’y comprend plus rien.

Elle lui rappelle qu’il a refusé de répondre aux questions autour d’un éventuel « projet » pour ne pas trahir ses amitiés.

L. lui répond que F. a divers projets et qu’il est une personne pleine d’en-train, qui déborde d’énergie, parfois trop, qu’il est un bout-en-train, qu’il aime faire la fête.

Elle cite « prendre les armes là où elles sont », « s’en prendre aux keufs ». L. lui rétorque que des propos comme ça il en a entendu souvent, l’idée du « grand soir », de « prendre les armes », ce ne sont que des mots. Dans notre milieu il est courant de dire que les forces de l’ordre représentent le système et qu’il faut abolir le système.

La proc insiste sur la proposition de F. de fabriquer des explosifs, L. lui rétorque que F. ne lui parle jamais du Rojava et qu’il ne voit pas comment il aurait pu lui parler d’explosifs du Rojava.

La proc poursuit en lui parlant de la « clandestinité » de leurs moyens de communication, L. répond qu’ils utilisent Signal et éteignent leurs téléphones, comme dans d’autres endroits.

Elle s’interroge sur les raisons de cette « clandestinité », l’airsoft étant légal. L. répond qu’ils jouent à se faire peur et donc créent une ambiance autour de ça.

Puis elle aborde les notes de M., « protocole de recrutement », « PNL », et lui demande si cette mention « PNL » se réfère à lui. L. lui explique que depuis fin 2019 il parle de PNL à tout bout de champs et que c’est sûrement pour cela. Elle cite les termes « blessé ou tué », cela ne lui dit rien.

S’agissant du document « Création milice » retrouvé chez F. et M., la proc demande s’il y a des échos avec les notes de M. « serment », « recruter », L. répond qu’il n’en sait rien. 

La proc l’interroge sur le fait qu’il est question d’entrainement aux premiers secours et au fait de poser un garrot. L. répond que dans leur pratique de l’airsoft, ils ont évoqué l’exemple d’une personne à terre et de comment faire pour la tirer et lui faire un garrot, mais que c’était très sommaire.

Sur le paintball, L. dit ne pas faire de différence avec l’airsoft. 

Avocat.es :

Me Simon 

Me Simon demande à L. combien de temps il est resté dans l’escalier(partie d’airsoft), il répond qu’il a dû s’ennuyer.

Puis elle lui demande s’il connaît M., il répond que oui, c’est un ami de F., ils se sont vus 2-3 fois. 

A la question de savoir si pour M. les parties d’airsoft étaient liées à son intention de se rendre au Rojava, il répond que c’est possible que cela ait été central pour lui. 

Me Tort

L’avocate va mener un interrogatoire vigoureux, en bousculant L., sur ses conditions de GAV. Elle commence par le questionner sur son arrestation et son arrivée à Levallois Perret, dans les locaux de la DGSI. 

Il raconte : alors qu’il était dehors et marchait vers son camion, il apperçoit plusieurs véhicules. Deux individus en sortent cagoulés, le mettent en joue, lui demandent son identité, lui passent les menottes, et l’emmenent à l’intérieur de la maison de sa mère, qui accueillent aussi des locataires, puis lui donnent les raisons de son arrestation. Il ne comprend pas. Il se dit que c’est absurde. Il est emmené en train avec une camisole et un sac sur la tête, puis sort du train, la camisole est ôtée, on lui remet les menottes, ses douleurs aux cervicales reprennent, puis il est mis en cellule, totalement déboussolé. Il aperçoit des chaussures devant les autres cellules. 

On lui parle du Rojava, il fait le lien avec F. 

L’avocate lui demande d’être plus précis, elle le cite sur un PV de sa première audition : « il ne faut pas faire miroiter des choses aux gens ». Il explique qu’au long du trajet les policiers lui ont fait miroiter que s’il balançait il pourrait sortir sans charge. 

Lors de cette première audition, on lui pose des questions politiques, sur ses convictions, il  avait peur que cela puisse arriver un jour, il le vit comme un cauchemar. Dans les PV il apparaît qu’il parle lui-même de ses fréquentations, l’avocate lui demande si c’est à cause de propos tenus en « off » par les agents.

L. explique qu’il est angoissé depuis 32 ans, qu’il se sait jugé sur ses opinions, qu’il vit son cauchemar. M° Tort lui demande combien il y avait d’agents pour l’interroger et si c’était toujours les mêmes ; oui, toujours la même agente principale. Est-ce que lui avait toujours le même avocat ? ; non, il a eu 4 avocat-e-s différents lors de sa garde à vue. Ca met pas vraiment en confiance… 

Il parle de son impossibilité à dormir, dans ces conditions, et qu’il demande à voir un médecin. Il en voit un effectivement, qui lui préscrit du Tramadol 100 mg, en deux prises. M° Tort va éclairer cette prescription : le Tramadol est un antalgique puissant, de la famille des opioïdes. Absolument pas nécessaire pour des troubles du sommeil, et surtout à ne jamais prescrire en première intention. Le Tramadol doit être prescrit uniquement si des antalgiques ont déjà été administrés sans succès. Elle fait la longue liste des effets secondaires : vertiges, difficultés à parler, propos incohérents, et lui demande s’il était en état de répondre correctement aux questions de la DGSI, ce à quoi L. répond que non. On l’a assomé avec ce médoc ! ; entre deux interrogatoires. M° Tort dit que les flics ont « attendri la viande » avant de la cuisiner. 

L’avocate lui demande à quoi il répond et s’il est influencé par ce qui lui est dit en « off ». L. répond qu’en aucun cas ses amis, dont F., ne peuvent vouloir s’en prendre par la violence à des êtres humains ni même à des institutions au nom de la démocratie. Avec beaucoup d’émotion et de fatigue, il dit que c’est inconcevable quand on est « anarchiste » de vouloir s’en prendre aux personnes. Qu’on est « tous frères ». On voit beaucoup de regards émus dans la salle à ce moment là.

Sur la question de son droit au silence l’avocate lui rappelle que c’est son droit le plus strict, et lui demande pourquoi il  a parlé par la suite. L. répond qu’il y a énormément de pression et d’insistance, qu’on lui « retourne le cerveau ». Me Tort note que ses droits ont été bafoués en GAV, L. répond qu’à ce moment-là pour lui c’est très confus, que tout se mélange,  et qu’il en vient même à douter de ce qu’il croit, de son passé, d’informations qui ne viennent pas de lui. 

Me Tort rappelle que lors de l’audition suivante on demande à L. de charger F. au maximum. L. en vient à douter à force qu’on lui parle de guerre, d’explosifs, et en vient à croire ce qu’on lui dit. Il est paumé. 

Lors de la dernière audition, alors qu’il va être déféré devant le juge, il reparle d’airsoft comme d’un jeu et se dit perdu. L. répond qu’il est impossible d’émettre des réponses sincères dans ces conditions, que plus on le met sous pression et pire c’est, et qu’il considère que les valeurs humaines sont alors bafouées. 

Me Tort souligne le fait que bien qu’étant un grand angoissé, il est friand de films « catastrophe » et de jeux de rôle. Ce à quoi L. répond qu’en effet, il aime se faire peur et « sortir la peur de lui ». 

L’avocate rappelle que l’airsoft n’est pas une pratique confidentielle, 45000 personnes le pratiquent. Ont-ils pour autant l’intention de créer des milices ? L. répond que non, il pense que c’est un exutoire, et que dans son cas c’est une façon de se confronter à la peur pour s’en libérer. 

S’agissant des notes de M., dans lesquelles il ne se reconnaît pas, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’était pas présent. 

Sur la date du 25 mai, l’avocate rapelle qu’il n’y a pas de moyen de savoir s’il y avait plus de trois personnes, car il n’y a pas eu de surveillance de la DGSI ce jour-là. Uniquement bornage téléphones et notes de M. L. répond qu’il n’en a aucune idée. 

La juge revient brièvement sur les scellés effectués dans son camion et en profite pour glisser une remarque sur le fait que son camion était particulièrement bien rangé. ??  (quel rapport wsh)

BASTIEN

La présidente demande à B. quel était le but de vouloir obtenir son permis de chasse. B. répond qu’il avait pour projet d’acheter un terrain avec W., d’y faire un potager et d’y vivre en auto-suffisance. Qu’en rencontrant des personnes qui vivent à la campagne, éleveurs, agriculteurs, il lui a paru utile d’avoir le permis de chasse s’il vivait en montagne ou autre, pour effectuer des tirs d’effarouchement par exemple. Au moment de passer son permis il y a pris goût, lors des différentes épreuves pratiques (sangliers en bois, ball trap…). 

A Parcoul, B. se rend au stand de tir, l’envie vient de lui et pas uniquement de W. Il s’y rend une à deux fois par semaine, il fait des rencontres au sein du club, cela lui plaît. Des personnes leur font essayer des armes historiques, cela lui plaît et c’est notamment pour ça qu’il a acquis un revolver à poudre noire. 

La juge l’interroge sur l’achat d’un fusil à pompe en mai 2020 et lui demande si c’est pour lui-même. 

B. répond qu’au départ ce n’est pas du tout l’arme qu’il avait prévu d’acheter, qu’il avait vu une autre arme qui lui plaisait mais qu’en tombant sur celle-ci il l’a achetée. N’ayant pas le budget, F. lui a prêté l’argent nécessaire à l’achat, dans l’idée ou de lui revendre ultérieurement, une fois son permis de chasse passé, ou de la conserver. 

La juge fait remarquer que c’est une grosse somme d’argent pour un emprunt (400 euros) pour acheter un tel objet. B. lui rétorque que F. lui a prêté l’argent et que c’est son choix d’avoir acheté un fusil avec.

La juge rappelle que les personnes que B. et W. croisaient au stand de tir ont toutes témoigné qu’ils étaient des personnes sérieuses et passionnées par le tir sportif, et qu’ils étaient très attachés aux règles de sécurité. Puis elle demande ce qu’il en était du stand de tir à Parcoul. B. répond qu’à Parcoul il n’a pas souvenir d’avoir prêté son arme, qu’ils avaient fabriqué un stand de tir artisanal et qu’ils appliquaient toutes les règles de sécurité. 

Puis la juge lui demande à quel moment les répliques d’airsoft ont été montrées, B. répond qu’il ne se souvient pas de maniements de répliques d’armes avant la partie d’airsoft. Il y a eu plusieurs parties, lors de la même après-midi. 

Puis la juge lui demande de décrire comment ces parties se sont déroulées. 

B. dit que c’est allé assez vite, iels ont décidé de faire un jeu, se sont mis.es à marcher en colonne, prenant le « lead » à tour de rôle, et ont traversé la maison. Il explique que « prendre le lead »  c’est donner les instructions : « ouvre la porte », « nettoie cette pièce », etc. Iels ont beaucoup ri quand H. a pris le lead car elle donnait des ordres sur un ton très militaire mais que ce n’était pas du tout sérieux, c’était un jeu.

La juge lui demande ensuite s’il a eu l’occasion d’échanger avec F. sur certaines choses de son passé, B. répond que non. Puis il explique qu’il est un fervent adepte des jeux de rôle, qu’au bout de deux heures ça s’est essoufflé et qu’iels sont passé.es à autre chose. Il n’y a pas eu d’autres propositions de nouvelles parties par la suite.

A la question de savoir ce qu’il en avait tiré, B. répond qu’iels ont bien rigolé, et rien d’autre.

La juge demande s’iels avaient toustes les six une réplique d’arme, B. répond que oui, 4 appartenant à F. et 2 étant des jouets de fête foraine appartenant à W, qu’il avait dans sa chambre. 

La juge revient sur les déclarations de So en GAV, B. répond qu’il a désormais tendance à se méfier de ce qu’ont dit les un.es et les autres en GAV. 

Elle lui demande si L. lui a déjà parlé de parties d’airsoft, B. lui répond qu’il serait très étonné de la part de L. qui est très anti-armes et antimilitariste, mais que pour un rôliste (adepte des jeux de rôle), cela l’étonne moins. 

Sur la place qu’a pris cette partie d’airsoft lors de leur séjour, B. lui cite une anecdote : « j’ai passé plus de temps à faire de la veganaise (mayonnaise vegan) que des parties d’airsoft. Elle n’a jamais voulu monter » (rires).

La présidente revient sur la présence d’une arme à canon scié que B. avait aperçu à Parcoul et lui demande s’il était étonné, il lui rétorque que ce n’est pas quelque chose de rare, beaucoup de gens à la campagne en possèdent. Elle cite ses PV de GAV lors desquels il semble connaitre toutes les répliques d’airsoft. B. répond qu’on a dû lui montrer des photos à ce moment-là car il ne pouvait pas se rappeler d’autant de détails.

La juge lui dit qu’en GAV il semblait émettre un doute sur le fait que F. ait été sniper. B. lui répond qu’il avait le sentiment que F. était une « grande gueule et qu’il avait des doutes sur la véracité de ses propos. Cela s’est passé il y a plus de trois ans, il ne se rappelle pas tous les détails. Par ailleurs, tout le monde buvait beaucoup d’alcool. 

La juge revient sur le fusil acheté avec l’argent de F. Lorsqu’il a dit « je le laisse galérer », c’est parce qu’il n’avait pas encore pris sa décision sur le fait qu’il le garderait ou pas. 

Elle lit des citations de GAV, B. lui répète plusieurs fois qu’il n’a aucun souvenir de si F. a tiré avec sa carabine et ne se rappelle pas non plus de ce qu’il en a dit en GAV. La juge revient sur une phrase prononcée en GAV faisant le lien entre airsoft et ZAD, B. dit n’avoir aucune idée de pourquoi il a tenu ces propos à l’époque.

La juge revient sur une expression qu’il aurait prononcé, « boxe ta face », B. répond qu’il faisait référence à un atelier « boxe » qui a duré 20 minutes, et à l’issue duquel F. s’est retourné le doigt et a terminé à l’hôpital.

Assesseuse de droite 

Elle revient sur une phrase prononcée en GAV où B. parle de mauvaises intentions. B. avoue avoir cherché à se décharger et s’être désolidariser de F. A la lecture de la question de la DGSI, B. lui fait remarquer que la question ne devait pas être celle-ci ou alors qu’il manque le contexte et le « off ». 

S’agissant de la conversation entre F. et C., B. réaffirme qu’il s’agissait bien d’un jeu, et non d’un exercice ou d’un « entraînement ». 

Elle lui dit qu’il aurait évoqué deux après-midi au cours des trois semaines, ce à quoi B. répond que c’est faux, F. est resté un mois et les parties d’airsoft n’ont eu lieu que sur un après-midi. 

Procureur

Lorsqu’il prend la parole le procureur décrit les répliques d’airsoft comme des répliques « d’armes lourdes », ce à quoi B. répond que c’est le principe même de l’airsoft de reproduire la réalité. 

Le proc demande à quelle fréquence iels ont utilisé le stand de tir artisanal à Parcoul. B. répond qu’iels ont dû le faire une fois, avec trois balles tirées. Le proc lui dit qu’en GAV il a parlé de 3 ou 4 fois. 

Puis le proc lui demande s’il voit des ressemblances avec les descriptions de L. s’agissant de la pratique de l’airsoft. B. répond que oui, le fait d’ouvrir les portes, avancer…

Puis le proc cite des propos « ce monde part en vrille totale » prononcés suite au visionnage d’une vidéo d’extrême-droite et insinue que c’est cela qui l’aurait incité à s’armer. B. répond que c’est totalement faux, qu’il a dans un premier temps passé son permis de chasse, puis acquis une carabine, et que c’est plus tard qu’ils ont vu cette vidéo d’extrême-droite mais que ce n’est pas du tout l’élément déclencheur. 

Le proc lui demande pourquoi le fusil à pompe semi-automatique à plusieurs coups l’a intéressé à ce moment-là, et est-ce que c’était au sortir du confinement. B. répond que oui, le proc lui rétorque alors qu’il avait déjà passé commande à ce moment-là, ce à quoi B. répond qu’il doit avoir un problème avec la chronologie. 

Le proc fait remarquer que devant le JI il avait émis les mêmes doutes quant aux intentions de F. B. répond qu’il se sentait piégé par les propos qu’il avait prononcés à la DGSI.

Le proc lui demande alors pourquoi on devrait le croire aujourd’hui. B. répond que désormais il n’est plus dans les mêmes conditions, que depuis il a réfléchi, et qu’il est sincère et réfléchi.

Avocat.es 

Me Bouillon 

Elle lui rappelle qu’en mai 2020 il emprunte 400 euros à F. S’il avait vraiment des doutes sur ses intentions, ne se serait-il pas empressé de le rembourser ? B. répond que si, car dans les mois qui ont suivi il a travaillé et aurait pu le rembourser s’il avait eu un doute.

Me Bonaglia

Pour l’anecdote, il explique que le stand de tir à Parcoul a été achevé par une mauvaise manipulation de drone. 🙂

Il revient sur la vidéo d’extrême-droite vue sur Youtube et évoquée en amont par B., et sur l’issue de la plainte pour avoir tiré sur un mannequin d’un membre de la France insoumise, classée sans suite par le procureur de la République.

Il lui demande s’il connaissait F. au moment de passer son permis de chasse, lorsqu’il a acquis sa carabine et commencé à se rendre au stand de tir, ce à quoi B. répond que non, il ne le connaissait absolument pas. 

Me Bonaglia revient sur la fin de la discussion dans le camion (largement citée par la juge et le procureur), lors de laquelle les trois comparses proposent de se prostituer pour gagner l’argent nécessaire à l’acquisition de B. 

Puis il pose la question de savoir pourquoi lors de la partie d’airsoft iels n’avaient pas fait deux équipes pour faire une équipe contre l’autre. B. répond qu’iels n’avaient pas d’équipement de sécurité et que c’est probablement pour cette raison qu’iels n’avaient pas fait deux équipes.

VENDREDI 13 OCTOBRE

En passant

13/10

Camille va être interrogée sur la question des explosifs pour clôturer la « thématique ». La plupart des questions portent sur sa relation avec F. et sa complicité supposée. Est aussi abordé son rôle dans la confection de pétards à Parcoul.

Juge: avant toute chose, elle informe que le Tribunal a délibéré sur la demande de la veille (faire une requête à la DGSI pour obtenir les enregistrements vidéo des GAV), elle noie encore une fois le poisson en disant que cette demande sera jointe aux autres demandes « sur le fond » et qu’on en saura pas plus pour l’instant.

« Si ca vous intéresse, W. ce que je dis ? »

L’avocate Alice Becker : « Avez-vous reçu un mail de ma part ? » Le mail a été envoyé tôt dans la matinée et arrive « à l’instant » (13h49) sur la boîte mail de la Présidente. La DGSI l’aurait-elle intercepté ?

CAMILLE est à la barre

La présidente annonce les points sur lesquels elle sera interrogée. Principalement les essais de pétards à Parcoul.

Juge: « On ne vous voit pas apparaître tout de suite mais de manière indirecte dans la procédure préliminaire ».

Quelques conversations brèves qui disent peu de choses, des écoutes téléphoniques, une géolocalisation du téléphone, sa voix apparait dans les sonorisations du camion de Florian.

Une sonorisation lui est lue, dans laquelle on entend un appel entre elle et Florian. Il lui explique quelque chose à propos d’une action « à l’arrache », pas bien organisée, avec des Talkie-Walkie, etc. Il dit qu’il aime les trucs « plus pro ». 

– « On vous entend dire « Ouais » à plusieurs reprises », commente la Présidente.

C : F. a un certain goût de la mise en scène. A ce moment-là ce que je sais c’est que l’esprit fanfaronnade, ça ne m’intéresse pas.

J : « Oui, vous ne relancez pas ».

C : « Oui à la fois fanfaronnade et truc inconséquent : ne pas se faire prendre bêtement sur un truc inconséquent ».

J : « Il dit « il aime les trucs bien organisés ». C’est un gars bien organisé F ? »

C : « Je ne sais pas et ça dépend des sujets. Très désordonné ou très organisé selon ses centres d’interêt. Ca ne prédomine pas ». 

Autre sonorisation, le soir du vol d’engrais. F. envoie quelques messages audio à C., sans lui donner de détails, mais il la prévient qu’il part en petite « mission » et que si il ne donne pas de nouvelles le lendemain, c’est qu’il est « en prison ».

Juge : « Est-ce que vous étiez au courant du weekend avec S ? »

C : « Non je ne connais pas S »

J : « Paulnay, vous connaissez ? »

C : « Non. »

J : « Vous n’avez pas idée de l’emploi du temps de F ? »

C : « On ne se tient pas au courant de tout ce qu’on fait ».

J : « Est-ce que vous avez le souvenir de cette conversation ? »

C : « En dehors de la procédure, non. »

J : « Et maintenant ? »

C : « Bah je l’ai eu sous les yeux, donc oui, mais je ne suis pas capable d’en dire plus ».

J : « Une conversation classique ? »

C : « Pour recontextualiser, dans nos milieux on parle souvent de « mission », mais ça n’a rien à voir avec quelque chose de grave. Par exemple, dans nos réseaux de squats ou d’associations, il y a des façons de vivre autour de la récup. Ce vocabulaire ne me surprend pas ».

J : « Est-ce qu’il y a une manière de s’organiser ? Pour la récup ? »

C : « Oui, on prend toujours des précautions car on sait que pour de la récup, ou pour un collage d’affiches, on peut finir en GAV. Je n’ai pas pris au sérieux son message, ça m’a pas alarmée plus que ça ».

J : « Vous allez être géolocalisée, votre camion et ligne téléphonique. C’est comme ça qu’on sait que vous descendez en Dordogne. On s’assure de votre présence à Parcoul, on fait des recherches notamment sur vos achats. Vous n’avez pas contesté votre présence ».

C : « Je n’ai jamais contesté ».

J : « Vous préparez ce déplacement avec l’aide de votre père : il vous envoie des justificatifs par sms. Organisation pour permettre de bouger ».

C : « Oui, c’est ça ».

J : « On a la synthèse de cette communication : déplacement professionnel. Ce n’est pas ce que vous faites ? »

C : « Non, mais c’est le début du confinement, il y a des contrôles stricts et je n’ai pas de raison valable donc j’ai demandé ça ».

J : « Vous vous faites flasher en avril et vous donnez l’adresse du moulin ? »

C : « Non pas du tout. J’ai donné mon adresse à Rennes mais c’était la voiture de Will » (carte grise avec adresse du Moulin).

J : « C’était plus sûr d’avoir une attestation, pourquoi pas sur l’application ? »

C : « Je n’utilise pas ce genre d’application sur mon téléphone. C’est une question d’éthique ».

J : « Vous arrivez le 5 avril au soir, repartez début mai, vous y allez en juillet, y retournez fin juillet… Vous êtes retournée ensuite à Parcoul ? »

C : « Oui, une fois dans l’été. Voir une amie Audrey qui vivait à cette coloc. On s’est rencontrées aux vendanges également. Le weekend était pour organiser un séjour vacances avec une association de personnes sans-papiers du Périgord. J’y suis restée 3 jours. W était là. B n’était pas là ».

J : « Vous êtes partie avant Florian, pourquoi ? Vous vous y ennuyiez?

C : « On en revient toujours à cette histoire de hasard. A la base on devait se voir juste un week-end, puis il y a eu les annonces de confinement donc on a voulu le passer ensemble, c’était plus long que prévu. J’avais pas mes affaires. C’était chouette, mais j’avais pas mes ami.es proches, pas mes activités à Rennes. Financièrement j’étais juste. Je cherchais du boulot. Je suis restée quelques semaines à Parcoul mais j’ai choisi de rentrer chez moi à un moment ».

J : « Quand vous êtes en GAV vous avez répondu mais pas à tout, surtout quant à votre vie privée. On a plus d’informations sur votre parcours, moins sur vos activités. Votre droit au silence est respecté ». 

* Interrogatoire sur la connaissance des explosifs*

J : « Avez-vous des connaissances sur la question ? » 

C : « Non ».

J : « Attirée ? »

C : « Non ».

J : Des questions plus précises vous sont posées à la 5ème audition : vous choisissez de ne pas vous exprimer. Tentative à la 7ème audition sur les explosifs, vous ne voulez pas répondre. Vous vous êtes exprimée très brièvement sur ça devant le juge d’instruction. Vous évoquez la possibilité d’avoir participé. Vous vous rappelez ? »

C : « Oui, mais je voudrais préciser ou nuancer sur la GAV et la première comparution. Je ne m’étends pas sur les conditions d’arrestation. On refusait de me dire pourquoi j’étais arrêtée. Quand l’OPJ s’apprêtait à le faire, on l’a coupé. Au moment de l’énoncé du chef d’inculpation, et pendant le temps de la procédure, je l’ai contesté. J’ai toujours demandé qu’on m’explique les faits reprochés. C’est pourquoi j’ai refusé de parler. A plusieurs moments j’ai également refusé de répondre à des questions politiques ou sur mon intimité que je trouvais déplacées. Quand on a commencé à parler airsoft, j’ai expliqué, mais je n’étais pas écoutée. A un moment donné c’est une machine à broyer. J’ai arrêté de répondre parce que mes réponses ne changent rien à ce qui est en marche ».

J : « Ça figure pourtant clairement dès la première audition, votre chef d’inculpation ».

C : « Vous pouvez comprendre que cela semble complètement déconnecté de ma vie. Je ne comprenais absolument pas le rapport entre ces mots et ma vie ».

J : Pas de connaissance, d’attrait pour les armes ? »

C : « NON ».

J : « On en vient à cette histoire de bateau. Est-ce lié à votre arrivée ? »

C : Je ne crois pas que cette cérémonie du bateau a eu lieu le soir-même, parce que mon arrivée était tardive. Il y avait un effet d’accueil et de joyeuseté qui prédominait notre arrivée. Telle que je ressens notre arrivée – une visite du lieu, lieu magique, joie des habitant·es de nous faire découvrir la prestance du lieu. L’idée est d’investir ce lieu, le rendre joli, faire un bar, dépoussiérer, etc. C’est dans ce cadre la cérémonie du bateau ».

J : « Vous vous souvenez de comment germe l’idée de nouveaux pétards ? »

C : « C’est l’effet d’émulation, d’enthousiasme du groupe pour améliorer l’idée du bateau ». 

J : « Vous avez déclaré en 2020 : « De ces choses là, activités, on a fait de l’airsoft et des expérimentations d’explosif. Ca peut paraitre bizarre mais il y avait un engouement pour le feu et les pétards. Un effet d’émulsion ».

J : « émulation plutôt. Et cette recette, elle ne vient pas de vous ? Est-ce que c’est Florian ? 

C : « A peu près clair. Deux substances dont TATP (mais je ne savais pas) et engrais + sucre

2 substances testées : une dont Flo connaissait la recette mais ne la maitrisait pas, et une recette à base de cristaux. On a fait des recherches internet sur place ».

J : « Mais cette histoire de bateau arrive très vite ». 

C : « Le bateau est le point de départ festif de nos essais ». 

J : « Dans votre souvenir, qui est celui ou celle qui connaissait le plus ? »

C : « Je suis incapable de dire ».

J : « Mais qui en a parlé en premier ? »

C : « C’était une émulation collective, c’est venu spontanément. Il y a eu un engouement pour la fabrication de pétards ».

J : « Essais, expérimentation ratée, puis gros boum, puis ça s’arrête. Pouvez-vous expliquer ? Combien de jours ?

C : « Ca n’a pas duré plus de 2-3 jours. On a fait ça par curiosité. Si ça avait pas marché, on aurait arrêté de toute façon. »

J : « Qui participait ? »

C : « F. Moi. B. W. So. H., présent.es à différents moments, différentes étapes, pas toustes en même temps. Il y avait du temps d’attente, on faisait autre chose pendant ce temps ».

J : « On a compris, tout le monde tatônne, chacun y va de son commentaire… Vous saviez ce que ça allait donner ? »

C : « Ah bah on s’attendait à une explosion de pétard. On ne savait pas ce que ça allait donner chimiquement ».

J : « Vous vous souvenez des étapes ? Dans quelle ambiance ? Conscience de la dangerosité ? »

C : « Le fait que ça prenne feu, c’était pas bien on savait. Le but était de faire une poudre. Il y avait un esprit de confiance, bon enfant. Peut-être une sorte d’inconscience du danger. On aurait pu se faire mal ! On était dans une ambiance guillerette au début, puis après le gros boom on a été surpris.es ».

J : « Qui a transporté l’explosif ? »

C : « On y était tous. C’est sûrement F. qui a pris dans ses mains le produit ».

J : « Les mèches, d’où elles venaient ? »

C : « Je sais pas ».

J : « Pourquoi W. n’est pas venu ? »

C : « Il a prétexté vouloir garder les chiens, j’ai pas cherché à en savoir plus, ça me paraissait logique ».

J : « Qui a allumé le pétard ? »

C : « Je ne me souviens plus ».

J : « Et donc on comprend que ça fait boum, et tout le monde a eu peur ? »

C : « Je pense pas qu’on ai eu peur. Je dirais plutôt, j’ai été surprise, pas fière. Un peu comme une gamine qui a fait un bêtise ».

J : « L’idée de ne pas recommencer, comment c’est venu ? »

C : « Pour moi, c’était une évidence, chacun l’a exprimé plusieurs fois, à différents moments. Tout a été rangé et le reste de matière a été détruite ».

J : « On vous entend, le 11 avril, dire « T’es grave », il y avait une certaine dangerosité dans le comportement de M. D. ?

C : « Non pas du tout, c’était une blague qu’il a dû faire. D’ailleurs, on entend que je suis particulièrement attentive à prendre des précautions : « t’as le temps de t’éloigner », « on commence à s’ennuyer », etc ». 

J : « Vous connaissiez le TATP ? Vous n’avez pas fait le lien ? »

C : « J’en avait peut-être déjà entendu parler, je ne sais pas. Je n’ai pas du tout fait le lien ».

JUGES ASSESSEUSES

J2 : « Ça vous a paru simple à fabriquer ? »

C : « Non pas si simple, on a quand même bien galéré ». 

J2 : « Cette simplicité ne vous a pas fait peur ? »

C : « Oui, disons qu’après on s’est rendu compte qu’on aurait pu se blesser gravement ».

J2 : « Qu’est-ce que vous en avez tiré, comme expérience ? »

C : « Bah… j’en ai rien tiré ! »

J3 : « Pourquoi ne pas avoir arrêté avant ? Vous dites que vous vous ennuyez à un moment ».

C : « Oui l’ennui est venu à un moment, l’amusement initial est retombé ».

J3 : « Qui avait fait les recherches sur internet ? Chacun avait son accès personnel à internet ? »

C : « Je ne sais pas, je n’y ai pas participé ». 

J3 : « C’est F. qui a proposé la recette ? »

C : « Je ne sais pas, l’idée à dû émerger au fil de discussions mais ça ne m’a pas marqué ».

PROCUREUR

Porc : « Bonjour C., M. D. a été sur une zone de guerre, il en parlait souvent ? On peut penser qu’il en a retiré certains troubles, une fragilité ».

C : « Bah oui ça arrivait qu’on en parle. Non je n’ai pas remarqué de troubles quelconques ».

Porc : « N’y a t-il pas une incohérence, une contradiction à faire des activités liées à la guerre, comme l’airsoft et les explosifs ? »

C : « Non, comme il l’a expliqué, ça n’a rien à voir avec la guerre ».

Porc : « Nous savons que vous avez des contacts réguliers mais on n’y a pas accès car vous utilisez Signal, cependant on peut écouter grâce aux sonorisations de son camion des messages audio qu’il vous laisse. On entend par exemple qu’avant sa rencontre avec S. il vous dit « j’ai pas mal de boulot », « je vais bosser », « je suis bien arrivé », vous savez donc ce qu’il fait à ce moment ? Quand il « bosse », de quoi il parle là ? »

C : « Non, je ne connais pas les détails de sa vie, ni où il est ni avec qui. C’est l’inverse que montrent les sonorisations, on voit bien qu’on ne se donne aucun détail de nos vies. Ces accusations remettent en question tout ce que je porte dans ma vie ».

Porc : « Il vous dit pourtant préparer une « petite mission » ça ne vous intéresse pas plus que ça ? »

C : « C’est un mot qu’on utilise tout le temps ».

Porc : « Vous saviez que c’était un vol d’engrais ? Il a volé de l’engrais ? Oui mais l’engrais ? L’engrais vous comprenez ???? ENGRAIS ! (il dit 15 fois le mot en 3 minutes)

C : « Non je ne savais pas du tout, comme je l’ai déjà dit ».

Porc : « En GAV, dès qu’on aborde Parcoul, vous ne répondez-plus, pourquoi ? Vous comprenez, au moment où on vous parle de la confection d’explosifs, vous gardez le silence, c’est étrange… »

C : « C’était au bout de 3 jours, j’étais épuisée. Je pourrais m’étaler sur les menaces d’agression sexuelle et les kilos que j’ai perdus en GAV, mais ça risque de prendre du temps et je ne suis pas sûre que ça vous intéresse, mais allons-y M. le procureur ! »

Porc : « Et la recette d’explosif, elle vient de qui ? »

C : « J’y ai déjà répondu ».

Porc : « Et l’eau oxygénée, pourquoi 3L ? Vous avez dit-être en situation financière compliquée, on a du mal à comprendre cet achat… »

C : « Je n’étais pas en situation financière compliquée mais en effet je commençais à devoir chercher du travail. Et ça ne coûte pas cher du tout, quand je commande, quitte à payer des frais de port, je préfère en prendre un peu plus.

Porc : « Vous avez conscience de la différence entre un pétard et un explosif ? » 

C : « Explosif ce n’est pas le terme que j’ai employé ».

Porc : « En interrogatoire vous dites explosifs ».

C : « A force de répéter ce terme j’ai été prise par l’aspect performatif, mais je le réaffirme aujourd’hui nous voulions fabriquer des pétards ».

Porc : « Certes. Et quand F. sort son engrais, vous savez donc qu’il en a !! (il jubile de sa tautologie) Et après le test, il garde tout ? Ca vous fait rien de savoir ça ? »

C : « Non. Ça ne me regarde pas ».

Porc : « Vous dites avoir eu peur après le boum, et finalement ça ne vous inquiète pas qu’il garde tout dans son camion ? L’engrais, les mèches, les produits… »

C : « Je ne pense pas qu’on a eu « peur », mais on était surpris, oui. Mais de quoi j’aurais dû m’inquiéter ? Aucun de nous n’a acquis un quelconque « savoir-faire » après Parcoul. Il n’y avait pas d’envie d’en refaire. J’en ai aucune idée de ce qu’il a dans son camion, je ne le range pas tous les jours si c’est ça que vous imaginez ! »

AVOCATS

Avocate : « Rappelez-vous combien de fois vous voyez F., en tout ? » 

C : « 3-4 fois maximum ».

Avocate : « Ah, c’est intéressant parce que le PV de judiciarisation de la DGSI en février 2020 nous parle d’une « relation étroite », c’est donc totalement faux. Et votre date de rencontre aussi est fausse.

Vous échangez principalement par Signal, en témoignent les sonorisations du camion de F. Là encore, rien sur les explosifs, rien sur S., rien sur les armes. Sur quoi échangez-vous principalement ?

C : « Principalement de nos « timming de bougeage », pour se croiser à l’occasion ».

Avocate : « Parcoul c’est un peu un hasard non ? Vous arrivez très tard le 5 avril, vous ne faites pas de courses avant d’y aller ? On voit que ce n’est pas préparé du tout ».

C : « On a dû se motiver trois jours à l’avance en effet ».

Avocate: « Puis vous partez le 7 mai, dès fin avril on le voit par l’interception de vos SMS, vous préparez votre départ ».

C : « Oui ».

Avocate : « L’eau oxygénée que vous avez achetée, une partie a servi à Parcoul (trousse de secours), et l’autre partie était dans votre chambre n’est-ce pas ? » 

C : « Oui l’eau oxygénée était sur une étagère dans ma chambre, avec ma boite à couture ».

L’avocate sort les photos de sa perquisition : la chambre est saccagée.

Avocate : « Donc les enquêteurs retournent votre chambre violemment, votre lit est même cassé, pourtant ils ne prennent pas votre eau oxygénée (un précurseurs du TATP), mais repartent avec un poster sur le Rojava ? »

C : « Oui c’est ça… »

Avocate : « On voit que dans les écoutes, personne ne prononce le terme de TATP,  vous même vous connaissiez ce terme? Le Juge d’Instruction semble prétendre que vous feignez ne pas connaitre ».

C : « Non, je l’ai appris dans cette enquête. J’en avais peut-être entendu parler vaguement dans les journaux, mais aucun souvenir ».

Avocate : « Et qu’en pensez-vous maintenant ? »

C : « Bin on aurait pu se blesser salement ».

Avocate : « Quand vous recroisez Florian, vous ne refaites pas d’explosifs ? »

C : « Non pas du tout, quand on se voit, on part en vacances, on randonne, on discute de tout et de rien ».

Avocat : « Quel est le lien que vous entretenez à Parcoul avec le voisinage ? »

C : « Les voisins sont passés plusieurs fois ! Une voisine est arrivée par la rivière une fois, on est allé.es saluer les voisins ».

Avocat : « Donc, les voisins pouvaient passer à tout moment, même quand vous faisiez vos expériences ? En somme, rien de bien clandestin n’est-ce pas ? »

C : « Tout à fait ».

La thématique des explosifs est close, la juge souhaite poursuivre sur les armes et l’airsoft avec C., elle lui laisse le choix de refuser et de passer un autre jour. Elle refuse et c’est W. qui prend la suite au sujet des armes.

WILLIAM à la barre

W. a obtenu son permis de chasse en 2019

Il est en possession d’une carabine 6 coups et d’une carabine 12 mm, armes de catégorie C déclarées auprès de deux préfectures. 

En GAV W. s’est exprimé sur ses armes.  Sa famille et lui collectionnent les objets militaires, lorsqu’il était jeune il tirait avec son grand-père au fond du jardin. 

W. a également fait 6 ans de tir à l’arc, et s’était récemment inscrit à un club de tir, proche de Parcoul, où il se rendait une à deux fois par semaine.

La présidente lui demande si être en possession d’un permis de chasse ne l’a pas amené à chasser et souligne la contradiction avec sa défense de la cause animale, W. répond qu’il n’en a pas eu le temps à cause du confinement, qu’il ne connaissait aucun chasseur dans la région et que pour lui le tir est un hobby. Concernant son engagement pour la cause animale, il n’est plus végétarien aujourd’hui et souhaitait chasser dans un but d’autonomie (notamment, nourrir ses chiens). Sur le fait qu’il soit en possession d’armes « opérationnelles », W. précise que seule l’une des carabines est vraiment létale, les autres n’étant pas assez létales pour la chasse et donc utilisables uniquement pour le tir sportif.

Sur le fait qu’un stand de tir ait été mis en place à Parcoul, W. explique qu’il s’agissait seulement d’un tréteau pour s’appuyer avec une cible posée plus loin. Ses ami.es se sont essayé quelques fois au tir mais toujours en sa présence, pour assurer leur sécurité, et sur des temps courts. F. n’a tiré que 3 ou 4 cartouches. 

S’agissant de la pratique de l’airsoft, W. dit ne pas être très intéressé, cela n’a rien à voir avec le tir, certes l’aspect « mise en scène » est amusante, mais pas plus que ça. Il a néanmoins participé à quelques parties à Parcoul sur une journée, les parties ont eu lieu dans la maison. 

W souligne que cela n’a absolument rien à voir avec un véritable entraînement militaire : « Mon père m’aurait ri au nez si on lui avait parlé d’entrainement militaire ».

Tout le monde a participé sauf une personne.

L’objectif de ces parties était de s’amuser, de « jouer à la guéguerre », soit en avançant tous ensemble vers un objectif commun, soit en faisant deux équipes qui s’affrontent.

La présidente insiste pour savoir qui a proposé et savoir si c’est F. qui a « pris les choses en main ». 

C’est F. qui a proposé la partie d’airsoft, il leur a montré comment s’introduire dans une pièce et la sécuriser, mais en aucun cas il ne leur a transmis un savoir-faire militaire ni tactique, c’était pour s’amuser et passer le temps au bout d’un mois de confinement. Il en a retenu une bonne partie de rigolade.

La juge lui demande s’il était au courant que F. avait d’autres armes à sa disposition, W. lui répond que non. 

S’agissant de la volonté de F. de passer le permis de chasse, W. se rappelle en avoir parlé avec lui, pour des questions d’autonomie alimentaire. La juge cherche à savoir si F. a sollicité W. pour qu’il l’aide à obtenir une arme, il répond que non. 

Elle lit une sonorisation qui aborde le sujet du permis de chasse de F. et du choix de la meilleure arme « pour tuer des poulets », W. répond que c’est une blague, F. ne restant pas souvent sérieux plus de 5 minutes, mais qu’il s’agit d’acheter de quoi chasser le sanglier et du gros gibier. Elle souligne que dans cette conversation ils paraissent déçus de ne pas avoir les moyens d’acheter une arme adaptée, W. répond « qu’en général, on veut ce qui coûte le plus cher ». F. fait une blague sur la Turquie et dit qu’il va « aller à la source pour s’en procurer une ».

La présidente mentionne un appel téléphonique au sujet du permis de chasse que F. aurait faite précédemment chez l’armurier le 5 juin.

Puis la juge demande à W s’il sait si F. a acquis une arme, W. répond qu’il ne sait pas.

Elle cite une conversation avec B. au sujet de l’achat d’une arme pour F., un fusil à pompe, d’un montant de 300 à 400 euros « à la louche ». Elle s’étonne que F. envisage d’acheter une arme avant d’avoir obtenu son permis de chasse, W. explique que c’est parce qu’il s’agissait d’une très bonne affaire (plusieurs centaines d’euros de réduction). B. aurait acheté l’arme pour F. mais a souhaité la garder car il l’aimait bien et s’y était habitué au stand de tir.

Le juge demande à W. s’il était au courant que L. avait fait des rencontres airsoft et s’il avait connaissance des ateliers avec M. et L. : « Non. »

Devant le JI, W. aurait dit de ses camarades qu’ils étaient des « mauvaises fréquentations », ce à quoi W. répond : « Ce n’est pas lui qui a apporté le bordel dans ma vie, c’est l’enquête de la DGSI qui a foutu le bordel dans ma vie ».

La juge aborde « L. et son petit délire survivaliste » et demande si son souhait était de former de petits groupes survivalistes. Elle cite des morceaux de conversation portant sur l’autonomie, un possible crack boursier, le souhait d’occuper une ferme abandonnée, ce à quoi W. répond que dès qu’ils regardaient les informations, ils voyaient des gens « s’entretuer pour du PQ ». 

W. confirme qu’il y avait bien un projet de vivre en autonomie alimentaire et de faire des activités, mais que le reste relève du délire lié au confinement et à ce qui se passait alors dans le monde.

Avec le Covid et le confinement les prix de l’immobilier ont flambé, et il leur était impossible de trouver un terrain ou une bâtisse de l’ordre de ce qu’iels cherchaient. 

Juge assesseuse de droite : 

JA : « F. parle beaucoup de Rojava. Comment passe-t-on du récit à une mise en situation ? » 

W. : « Je ne comprends pas la question ».

La juge cite des déclarations de So. sur le fait « d’apprendre à se déplacer », du fait que F. « était fan de tout ça », « voulait qu’on fasse ses entrainements », « était obnubilé par les armes ». 

W. déclare que cela ne reflette pas du tout ce qu’il a vécu et regrette qu’elle ait vu les choses comme ça. 

Procureure : 

Elle se demande pourquoi faire toutes ces démarches pour obtenir l’autorisation d’une chasse gardée et sous-entend que c’est bizarre.

W. lui rétorque que non, et la remet à sa place en lui expliquant les réalités de la campagne, il ne souhaite pas s’attirer des problèmes en déclarant son terrain « réserve interdite à la chasse » (provoque l’hostilité des chasseurs), il évoque la nécessité de pouvoir chasser les nuisibles sur son terrain, et sa volonté de pouvoir être auto-suffisant en viande.

La proc lui demande quel investissement financier cela représente, autant d’armes !

Il répond que ça ne lui a pas couté très cher, environ 600€, que la plupart de ses fusils ont été donnés ou achetés d’occasion, pas cher du tout. Il se rend à des bourses aux armes et cherche chez les antiquaires.

Elle lui redemande combien de fois par semaine il s’entraîne au tir, même réponse, une à deux fois par semaine.

La proc évoque une conversation entre F., M., et L. au sujet des armes et de la chasse, W. rétorque qu’il n’était pas au courant.

Des soupçons sur la volonté de F. de se procurer une arme alors qu’il serait végétarien : W. estime que si F. cherchait à obtenir une arme sans vouloir chasser, alors il n’aurait pas besoin du permis de chasse,

Il est beaucoup moins coûteux d’aller s’entraîner au stand de tir, c’est donc qu’il s’intéressait à la chasse.

La proc cite alors une sonorisation sur la crainte de la montée du fascisme, W. rétorque que cela n’a aucun rapport, qu’en aucun cas il n’est question de s’armer pour tirer sur des gens.

Elle cite un extrait de conversation entre F. et C. au sujet des parties d’airsoft où F. évoquerait un « partage de connaissances » et ferait le lien avec le Rojava, ce à quoi W. répond qu’il n’y a pas eu de debriefing après les parties d’airsoft et qu’à ses yeux il n’y avait pas de notion de partage d’une expérience particulière.

Au sujet des séances de tir, avec F. ce n’est arrivé qu’une seule fois, parfois W. en faisait tout seul.

La proc cite à nouveau les propos de So. et Ma. sur le fait qu’il s’agissait « d’entraînements paramilitaires », que « tout tournait autour de ça ». Cela semble totalement disproportionné aux yeux de W. qui rappelle que les parties d’airsoft ont eu lieu sur seulement une après-midi. 

Elle insiste et se questionne sur le fait que Ma avait deviné que c’était F. qui avait été arrêté le 8 décembre 2020.

Avocate

L’avocate prend la parole et insiste sur le fait que W. est extrêmement attentif aux questions de sécurité s’agissant de la pratique du tir. 

A la question de savoir pourquoi il pratique le tir, W. répond que ça le détend, qu’il est dans sa bulle, se concentre et qu’il aime ça. Il pratique le tir au stand de tir avec un gendarme, qui préside l’association. Il pourrait avoir fait des démarches pour avoir accès à des armes de catégorie 2 mais cela ne l’intéresse pas.

Le 12 mai 2020, jour du déconfinement, W, F, et B se rendent au bar, font du lèche-vitrines. Ils font un tour à l’armurerie et B acquiert une carabine à poudre noire de 1820. Sur les sonorisations on entend parler de « gratter le numéro de série avec une pièce », W. rétorque que cela n’a aucun sens, on ne parle pas de fusil, ce n’est même pas son calibre, et en aucun cas on ne peut gratter un numéro de série d’une arme avec une pièce.

Sur la question du survivalisme, le  25 mars est « le début de la fin du monde », l’autonomie revêt un caractère pacifiant. Il est question d’acheter un terrain sur lequel faire un potager, avoir l’accès à l’eau, vivre en collectivité et en autosuffisance. L’avocate souligne le fait que cela n’a aucun rapport avec une AMT.

Sur les déclarations de So., W. répond qu’elle n’aime pas du tout les armes, ni les douilles qu’il lui offre. (il a l’habitude de récupérer des douilles usagées et d’en offrir à tout le monde).

« Si on fait le décompte des activités de gauchistes machiavéliques au long du séjour on compte 3 jours de pétards et 1 jour d’airsoft. » déclare-t-il pour remettre un peu les choses à leur place.

Me Bouillon : 

Lors de la GAV, la DGSI a affirmé que l’élément de roquette (tubulaire) servant d’élément de décoration chez vos parents se trouvait chez M. Fraga. Lors de sa perquisition, des armes ont été retrouvées dans le matériel d’airsoft. Vous lui avez-vous prêté ? 

On apprend là qu’un élément de lance-roquette de collection a été laissé pendant la perquiz chez ses parents, puis, avant de partir, un gradé de la DGSI a dit : « Prends, ça peut toujours servir », et que des agents de la DGSI ont utilisé cette « saisie » pour prétendre lors d’une GAV que cette arme avait appartenu à F. et qu’il l’avait stockée chez quelqu’un. W. déclarera : « C’est honteux, c’est ce que j’appelle une barbouzerie ». 

Me Bonaglia : 

Sur la question de posséder un permis de chasse, il est indispensable y compris pour chasser les nuisibles sur son propre terrain. 

Me Meyniard : 

Elle dit que W. est passé d’un monde urbain au monde rural, et qu’il a découvert le monde de l’élevage.

Elle évoque une autre barbouzerie. W était visé par une enquête du SNEAS : il avait écopé d’une condamnation il y a longtemps pour la défense de la cause animale, le SNEAS trouvait ça étrange qu’il obtienne un permis de chasse et a demandé à ce que ses armes lui soient retirées. La DGSI a alors donné pour instruction de ne pas lui confisquer ses armes. C’est à la fois la preuve qu’il n’était pas considéré comme dangereux par la DGSI, mais aussi que la DGSI avait besoin que des armes soient présentes dans le dossier pour habiller les arrestations prévues plus tard.

JEUDI 12 OCTOBRE

En passant

12/10

L’audience aujourd’hui porte sur la questions des « explosifs » (aussi appelés « pétards »).

WILLIAM

La présidente resitue le contexte en précisant que W. est présent à Parcoul, et cite les personnes présentes à ce moment-là, en avril 2020. Rapidement, elle pose une question qui démontre un parti pris, celui de l’instruction : essayer de mettre à jour un lien entre F et les essais d’explosifs : « Est-ce que vous estimez qu’il y a un lien entre l’arrivée de F. et le début des essais, comme vous l’avez dit en garde à vue ? »

W. précise que non, il n’y a pas de lien avec F. mais que c’est plutôt lié à la vidéo du bateau (un petit bateau en bois brûle sur la rivière avec de la musique style symphonie. Des fusées et pétards partent dans les flammes, très drôle et très amateur :), le tout avec des rires, des chiens qui passent et un commentaire de la personne qui filme « c’est naaaaaaaaaze » ) lien pour voir la vidéo ICI. Il ne se rappelait plus l’élément déclencheur du bateau, cela lui est revenu plus tard. C’est le confinement, il n’y a plus de pétards pour finir de couler le bateau de manière plus glorieuse et iels décident de fabriquer elleux-mêmes des pétards.

Il se saisit de la question de la présidente pour répondre sur les conditions de la garde à vue, et la valeur à accorder à ses paroles dans ce cadre. Il explique que les flics lui ont mis une grosse pression, en off, c’est à dire en coupant la vidéo, en lui disant que F. « était en train de faire de la merde » et qu’il fallait balancer un maximum contre lui pour s’en sortir. Ils ont des moyens de pression : W. dit qu’il manque de courage, qu’il veut voir son grand-père agonisant, qu’il veut voir son chien. Il revient sur la plupart de ses déclarations. Notamment à la question « Est-ce que F. est un leader charismatique ? ». A ce moment-là, il se rend compte que la DGSI veut la tête de F.

La juge oriente ensuite sur la préparation : qui apporte le matériel, qui est à l’initiative des recherches de recettes d’explosifs, qui a le savoir-faire, en orientant encore les suspicions vers F. W. rappelle qu’il s’agissait de faire des pétards, de manière ludique, que l’ambiance était bonne, que c’était sans malice, et plutôt dans une idée féstive suite à la vidéo du bateau. La durée approximative des essais a duré 2-3 après-midi. Que tout le monde allait et venait sur ces tentatives, qu’ils tâtonnaient, ne savaient pas faire, qu’ils ont cherché et trouvé sur internet.

La juge lui fait remarquer que ça aurait été préférable de le dire avant, pendant l’instruction. Elle fait une remarque sur le fait qu’elle comprend que les conditions ne sont pas les mêmes pendant l’instruction, et que bon, « Mieux vaut tard que jamais… » sympa !

Le garage sur le terrain contenait des produits, notamment de l’acétone et de l’acide. Pour ce qui est de la recette nitrate sucre, W. en a déjà entendu parler dans le monde paysan, il n’est pas surpris. 

Elle cite les auditions et lui demande pourquoi étant le seul intéressé par la pyrotechnie (évocation d’une possible formation qui ne s’est jamais faite), il est aussi le seul à n’avoir pas assisté à l’essai final :

« A la base, on confectionnait des pétards, il y a eu des échecs répétés. Quand ça a réussi j’étais avec les chiens, le gros boom, j’ai cru qu’ils étaient tous morts et ils sont revenus tous choqués, ça m’a surpris, le bruit était intense ». Il explique qu’il commençait à se lasser des essais ratés et étant « mono-maniaque de la sécurité », c’était un peu trop « bidouille » à son goût. Il s’en est désintéressé et a préféré aller s’occuper des chiens à ce moment-là. Si cela avait été une question de danger, il n’aurait jamais laissé ses ami.es prendre le moindre risque et les en aurait dissuadé.es.

« Iels rentrent comme des gamins qui ont fait une bêtise et qui se sont faits peur ». 

La présidente l’emmène sur le fait qu’iels n’aient plus discuté du sujet et cherche à savoir s’il y a eu un accord entre elleux pour ne plus en parler. W. explique qu’un accord tacite de passer à autre chose et de ne plus reparler de cet épisode a semblé alors évident à tous.tes.

La juge l’interroge sur les étapes de la recette, W. lui répond que 4 ans plus tard il ne se rappelle plus, ni des circonstances de recherche de la recette, ni des étapes de fabrication. Il se rappelle juste qu’une douille récupérée au stand de tir leur a servi de récipient pour y mettre le résultat final (quantité approximative 2g). 

La juge évoque le fait qu’il voulait faire une formation d’artificier mais qu’il avait évoqué avec S.P. des difficultés administratives.

La présidente relit les déclarations de S.P. en GAV sur la question de l’allumage des cristaux dans des douilles et sur le fait d’avoir le temps de s’éloigner, réflexion à laquelle W. participe. Mme P. dit avoir agi par « effet de groupe ».

La présidente demande si tout le monde se sentait obligé de participer aux activités, W répond que pas du tout, ça allait et venait.

La présidente utilise les déclarations de S.P. pour demander si c’était lourd que F parle régulièrement du Rojava et elle oriente ses questions sur le lien entre sa présence sur une zone de guerre et la fabrication d’explosifs.

W. répond qu’il n’y avait aucun rapport entre les deux, et qu’il n’a jamais posé de questions sur l’expérience de F. au Rojava par pudeur.

Sur les propos de H. en GAV, la présidente cite « la cérémonie du bateau » et cherche à savoir pourquoi l’histoire du bateau n’est pas arrivée plus tôt.

Assesseuse 1 : 

L’assesseuse cherche à savoir comment étaient fêtés les évènements au cours de ce mois et cherche une raison précise à cet épisode du bateau.

Puis elle lui demande ce qui lui a fait peur, W. répond que c’était des bidouillages à l’arrache avec des recettes que personne ne maîtrisait.

Elle lui demande s’il a cherché à trouver des recettes de pétards auprès d’amis pour son projet professionnel, W. répond que non, pas du tout. Au passage, elle se trompe dans sa question et commence par « Vous aviez un artificier avec vous… » puis elle se reprend et se corrige. Elle mélange tout.

Elle lui demande s’il connaissait le TATP, W. répond qu’il ne connait pas le mot TATP et qu’il ne se souvient plus des mots-clés utilisés lors de la recherche sur internet.

Procureure : 

Elle lui rappelle que ce n’était pas sa première garde à vue et qu’il avait été assisté d’un avocat à chaque audition. W répond que ce n’était pas le meilleur.

Elle le décrit comme étant quelqu’un qui paraît très soumis en GAV et cite ses réponses. W répond qu’il était très inquiet pour son chien, que le flic lui en donnait des nouvelles, qu’il était perdu.

La proc cite ses réponses aux auditions devant le JI, à qui W. avait répondu qu’il avait donné noms et adresses et qu’il souhaitait sortir de prison.

Puis elle lui rappelle ses propos sur F. et lui demande qui il est pour lui, « un leader charismatique », s’il a « l’âme d’un leader ». W. répond qu’il s’est déjà exprimé là-dessus, qu’il regrette ses propos qui ont été prononcés parce que c’est ce que le JI avait envie d’entendre et qu’il est aujourd’hui désolé de ce qu’il a dit.

Sur la fabrication d’explosifs, la proc tente de souligner des contradictions entre ses propos en GAV et ses propos actuels sur le caractère festif de ces essais. Elle tente aussi de le piéger sur les propos qu’il aurait tenu sur F. qui aurait été présenté comme le « leader », celui qui donne les instructions. W. rétorque que sur les écoutes on entend clairement que c’est collectif et que tout le monde tâtonne, mais qu’en GAV il cherchait à se dissocier de F. par crainte d’aller en prison.

La proc lui demande d’où venaient les mèches. W. répond que ce sont les siennes, il en avait aussi utilisé pour le bateau.

Elle lui demande alors son degré de connaissance au sujet de l’utilisation d’une spatule en bois pour mélanger des produits chimiques (elle cite une sonorisation), il lui répond que c’était juste de la déduction, de la logique.

La procureur lui ressort encore une fois ses antécédents judiciaires en faisant un parallèle et en mettant en perspective sa déclaration de rester dans la légalité et de ne plus manipuler de produits dangereux. Elle parle d’explosifs, W. lui répond : « J’ai toujours appelé cela des pétards » et lui rappelle, à sa demande,  qu’il n’y avait pas d’explosifs lors de sa condamnation en 2010.

Elle le reprend alors « des explosifs, les mots ont un sens ! », elle en profite pour lui demander s’il est conscient que la manipulation d’explosifs en droit commun peut mener à une peine de 10 ans. 

L’avocate prend la parole : « W. a toujours utilisé le terme pétards ! ».

Questions de l’avocate (Bonvarlet): 

Elle lui demande si c’est sa première GAV anti-terro et s’il en a été informé dès le début.

– « Oui, avec un fusil d’assaut sur la tempe, c’est la panique à tous les étages, je suis terrorisé ».

W explique que son monde s’écroule.

Puis l’avocate le questionne sur le moment « off » en GAV. W. explique que les caméras sont éteintes, que l’inspecteur lui avait dit que F. était « sur le point de faire de la merde », et que son avocat commis d’office lui conseille de balancer le plus possible car il risque 15 ans de prison.

– « A ce moment-là, on vous ment. Quelle valeur ont des déclarations faites suite à une manipulation ? » 

– « Aucune ».

L’avocate revient sur l’épisode du bateau. Elle revient aussi sur les points de vocabulaire entre le terme « pétard » et « explosif ». 

Elle lui demande où se passent les essais, lorsqu’ils jouent avec un briquet, et s’ils ont vraiment conscience du danger, W. répond qu’ils ont lieu dans le camion de F. et dans le jardin à proximité, et qu’ils n’ont pas vraiment conscience du danger.

L’avocate rappelle que l’expert prétend qu’il faut une connaissance incroyable pour la fabrication de tels produits, et qu’il y a 4 chances sur 5 de faire brûler le mélange avant l’étape finale. Ce qui est arrivé.

Elle revient sur l’utilisation de la spatule en bois préconisé par W. alors que F. proposait en métal. Cela prouve bien que F. n’est pas spécialiste.

Questions Me Kempf : 

– « Définissez l’association de malfaiteurs terroriste »

– « Si peut-être on a l’idée de faire quelque chose on se fait arrêter ».

– « Ca c’est une définition critique. Quelle est la définition juridique ? »

– « Je ne sais pas donner de définition de l’AMT ».

– « C’est important de savoir pourquoi on est arrêté, mais même moi en droit je ne sais pas ce que ça veut dire… »

Puis il lui demande de revenir sur les conditions de son transport à Levallois-Perret. 

W. décrit : « de Plestin à Rennes, on m’a mis une camisole et une cagoule sur la tête. En train de Rennes à Paris pareil, camisole et masque de ski opaque, les gens étaient un peu flippés… »

Sur ces conditions de GAV: « Toute petite cellule, hyper glauque, toilettes, caméra, température en dessous de 19°C,  pas de lumière du jour, pas d’heure. Les lumières s’éteignent dans le couloir quand il fait nuit. Juste un jus d’orange au petit dej. On m’a donné un avocat commis d’office mais j’étais dans la paranoïa, je ne savais pas si je pouvais lui parler. Le fait d’être en GAV à la DGSI accusé de terrorisme m’a plongé dans un délire psychologique ».

– « Pourquoi avez-vous refusé de signer vos 4 premières dépositions ? »

– « Pas d’explication rationnelle »

– « Pourriez-vous définir ce qu’est une commission rogatoire ? « 

– « Je ne sais pas »

– « Comprenez-vous les faits reprochés ? Vous souvenez-vous de votre réponse ? « 

– « Non »

Kempf cite la réponse : « Je comprends le sens mais pas en quoi ça me concerne ». 

Au sujet de la pause technique lors de l’interrogatoire : « La DGSI m’a menti en me disant que F. allait « faire de la merde ». Kempf souligne que cela remet potentiellement en cause la légitimité de l’officier de police.

– « C’est ma parole contre la leur vu que c’était en off »

– « Le policier avait des nouvelles du chien, ce n’est pourtant pas mentionné dans les PV. »

– « Non, c’était dans les couloirs, avant de commencer. »

– « Pas de cigarettes alors que vous en demandiez ? « 

– « Non »

– « Vous êtes dépendant. Comment avez-vous réagi au sevrage ? « 

– « J’étais très stressé »

– « Le policier vous a-t-il tutoyé ? »

– « Tout du long. »

– « Pourtant le code de déontologie l’oblige à vous vouvoyer ».

La présidente intervient : 

– « Cela m’interpelle que vous doutiez de l’avocate commise d’office ».

– « J’étais en parano, dans un environnement que je ne connaissais pas, je ne savais pas en qui je pouvais avoir confiance ».

BASTIEN

La juge rapelle que B. a été placé en GAV avec les autres, qu’il a assez rapidement pris le parti de  s’exprimer sur un certain nombre de points, mais qu’il y a des moments de silence sous le coup de l’émotion. Elle précise aussi qu’il était sans avocat tout du long de la GAV, et qu’il a beaucoup pleuré.

B. dit qu’il était paniqué, qu’il ne comprenait pas ce qu’il faisait là : « J’ai beaucoup pleuré en GAV. J’ai demandé à voir un médecin pour mon traitement, que je n’aurais jamais au cours de la GAV. »

La juge rappelle que B. s’est expliqué sur les armes en sa possession, les gens qu’il fréquentait et son séjour à Parcoul.

La juge rappelle que B. a passé une longue période dans ce moulin, qu’il s’y installe avec plusieurs personnes. Elle lui demande par rapport à F., il n’était pas prévu dans ce projet, qui l’avait invité ? Il répond que c’est W., de son côté il ne le connaissait pas, il le rencontre à Parcoul pendant le confinement.

La juge lui demande de resituer les essais d’explosifs. Il se rappelle que c’est après le bateau et après l’arrivée de F.et C.

La juge revient sur ses auditions à la DGSI. Il rappelle que beaucoup de réponses ne viennent pas de lui, il est tétanisé. Il rappelle que tout était concentré sur F., on lui parlait uniquement de sa dangerosité. Il est alors téléguidé dans ses réponses par ce que lui disent les OPJ en face de lui. « En off on m’a dit que F. avait été arrêté le doigt sur la gâchette. Je voulais me détacher de lui et sauver ma peau. »

La juge l’interroge sur les feux d’artifice, si ça le passionne. B. lui répond que ce n’est pas sa passion mais qu’il aimait bien les pétards, de manière ludique.

Elle l’interroge alors sur les méthodes utilisées, la recette pour les essais qui concernent la « pâte marron », demande dans quel ordre les choses ont été testées.

B. lui répond qu’il y a eu plusieurs essais, il ne se rappelle plus très bien, c’était il y a 3 ans. Tout le monde était libre, allait et venait, peut-être qu’il y avait aussi en parallèle le séchage pour les cristaux. Pour la recette du détonateur, il y a eu des recherches collectives mais il ne se rappelle pas de plus. « Pour nous, on faisait des pétards, à côté de nos habitations, avec les chiens autour. On avait pas conscience de faire quelque chose de dangereux. » Il rappelle qu’iels cherchaient à s’occuper, à tuer l’ennui, pendant le confinement.

La juge s’interroge sur la provenance des pétards du bateau, B. lui répond que c’était des vieux pétards qui traînaient. Elle insiste alors sur le lien entre le bateau et la fabrication qui a suivi. B. n’a pas de souvenir d’une conversation qui a mené à ça, mais reste persuadé qu’il y a un lien direct. Il rappelle qu’iels ont passés un mois à faire des activités dans tous les sens, iels ont déliré, se sont bien marré.es et ont réparé plein de trucs.

Elle revient ensuite sur ses déclarations en GAV (toujours), au sujet « d’une grosse détonation, j’étais pas bien du tout, j’ai fait semblant d’être content, F. fanfaronnait ». Il répond qu’il a été impressionné par le bruit et l’écho dans la vallée, il pense que tout le monde a en fait donné le change. Il relativise aujourd’hui en disant qu’il n’y avait pas de cratère ni de dégâts à l’endroit de l’explosion. « Sur le chemin du retour on s’est dit que c’était trop dangereux, qu’on referait jamais ça ».

Elle lui demande alors pourquoi personne n’a sonné la tirette d’alarme? Il lui répond que c’était du jeu et de l’insouciance.

La juge lui parle alors des scellés de son camion et des billes retrouvées. Il explique alors que c’est pour le tir à la poudre noire. Il a le carnet avec la facture et le permis nécessaire. Il ne comprend pas pourquoi cela a été envoyé en expertise explosif et non à l’expert armes. Cela concerne une arme tout à fait légale.

Comme un leitmotiv, la juge revient toujours à ses déclarations en GAV, alors qu’il n’a de cesse de dire de ne pas les prendre en compte. Il redit que toutes les questions portaient sur F. Il a mis beaucoup de temps à remettre en place ses idées, même après la GAV. Quand les questions sont posées de manière très orientée, avec le stress de la GAV, c’est dur d’être cohérent dans ses réponses.

« Je voulais me dissocier de cette personne, c’était un réflexe pour me protéger, de l’autodéfense ».

Assesseuse blonde 

Elle lui demande si il est d’accord avec Will sur le fait que la DGSI a chargé F. Bastien acquiesce.

« Je le connais sur seulement un mois passé ensemble. Je l’ai chargé en GAV et je ne pense pas ce que j’ai dit. Par exemple je leur ai dit que je ne lui confierais jamais ma chienne. C’est complètement faux, je lui confierais ma chienne les yeux fermés ».

A « Donc vous le connaissez ? « 

B « En 1 mois je ne pense pas qu’on puisse connaître quelqu’un ».

A « Donc vous avez dit des mensonges à la DGSI ? »

B « J’ai dit ce qu’ils voulaient entendre ».

A « Ce qui était vrai ou non ? « 

B « Je n’en sais rien ».

A « Merci ».

Procureurs

B. refuse de répondre aux questions, il fait une déclaration spontanée à la juge pour l’en avertir.

La proc se lance alors dans une salve de questions sans réponses :

Quelques extraits : « mauvaises personnes », « martyr », « connaissance explosif et sniper », « essai près d’une falaise »…

Le procureur de son côté lui demande :

« Vous vous évertuez à dire que vous vouliez fabriquer un pétard, je viens de faire la recherche sur le net et le résultat c’est de la poudre noire, mèche et rien d’autre. »

B. reste face à la juge, imperturbable.

Avocats 

Son avocat lui demande de revenir sur sa GAV avec ses mots :

« Je me suis fait arrêter à 6h du mat, ils m’ont plaqué contre le mur, fusil d’assaut sur la tempe. Je suis resté en caleçon, tout le temps de la perquisition de mon camion, dehors, en décembre. On m’a camisolé, on m’a emmené à l’hopital pour vérifier mon état puis de nouveu camisole et direction la gare. J’étais avec L. Ils nous ont changés de wagon parce que les autres usagers étaient terrifiés.

L. m’a demandé si ça allait, j’ai rien répondu, j’étais tétanisé. On nous a emmené ensuite à Levallois-Perret avec une cagoule sur la tête. J’ai subi la première audition puis on m’a donné mon premier repas dans la nuit (à jeun depuis plus de 24h, sans boire non plus). A la fin de ma 3ème audition, j’ai fait un gros malaise, j’avais des douleurs très intenses dans les bras. Les pompiers interviennent, ils parlent du syndrome de l’accoucheur, on me donne de l’Atarax, c’est un anxiolytique, je suis complètement déboussolé et défoncé. L’audition reprend. Dans la cellule il fait froid, il y a une lumière artificielle constante, on ne sait pas quel jour on est. Je ne me rappelle plus toutes les questions qui me sont posées, c’est très orienté sur les idées politiques. C’est le même OPJ tout au long de mes auditions, il me dit qu’il m’écoute depuis 8 mois, qu’il me connait, il essaye même de reprendre notre humour à Will et moi. 

Devant le JI je n’ai pas changé de discours parce que je me sentais bloqué par mes propos tenus devant la DGSI. »

MERCREDI 11 OCTOBRE

En passant

11/10

L’audience commence par l’annonce d’un changement de programme:

    – avant de faire intervenir l’expert, la présidente souhaite d’abord entendre tous.tes les inculpés au sujet des explosifs.

    – la journée de jeudi sera consacrée aux armes.

    – les outils de communication cryptées et « projets »ne seront pas traités avant mardi prochain (17.10).

FLO

La présidente appelle ensuite F. à la barre. Elle commence par lui demander comment il a renoué les liens avec S.

F. explique qu’il avait un peu coupé les ponts avec le milieu squats/collectifs/etc. dont S. faisait partie. Quelqu’un lui a dit que S. souhaitait le revoir pour parler du Rojava, ils se sont donc vu en décembre (2019). Lors de ces retrouvailles ils ont parlé de tout et notamment de faire des essais ensemble. F. assume qu’il avait une recette qu’il n’avait pas encore essayé. Celle-ci ne venait absolument pas du Rojava – comme S. a pu le dire (il avait lui même parler de quiproquo vendredi dernier)- mais d’une vidéo visionné avant son départ avec un ami agriculteur. De la vidéo F. dit avoir retenu les proportions d’ »amonitrate » et « sucre » via une blague servant de moyen mnémotechnique. 

« Je n’ai pas la même passion que S., mais j’aime bien les pétards. » D’autant que c’est plutôt banal, dit F., même les agriculteurs utilisent ces produits pour désoucher les arbres.

La présidente demande si il y avait une sorte de répartition entre F. et S. sur qui amenait quoi à ces essais.

F. n’est plus certain de comment ils s’y étaient pris. Il se rappele qu’il avait amené des engrais et S. des spatules.

La juge est curieuse du terrain sur lequel ils ont réalisé ces essais, en terme d’isolement et de sécurité.

F. répond qu’il n’y avait pas de maison à moins de 5 km et que quoi qu’il arrive le bruit ne choquerait personne du fait de la présence régulière de chasseurs. Il rappelle aussi que le weekend passé avec S. n’était pas dédié uniquement aux explosifs. Ils devaient aller à la fromagerie, à la coopérative de vin et passer du bon temps ensemble. Il rapelle qu’il n’avait jamais fait ce genre d’essai auparavant.

De la retranscription des écoutes la juge ressort la phrase « c’était quoi qu’on a fait », prononcée par S. Pour elle cela implique qu’ils auraient déjà fabriqué des explosifs. C’est une erreur de la retranscription de la Dgsi déjà soulignée auparavant (écoute inaudible)

En fait non, S. demandait juste la recette que F. sortait de ses souvenirs de la vidéo. La juge insiste sur le fait qu’il aurait pu avoir déjà fait ou essayer avant. F. dit avoir été tenté de l’essayer auparavant mais qu’il n’avait pas revu son ami agriculteur et qu’il avait attendu de retrouver S.

D’ailleurs, depuis l’interrogatoire de S. à la barre vendredi (6.10) F. sait que ces essais étaient légaux puisque vu le métier de S. il pouvait engager sa responsabilité et ses agréments.

La présidente insiste sur une écoute au sujet d’explosions.

F. répond qu’il a parfois eu besoin de parler de ce qu’il avait vu au Rojava et que cela lui faisait du bien d’en parler avec des ami.es. Il fait le parallèle avec l’airsoft qui peut permettre « d’ancrer quelque chose dans un truc ludique ».

L’interrogatoire continue au sujet des essais avec S. La juge s’interroge sur les difficultés rencontrées.

F. répond que l’aspect de l’engrais ne correspondait pas à ses souvenirs de la vidéo et aux explications de son ami à l’époque. Il insiste aussi sur le fait qu’il y a une part de vantardise dans leurs discussions.

Et la juge d’insister; « on a vraiment l’impression que vous aviez déjà fait ou vu faire des explosifs? ». Ce à quoi F. répond qu’il avait simplement vu la vidéo.

La juge poursuit en demandant quelle urgence F. et S. ressentaient pour aller voler de l’engrais à Gamm Vert. Pour F. ce ne sont que des actes de « grands gamins », des « comportements débiles de mecs » se croyants un peu capables de tout. L’engrais utilisé pour les tests ne correspondait pas à celui de la vidéo et ce n’est pas possible d’en acheter en petite quantité (cela se vend à la tonne)

La présidente interroge ensuite F. au sujet des précautions prises autour de ce weekend d’essai, de la façon dont ils en avaient parlé autour d’eux.

Pour F. c’était surtout concernant le vol. En effet il avait envoyé un message à quelqu’un pour dire que si il ne donnait pas de nouvelles le lendemain c’est qu’il y avait un problème.

F. était au courant que S. allait venir en mode « mystère », un peu caché, du fait de la situation avec sa copine.

« Comment s’est déroulé le vol? »

Pour S. l’alcool est redescendu (conduite) et il s’est dégonflé, F. n’avait pas prévu de faire ça seul.

« Aviez vous des craintes au sujet de la compagne de S.? »

Cela avait traversé l’esprit de F., il ne l’avait pas vu depuis des années.

La présidente enchaine sur une question au sujet de l’aide matérielle que F. sollicitait pour envoyer au Rojava.

F. répond qu’il cherchait du matériel en tout genre, notamment du matériel militaire comme des gilets, des protections, mais pas des armes. Il continue en précisant qu’il n’y avait aucun besoin de fournir des armes aux gentes du Rojava puisqu’elles étaient envoyées par les USA…

La juge questionne F. sur l’intérêt de continuer ces essais infructueux et des retrouvailles avec S. et sa copine quelques mois plus tard en juillet. F. précise qu’ils n’en n’ont pas reparlé car il s’était fait peur entre temps avec l’essai fait à Parcoul.

Sur Parcoul (interrogatoire en deux temps) : 

Le séjour s’est fait sur invitation de W.

L’idée était d’améliorer un essai de spectacle proposé par W. pour inaugurer la construction de leur bar au Moulin. C’est un petit bateau qui brûle sur l’eau avec une fusée nautique.

F. dit que c’était juste une proposition, qu’iels n’ont pas fait que ça à Parcoul en un mois.

La vidéo du bateau les a beaucoup amusés mais le résultat était nul, donc iels ont eu l’idée de faire mieux. 

Les essais étaient effectués juste par envie de s’amuser, de jouer, tout simplement. 

« On cherchait à s’occuper pendant le confinement, tout comme on s’occupait des animaux, on sortait faire des balades.

Les essais de Parcoul m’ont fait peur ».

La question est posée sur des recherches effectuées pour fabriquer un détonateur. F. répond que la recherche s’est faite sur internet mais qu’il ne se rappelle plus, iels étaient plusieurs dans la coloc du Moulin. M. était plutôt à part.

L’interrogatoire se poursuit au sujet de la mise en œuvre. 

Un premier essai a été effectué en mélangeant de l’ammonitrate avec du sucre, le mélange s’est enflammé.

Un second essai a été effectué et ressemblait plus à ce qu’on voit sur la vidéo.

Iels recherchent ensuite de quoi faire détoner le mélange, ce qui a mené à des recherches sur internet où une recette a été trouvée, composée d’oxygène, d’acide et d’acétone.

F. décrit ces essais comme des moments de rigolade, et les compare à « une bande de mômes ».

Néanmoins, iels ont fini par réaliser la dangerosité de ce qu’iels étaient en train de faire. Iels étaient dans l’amusement mais aussi inconscients.

La juge insinue que F. donne les instructions et lit une retranscription. F. Lui fait remarquer qu’elle a choisit ce passage mais qu’iels prennent tous l’initiative à tour de rôle. Iels font même un chifoumi

F. se retourne pour regarder W. dans la salle, il est repris par la Présidente. 

Il affirme qu’iels ne savaient pas exactement ce qu’iels faisaient, au cours des étapes des cristaux apparaissaient comme dans les recherches qu’iels avaient effectuées. Iels avaient beau savoir que c’était potentiellement dangereux, sur le moment iels n’avaient pas pleinement conscience du degré de dangerosité de ce qu’iels faisaient. 

Kempf fait remarquer que dans les nouveaux passages cités ce n’est plus F. qui donne les instructions.

Encore une erreur de retranscription des sonorisations, l’un des protagonistes étant surnommé « Melvil » alors qu’il s’agit tout simplement de « mais Will… »

Au sujet du lieu des essais : 

Les essais de détonateurs auraient eu lieu à proximité des camions. L’essai final avec le mélange et détonateur aurait eu lieu près de la forêt (500m de la maison).

L’interrogatoire se poursuit au sujet de prétendus «gilets balistiques ». Il n’a jamais été question de gilets balistiques mais de lunettes balistiques, indispensables lors de la pratique de l’airsoft et qui, dans ce cas permettait juste de se protéger les yeux. F. rapelle que dans le rapport du Pnat ces lunettes balistiques, changés en gilets balistiques au cours de la retranscription de la Dgsi sont alors qualifiés de « gilets explosifs » !!

S’agissant des quantités de produit utilisées, cela reste approximatif, mais se compte en grammes et en millilitres. 

Puis les questions portent sur la « grosse » explosion, afin de comprendre comment elle a eu lieu. F. explique que c’est lorsque le détonateur a fonctionné avec le mélange d’amonitrate. Tout le monde était présent sauf W. et M.

L’interrogatoire en vient à la fabrication de TATP : F. affirme ne jamais avoir entendu ce terme avant la procédure mais se souvenir uniquement des trois produits utilisés pour la fabrication, qui sont des produits courants que l’on peut trouver dans toutes les maisons. 

A aucun moment il n’a parlé de ces essais à S. parce qu’il a eu peur et qu’il ne voulait pas en parler pour son ego. La juge feigne ne pas comprendre et lui fait remarquer qu’il en parle aujourd’hui devant ce tribunal. F. Lui rétorque que les enjeux ne sont pas les mêmes aujourd’hui.

Les personnes présentes étaient à environ 50 mètres de l’explosion, qui les a surprises et leur a fait peur. L’explosion n’a pas fait de dégâts (pas de cratère ni d’arbre abîmé), mais s’est posée la question de ce qui aurait pu arriver s’iels avaient été plus près. Chacun.e est parti.e dans son coin après cet essai. Nous avons décidé que nous n’en parlerions à personne et ne donnerions pas la recette, car cela les rendrait responsable de ce qui pourrait éventuellement se passer. 

A la question de savoir pourquoi ne pas s’être débarrassé du matériel par la suite, F. répond qu’il ne souhaitait plus y penser mais qu’il aurait dû le faire.

Questions du procureur : 

Le procureur demande s’il s’agissait de transmettre un savoir acquis au Rojava, ce à quoi F. répond qu’il n’a rien appris à ce propos là-bas.

Le proc cherche à savoir combien de temps ont duré les essais et combien il y a eu d’échecs. F. ne peut répondre précisément, car iels ont vraiment tâtonné. Le proc fait remarquer que l’explosion était impressionnante, ce à quoi F répond que c’est surtout le bruit de l’explosion qui l’était.

Le proc cherche à savoir si F a cherché à importer un savoir au sujet d’explosifs à son retour du Rojava. Ce à quoi F répond que non, il ne cherchait absolument pas à partager un savoir militaire mais plutôt son expérience sur un plan politique. 

Le proc cherche à comprendre d’où lui vient son expérience, F explique qu’il est simplement bricoleur et a le sens de la logique.

Sur le vol d’engrais, le proc demande si c’est lié au fait de ne pas pouvoir en acheter autrement qu’à la tonne, et pour ne pas être remarqué à acheter du nitrate sans être agriculteur, ce à quoi F répond que non.

Il lui demande combien il en a volé, « un sac à dos ».

Le proc fait remarquer que F utilise un vocabulaire « professionnel » en parlant de « protocole », de surveillance, ce à quoi F répond que c’est pour impressionner.

A la question de savoir pourquoi il avait gardé le matériel, F répond que son camion est sa maison, qu’il y a toutes ses affaires dedans.

Le proc fait remarquer qu’à son arrivée à Parcoul les essais débutent rapidement, ce à quoi F répond qu’il s’est passé une semaine entre son arrivée et les essais et qu’iels ont aussi arrêté très rapidement.

S’agissant  de son rôle, le proc désigne F comme étant quelqu’un qui donne des instructions, ce qui contredit ses déclarations affirmant que c’était participatif. Le proc souligne des incohérences avec les déclarations d’autres prévenu.es, F souligne qu’il a donné la recette mais que toustes ont participé.

Sur le fait que l’explosion a surpris et « tétanisé » tout le monde, F reconnaît qu’il a été très surpris et a pensé à ce qui aurait pu arriver si l’explosion avait eue lieu dans un moment incontrôlé.

Le procureur l’amène sur les discussions autour de la « cause », du Kurdistan, et essaie de faire le lien avec les essais d’explosifs. F répond que cela n’a rien à voir. Le proc lit des écoutes, F répond que ce sont là des discussions de gens bourrés, qui « refont le monde » complètement alcoolisés.

Au sujet d’un concert de soutien au Rojava, le proc parle de détournement d’argent pour acheter des armes. F répond que c’était uniquement destiné à acheter du matériel médical et militaire mais certainement pas des armes, puisqu’iels en ont déjà.

Questions Me Bouillon : 

Elle rappelle qu’avant Paulnay (rapport de judiciaire action du 7/02/20), aucune écoute ou surveillance n’est en lien avec les explosifs (Krav maga et air soft dans le rapport). Entre avril 2020 et les arrestations, de nombreuses conversations dans le camion sonorisé mais aucune au sujet des explosifs.

L’avocate lui demande de raconter le vol : j’ai enjamber un petit muret, je me suis rendu sous le préau et j’ai rempli l’engrais depuis le big bag vers mon sac à dos.

Elle revient sur le fait d’evoquer l’appel à un avocat. F. Répond que c’est courant dans les milieux militants lors d’une manifestation ou ouverture de squats.

Elle l’interroge ensuite sur le type d’explosif qu’il a pu observer au Rojava. F.explique qu’il n’a jamais vu la fabrication ni la composition de ceux ci mais a Raqqa, pour éviter les mines posées par Daesh certains explosifs étaient utilisés en prévention lors d’avancée tactique. Ils devaient être composés de poudre métallique car après explosion une poudre de métal brillante se répandait partout.

Questions Me Kempf : 

Me Kempf demande à F s’il se souvient de la nature des questions qui lui ont été posées en GAV, ce à quoi F répond qu’elles portaient essentiellement sur ses opinions politiques, et qu’il pensait que cela outrepassait les lois de juger les gens sur leurs idées politiques. 

Au sujet de l’article de Mediapart (2019), F dit s’être senti désigné et criminalisé. Et surtout il pensait à l’époque que son séjour au Rojava était illégal et n’a appris que plus tard que légalement parlant ça ne l’est pas. 

Kempf demande à écouter des extraits audio pour rétablir la réalité de certaines retranscriptions, la juge ne fait aucun effort et se plaint de rien entendre. La Défense lui demande alors comment rétablir la vérité au sujet des erreurs de retranscriptions. Elle demande donc (saoulée) à la Greffière de prendre note de ces modifications. 

Est souligné le fait qu’à Paulnay, 554 enregistrements ont été effectués et seulement 29 ont été retranscrits depuis le camion. Au cabanon, 5,23% des enregistrements sont retranscrits, et à Parcoul, seul 1,13 % des enregistrements ont été retranscrits.

Au total, 0,72% des enregistrements ont été retranscrits entre février et décembre 2020.

M. B, EXPERT EN EXPLOSIF

L’audience est suspendue. Elle reprend à 19h44 par l’intervention de l’expert en explosifs qui a réalisé deux expertises dans ce dossier. Il commence par prêter serment, main levé et tout et tout…

L’expert commence par expliquer qu’il a réalisé les expertises à partir des scellés, des perquisitions où il était présent (Toulouse, Paulnay) et des retranscriptions de sonorisations et d’écoutes. Il arrive avec un petit power-point… 

On y apprend notamment que le fulminate de mercure est un explosif primaire très sensible. A noter qu’il n’a pas été utilisé lors des essais mais évoqué dans les retranscriptions. Idem pour le nitrate d’amonium/aluminium.

Pour la poudre noire (on connaîtra tous la recette d’ici la fin du procès ^^), il reconnait qu’il y a peu de savoir requis et que l’accès aux produits est assez simple.

Concernant le mélange nitrate d’ammonium fondu & sucre, l’expert estime qu’il faut des compétences et un savoir-faire important, mais peu répandu, pour en fabriquer. En revanche les précurseurs (engrais et sucre) sont simples d’accès. C’est un mélange peu utilisé en France mais plutôt dans la région du Caucase (zone de conflit, on reviendra plus tard la dessus avec les avocats).

L’expert est difficile à suivre, il parle très vite…la juge lui fait remarquer

Au sujet du TATP il estime que le produit est très instable mais qu’il faut très peu de compétences pour en fabriquer et que l’accès aux précurseurs est simple (acétone, eau oxygénée, acide). Il reconnait que les étapes décrites dans les retranscriptions montre que ça tâtonne, réalisé avec difficulté pas à pas.

Globalement il considère que pour le mélange nitrate d’amonium fondu & sucre il faut avoir testé auparavant vu la complexité.

S’en suit un long passage de présentation avec des résultats d’analyse des composants trouvés dans les différents endroits perquisitionnés, dont de l’encens… Puis l’expert projette un grand tableau récapitulant les traces de produits trouvés sur les gazinières, les poêles, les gants, les spatules… Des traces de produits ont été retrouvés sur deux spatules, un plan de travail, la gazinière et des gants, alors que sur une dizaine d’autres objets il n’y a pas de traces.

Vient ensuite un autre montage photo avec des objets pyrotechniques, des inflammateurs, des mèches, des pétard Bison, des fusées de signalisation nautiques… au passage il se permet de commenté « peut être utilisé en manifestation contre les forces de l’ordre.

L’expert note la présence lors des perquis’ d’autres objets pouvant entrer dans la fabrication d’engins explosifs: piles, interrupteur, quincaillerie, fils électriques… cela ressemble plus à une liste de matériaux de bricolages qui trainent chez des personnes bricoleuses.

Enfin il montre à l’écran des factures qui pourraient être liées à une activité d’artificier de divertissement.

Les juges regardent l’écran avec intérêt, les sourcils un peu froncés, en hauchant la tête.

En conclusion: « l’ensemble des éléments qu’on m’a présenté permet d’affirmer que nous sommes en présence de personnes en capacité de fabriquer des engins explosifs, ils ont les connaissances et le matériel ».

Ensuite l’expert fait un pronostic de dégats avec 20kg d’ANFO (explosif à base de nitrate d’amonium et fuel) alors que F. et S. avait 12kg d’amonitrate seul (qui reste un engrais vendu légalement) et 258g d’Anfo (uniquement dans le camion de S.) Sa simulation, conclusion de son rapport, montre les dégâts qu’aurait pu faire une hypothétique explosion Place Vendôme à Paris.

La présentation terminée, la présidente prend la main et démarre avec une question sur le nitrate d’amonium.

L’expert raconte qu’aucun de ses collègues européens n’a jamais vu ce mélange (nitrate sucre). 

Le nitrate d’amonium aurait plutôt été utilisé au 20ème siècle dans le monde agricole pour dé-soucher et briser des roches. Ce n’est pas forcément illégal.

Au sujet du TATP il estime que l’appellation est connue de tous, surtout depuis les attentats de 2015 après lesquels les médias parlaient souvent de ce type d’explosifs. Il note, malgré tout, que son regard est peut-être biaisé par sa profession.

La juge demande à l’expert si l’Anfo peut rentrer dans la catégorie de l’artifice de divertissement. Sans surprise, l’expert en explosif du laboratoire central de police répond à la négative et dit que cela relève du domaine civil avec l’obligation d’un certificat de préposé au tir (CPT) (on a appris depuis que la formation dure une semaine sans pré-requis)

La juge se demande si 2-3 jours d’expérimentations suffisent pour savoir fabriquer du TATP. Ce à quoi l’expert répond que oui, contrairement au nitrate d’amonium fondu qui demande plus de connaissances. Pour lui, il y a 3 chances sur 4 de ne pas réussir l’opération, il parle du « magmatage » difficile a obtenir.

 « Les recettes de TATP peuvent-elles se trouver sur internet? »

Expert – « Oui, en accès libre. »

 « Et la poudre noire? C’est assez facile à fabriquer? »

Expert – « De qualité un peu médiocre, oui. »

Questions du procureur

Les juges laissent la parole à leur cher procureur.

Proc – « Est ce que vous diriez que l’on peut utiliser le TATP dans le monde du divertissement? »

Expert – « Le TATP? Non. »

Il dit ça d’une voix rauque avant d’expliquer que le TATP est trop sensible pour cela et peut exploser rien qu’en le laissant au soleil. En revanche il est facile à fabriquer et donc beaucoup utilisé pour les attentats.

Il en profite pour faire une classification (qui nous parait officiel à ce moment là) des différents types d’artifices et explosifs:

    1. Les produits de divertissement, poudre noire, perclorate, tout ce qui réagit à la flamme, c’est d’après lui le plus sensible mais aussi le plus accessible, il faut alors avoir le F4 T2 (formation artificier) qui permet d’acheter, mettre en oeuvre, transporter…

    2. Les produits militaires : destruction, explosif secondaire, amorçage par détonateur, uniquement dans le domaine militaire

    3. Les produits du domaine civil comme l’ANFO, la dynamite, certains explosifs secondaires, il faut alors un certificat de présupposé au tir (CPT) et certaines autorisations. Carrières, stations de ski…

    4. La fabrication artisanale, c’est illégal

Le procureur lui demande où placerait il là dedans l’ANSU (nitrate/sucre), il lui répond nul part car officiellement ça n’existe pas (????)

Le procureur insiste en lui demandant si dans le cadre des effets spéciaux, pour les films, on peut se permettre certaines expérimentations. D’après l’expert, sur les films (il précise même très gros budget), tous les produits sont officiels, de fabrication industrielle (LOL!!!)

Proc – « F. parle d’une vidéo, montrée par un agriculteur, vue deux ans auparavant. Est-possible qu’il se rappelle de la recette? »

Expert – « Quand on fait de la pyrotechnie ou des explosifs, on ne retient que ce qu’on fait. Alors une vidéo vue il y a deux ou trois ans, non non non, je n’y crois pas. »

Il rajoute que si c’est la vidéo qu’il a vu circuler, elle contenait trop peu de détails pour être utiles.

L’expert enchaine en expliquant que la recette « nitrate d’amonium & sucre » est arrivée par le Caucase dans le milieu Djihadiste. « Mes collègues européens et américains n’ont jamais vu ça sur leur territoire ». A la demande du procureur il dit qu’en 20 ans de métier il n’a jamais vu cette recette en France.

Proc –  » Quels types de dégats peuvent occasionner 400g d’ANSU+ TATP? »

En réponse l’expert montre un trou de 20cm de diamètre et ajoute « madame la présidente ne serait plus capable de continuer le procès, le premier range non plus, tandis que le deuxième rang serait protégé par le premier ».

Questions substitut du procureur

Elle commence par rectifier une grosse erreur de l’expertise, qui se base sur le fait que 2kg d’ANFO ont été retrouvé chez S. Elle reconnait qu’il n’y a que 258g et que le reste était du nitrate d’amonium c’est a dire de l’engrais. Depuis 2h l’expert nous parle de 2kg d’ANFO et cette information est erroné. Elle devance donc les avocates…

« Pouvez-vous me donner un exemple de crime de masse perpétré avec de l’ANFO? »

L’expert répond par de nombreux exemples dont un attentat à Oslo.

Questions des avocat.es

C’est la défense de C. qui commence par une question sur l’urgence du premier rapport. Elle demande si l’expert en avait parlé avec le juge d’instruction à l’époque. L’expert répond que certainement même si il n’en a plus souvenir.

Avocate – « Est-ce fréquent qu’on vous demande de travailler à partir de retranscriptions? »

Expert – « Non, c’est la première fois. »

L’avocate exprime l’étonnement de la défense concernant le fait que l’expert n’ait eu accès ni à l’entièreté des retranscriptions ni aux sons. Ce à quoi l’expert répond que le magistrat lui transmet les pièces qu’il juge nécessaire. L’avocate poursuit en se disant surprise que certains passages de ces retranscriptions aient été préalablement surlignés en jaune. Elle demande à l’expert si cela aussi est fréquent. « Euuuuh, je ne sais plus », répond l’expert en disant que parfois les documents sont épais et que les passages importants sont pointés du doigt, même si évidemment il faut tout regarder.

L’avocate de W. enchaine – « vous travaillez pour la préfecture de police, pour la cours d’appel de Paris. Je voulais savoir si vous aviez des pratiques paysannes monsieur? » Elle veut savoir si il a des connaissances au sujet des explosifs utilisés dans le milieu paysan. Ce à quoi il répond en parlant d’explosifs utilisés contre les taupinières, mais il ne veut pas reconnaitre l’utilisation de l’amonitrate + sucre dans le milieu agricole.

Elle lui montre ensuite une douille, utilisée à Parcoul comme contenant pour le TATP et lui demande quelle quantité max peut on mettre dedans? Il répond environ 2g

Puis elle lui demande le bruit que cela peut faire, il répond « un bruit sec qui va claquer »

C’est l’avocat de B. qui prend la suite.  – « Le mélange nitrate d’amonium et sucre, si ce n’est pas bien réalisé ça n’explose pas? »

Expert – « Si, le melange du sucre et nitrate non fondu explose facilement »

Avocat – « Alors il n’y a pas besoin d’une grande connaissance pour en fabriquer? » Il veut savoir si « une bande de bras cassés », avec des connaissances approximatives, peuvent obtenir une explosion sans être carré sur chaque étape.

L’expert répond en disant que oui mais que selon lui les connaissances n’étaient pas approximatives.

L’avocat de C. demande ensuite simplement si il est possible d’acheter des précurseurs en magasin de bricolage ou en pharmacie pour passer sous les radars.

Expert – « Oui. »

L’avocat demande si acheter un produit précurseur avec un carte bancaire c’est passer sous les radars.

Expert – « Non… »

Au tour de l’avocate de L. de prendre la parole. Elle interroge l’expert sur les artifices de signalisation qu’il a décrit comme pouvant servir dans le nautisme ou en tant que fumigènes mais aussi comme arme de destination contre les « forces de l’ordre ». Elle se demande pourquoi il a mis l’accent sur cette utilisation particulière. De plus elle aimerait savoir de quand datent les objets trouvés lors des perquisitions.

L’expert répond qu’ils sont périmés, pour certains depuis 1971 et qu’il y a une chance sur deux pour qu’ils fonctionnent pas.

C’est maintenant l’avocate de S. qui prend la parole. Elle commence par pointer du doigt le fait que la diapositive de conclusion de la présentation de l’expert est restée plus d’une heure à l’écran dans la salle d’audience (simulation d’explosion). La demande est faite de remettre la diapo à l’écran. On y voit une estimation, réalisée par l’expert, des dommages potentiels de 20kg d’ANFO.

L’avocate demande si l’estimation est faite sur la base des 258gr d’ANFO retrouvés chez S. et des 12kg d’engrais retrouvés chez F. L’expert répond que oui.

L’avocate insiste et s’étonne qu’on parle d’ANFO alors qu’il n’apparait nul part dans les écoutes. Et surtout comment 12kg+258g peuvent donner 20kg?

Il explique alors qu’il est parti sur le mélange amonitrate /aluminium qui avait été cité dans une retranscription et qui est un mélange en proportion 50/50. 

Mais ce mélange n’a jamais été réalisé ni retrouvé dans les scellés? 

Non

Donc votre simulation mélange des produits trouvés, des mélanges évoqués et des tests d’explosifs réalisés sans aucune proportion réaliste?

« Si je devais reprendre cela diminuerait cette simulation par 2 ». Il rappelle que pour l’ANFO (qu’il a pourtant décidé de mettre en avant pour cette simulation), les proportions sont de 94% amonitrate 6% fuel

L’avocate de S. demande ensuite si l’expert était au courant des arrestations et que son expertise était attendu dans ce contexte. Il répond juste qu’il avait connaissance d’une urgence et qu’il a participé aux arrestations.

L’avocate poursuit en se demandant pourquoi il y avait une urgence en Novembre alors que les dernières écoutes dataient de Mai. Ce à quoi l’expert répond qu’il ne sait pas.

Au sujet des essais à Paulnay l’avocate note que l’expert a eu accès aux retranscriptions des 14 et 15 Février et demande si on peut en conclure qu’il n’y a pas eu d’explosifs par la suite.

Expert – « Non »

Avocate – « Dans votre conclusion vous dites que F. et S. ont fabriqué du nitrate d’amonium/sucre et du TATP. Aujourd’hui vous feriez la même conclusion? »

Expert – « Oui. »

Avocate – « Mais ils n’ont pas fabriqué de TATP… »

Expert – « Ah… »

Avocate – « On vous demande d’analyser le bruit des expériences, comment faites vous avec comme base des retranscriptions, sans le son? »

Expert – « Une fois ou deux le bruit était précisé dans les retranscriptions »

Elle l’interroge alors sur le test à la flamme, qui à été effectué par les démineurs sur l’ANFO présent dans le camion de S. et qui n’a rien donné, il se rattrape en disant que c’est une question de sensibilité.

Avocate – « Vos conclusions (rapport) sont un peu hâtives, il n’y a pas eu de TATP à Paulnay et vous concluez qu’ils ont probablement fait des « pipe bomb » alors qu’ils l’évoquent seulement. Comment faites vous monsieur la différence entre ce qui est fait et ce qui est dit? »

Elle le cite ensuite, sur le fait que le mélange amonitrate fondu sucre est difficile à réaliser et que 3 fois sur 4 c’est un échec. Elle lui rappelle que à Paulnay, F et S font 4 tentatives et elles echouent toutes. « On peut conclure de leur inexpérience non? »

L’expert ne veut pas le reconnaitre et dit que cela vient du produit.

L’avocate lui demande pourquoi le taux d’azote a été analysé sur certains scellés seulement. Il répond que les démineurs ont détruits le reste des produits et qu’il n’a pas pu faire l’analyse. C’est uniquement parce qu’il était présent à la perquisition du camion de F que l’amonitrate trouvé a été analysé.

Il reconnait que l’amonitrate est un simple engrais et que tout le monde peut en transporter et en avoir.

Elle l’interroge ensuite sur la classification qu’il a présenté au procureur précédemment (divertissement, militaire, civile, artisanale) et si les mondes peuvent parfois se croiser. Il nous explique alors que c’est pas du tout une classification officiel, c’est lui qui pense comme ça. Pour lui ces différentes branches sont parfaitement distinctes. Pourtant elle lui parle de Ruggieri/Lacroix qui fait du divertissement et fabrique les grenades et autres pour les forces de sécurité.

Elle finit par lui demander pourquoi est il là? L’expert lui répond que c’est à la demande du PNAT et que c’est la première fois de sa vie qu’il témoigne en correctionnel.

C’est au tour de l’avocat de F. de prendre la parole. Il commence par demander pourquoi les bâtonnets d’encens ont leur place dans le rapport de l’expert. Celui-ci répond qu’ils peuvent servir à l’allumage. L’avocat demande si des traces suspectes on été retrouvées dans les casseroles du camion de F.

« Non », répond l’expert.

Avocat – « A quoi sert une casserole? »

Expert – « A cuisiner. »

Avocat – « Pourquoi ne pas l’avoir mentionné dans votre rapport? »

Expert – « Cela ne me semblait pas nécessaire. »

Avocat – « Vous dites que la recette circule dans le conflit Irako-Syrien? Chez les Kurdes? »

Expert – « Je suis accrédité secret-défense, je ne peux pas en parler. »

Avocat – « Si vous ne pouvez étayez vos propos et que vous ne pouvez pas en parler ne le mentionnez pas dans votre rapport alors ! »

Les dernières questions tournent autour du choix de la place Vendôme comme simulation. L’avocate de S. est surprise de ce choix et se demande si ce n’est pas parce que le ministère de la Justice est justement place Vendôme. L’expert semble dire que c’est un pur hasard, qu’il a choisi une place emblématique de Paris (LOL).

Il est 23h, l’audience est levée.

MARDI 10 OCTOBRE

En passant

10/10

La juge a été destinataire d’un mémoire à propos d’une question de constitutionnalité signée de l’ensemble des avocat.es et reçue à 10h48.

Le procureur dénonce une « manoeuvre inélégante » dans le fait de déposer ce mémoire si tardivement.

Me Simon : l’intérêt de l’audience tient à la richesse des débats, et que tout le monde puisse s’exprimer. Mais les deux agents de la DGSI ne sont toujours pas mandatés.

La précédente demande de renvoi a été refusée. La demande de contrainte également.

Aujourd’hui a été déposée la QPC (question prioritaire de constitutionnalité), on est devant un mur, on est sur une question prioritaire de constitutionnalité.

Question purement juridique qui se pose. Ne porte pas sur les faits, ce n’est pas l’objet de la QPC.

Lorsque l’huissier s’est présenté à la DGSI, il s’est vu essuyer un refus, la raison invoquée est l’anonymat des agents. Un procès-verbal de difficulté a été dressé.

La loi sur l’anonymisation date de novembre 2015. Lors de l’examen de cette loi, la question avait été posée par le législateur. Le texte ne prévoit pas la possibilité de faire citer un agent comme témoin.

L’objet de la QPC n’est pas de remettre en cause l’anonymat mais de poser la question de l’équilibre entre la nécessité de l’anonymat et les droits de la défense.

Pouvoir interroger un témoin en audience doit justement pouvoir permettre le contradictoire.

Les différents droits de la défense sont énumérés.

Critères de la QPC : mentionner par écrit le dispositif applicable au litige, pose la question de la constitutionnalité.

Article 706-24 : sur décision, certains agents, par exemple de la DGSI, peuvent anonymement être autorisés à déposer et à rédiger des actes, tout ça sous leur matricule. 

C’est le cas aux assises. 

Qu’en est-il de la correctionnelle ? 

La citation est impossible sous l’état-civil de l’agent, c’est illégal. S’il y a divulgation de son identité, cela constitue une infraction. 

Tout le débat porte donc sur les droits de la défense, et cela souligne une incohérence évidente.

Pourquoi pas la même chose en correctionnelle ? 

Parce que c’est rare.

Et alors ? 

Est donc posée la question de la rupture d’égalité des droits de la défense.

Une QPC récente et importante pour la défense : celle de la GAV.

Procureur : 

Il dénonce qu’après « une entrée par la porte, puis par la fenêtre, voici désormais une entrée par la cheminée » pour faire comparaître les agents de la DGSI.

Il souligne la différence entre « droits de la défense » et « faire droit à la défense » (??)

La loi de novembre 2015 a été mise en place après les attentats du 13 juin 2016. Il s’agit d’une réalité du quotidien du fonctionnaire de police (??)

Le ministère public a transmis un/des (?) procès-verbaux de pièces divulguées par les soutiens. Iels ont pris la peine d’anonymiser l’identité des prévenus mais pas celle du juge Herbaut, ce qui pose à nouveau la question de l’anonymat.

Lassé par cette demande, le procureur veut mettre fin à cette question sur la rupture d’égalité entre le PNAT et la défense. Le PNAT n’a pas accès aux identités. 

Réponse a déjà été formulée sur le fond au sujet de l’agent en question,  affirmer que cela constituerait une atteinte aux droits de la défense est faux.

La demande est rejetée.

L’avocate (Me Simon) dit être chagrinée d’avoir été si peu claire que le procureur réponde totalement à côté.

La question n’est pas de contester l’anonymat, mais de rééquilibrer.

Ce n’est pas parce que cette question est renvoyée que les policiers ne seraient plus protégés.

Me Kempf 

L’inconstitutionnalité nous est apparue et malheureusement cette question n’est pas prise au sérieux. On agite le chiffon rouge, en invoquant les attentats de 2016, mais c’est faux, les policiers étaient déjà protégés avant (dés 2015).

Le rapprochement a été fait entre les attentats de Magnanville et la divulgation/diffusion du nom du juge Herbaut, ce parallèle est inacceptable.

La seule chose pouvant être reprochée à celleux qui ont publié les procès-verbaux relève d’une contravention. Si les PV sont lus en audience, l’infraction n’est plus caractérisée.

Pour QPC : audience en 2019, faits de manifestation, citation d’un flic.

Des situations dans lesquelles on peut faire valoir les droits de la défense sans mise en danger des policiers ou agents.

PNAT : a été capable de donner des infos précises inaccessibles pour la défense -> rupture d’égalité très claire.

« Les policiers n’ont pas souhaité déposer ».

Délibéré : 3h !!

Juge :

Sur la forme la requête est recevable.

Sur le fond : pas de contestation sur le litige

Sur la nouveauté : pas de décision rendue postérieurement

Elle refuse car la demande est dépourvue de caractère sérieux

Elle propose à la défense de faire appel de la décision en même temps que l’appel du délibéré de fin de procès

Puis la défense de S. insiste sur la projection des vidéos promises vendredi en fin d’audience, qui portent sur le travail d’artificier et de technicien SFX de leur client. La juge, énervée d’avoir perdue du temps sur son planning veut absolument voir les vidéos pour choisir les extraits avant de les diffuser au public. Le public est prié de sortir de la salle le temps de sélectionner 5 très courts extraits qui seront diffusés avec un mépris affichée de la part de la présidente.

18h30 Tchao à demain

JEUDI 5 OCTOBRE

En passant

05/10

3ème journée d’audience, débutée exceptionnellement à 14h30. Cette journée sera consacrée à l’audition de 4 prévenus non entendus, comme prévu, la veille : F, W, S et L.

Avant le début des auditions, petite menace de la Cour : le Procureur veut que « le monsieur qui respire fort » et qui applaudit (expulsé la veille), ne revienne pas dans la salle. La Juge y va de sa morale au public : c’est le dernier avertissement, sinon elle fera évacuer la salle. 

Dans ce théâtre, seuls les initié-e-s sont autorisé-e-s à commenter ou réagir. Les autres sont spectateurices d’une justice qu’on rend « en leur nom ».

Les auditions commencent.

FLORIAN

 On commence par les mentions au casier judiciaire : deux, sur lesquelles F s’expliquera après avoir fait une déclaration.

 Il se sent insulté par cette accusation, il est ému, stressé, et dans l’appréhension.

 Il s’explique ensuite sur les deux mentions au casier : un usage de stupéfiants (cannabis) et un outrage. 

 [A noter que depuis 2020, la consommation de stupéfiants est punie d’une amende forfaitaire délictuelle – bientôt payable en liquide ou en carte bancaire direct aux flics ! – et que ça remplit bien les caisses de l’Etat…]

Concernant l’outrage, cela se passe à Calais, il est malade, il sort de la salle de classe où il donne des cours de français à des jeunes réfugié•es et crache par terre. Les flics le prennent pour eux, l’accusent d’être ivre, alors que le test alcoolémie est négatif. F a toujours réfuté cette accusation.

La présidente entame avec l’enquête de personnalité, elle cite une déclaration de F suite au dernier interrogatoire de fond en février 2022 : « Quand je vois le dossier, je ne reconnais pas 1% de ma personnalité. »

F explique le contexte de l’enquête de personnalité et pourquoi il y était d’abord réticent : il est incarcéré, à l’isolement total. On va au parloir, on s’attend à y voir un visage qu’on connait et on se retrouve avec un inconnu en face. 

A cette évocation beaucoup d’émotion.

La juge, évidemment, défend l’intérêt de cette enquête de personnalité. Par la suite, il s’est plié à l’exercice : « Vous vous êtes montré tout à fait… « adapté ». En langage de juge, va savoir ce que ça veut dire…

Evocation ensuite du parcours scolaire, formation durant laquelle il rencontre M., des boulots et début de la vie itinérante et l’orga de concerts. Cette vie itinérante a duré jusqu’à l’arrestation. Acquisition d’un terrain en 2009 avec sa partenaire de l’époque, relevée par la juge, explications sur le souhait de pouvoir se poser en camion, faire pousser des légumes. Puis reprise de la vie itinérante au bout d’un certain temps. Evocation des dépendances.

F revient sur les interrogatoires : « dès le premier interrogatoire on reformulait tout ce que je disais, ça ne m’a pas mis en confiance ». La juge enchaine sur sa discrétion à propos de ses amis, à quoi F fait valoir qu’il se sent insulté par cette procédure, qu’il est critique sur la manière dont l’enquête a été menée et qu’il ne souhaite pas mêler ses amis à ça. »

Les questions vont maintenant pointer certains lieux de vie, choisis par les juges.

Sivens : passages sur des temps plutôt longs, de janvier au début d’été 2014 : des rencontres, participation à des constructions, des échanges, des liens qui se créent et qui permettent « à sa sensibilité de s’exprimer ». Un second passage en août 2014, pendant lequel il se concentre plus sur l’aspect légal de l’occupation. Pas présent pour le début de l’évacuation, mais revenu parce qu’il était touché de ce que vivaient les copaines sur place. Puis il est reparti parce que trop dur de voir la foret être rasée et de se sentir impuissant. Il évoque quelques actions de désobéissance civile qu’il a faites.

Calais : Y est allé sans trop savoir ce qu’il allait y faire. Au départ distribution de vetements, puis ensuite donne des cours de français, le contact est plus humain plus proche, cela donne du sens à sa présence là-bas.

On en vient, on s’en doutait, au Rojava.

La juge interroge sur la raison du départ.

F. explique que cela fait suite aux attentats de Charlie Hebdo ; à ce moment là qu’il prend conscience de ce qu’est Daesh. Il lit tout ce qu’il peut et découvre le mouvement kurde, la politique mise en place. Ce que Daesh fait ici, mais aussi ce qu’ils font ailleurs. Il ne pouvait pas rester sans rien faire. 

– « Si vous voulez les raisons de mon départ, ça va forcément gratter au fond des tripes ». F est très ému. 

La juge d’en conclure : « Le fait que ça vous émeuve à ce point est une démonstration de votre personnalité »…

F explique avoir eu envie de voir concrètement ce qu’il se passait là-bas, s’être documenté, lire tout ce qu’il pouvait, puis avoir informé sa famille quand sa décision était prise, malgré la peur que cela pouvait leur causer.

Il dit très nettement qu’il se sent piégé dans cette affaire : parce qu’il a des idées politiques, parce qu’il est allé au Rojava et qu’il y a manié des armes, que cette affaire n’existe que parce qu’il est allé au Rojava. 

La juge prétend à nouveau qu’il n’est pas mis en examen pour son engagement au Rojava (rires étouffés dans la salle). Il rétorque que la DGSI prétendait la même chose, tout en ne lui parlant que du Rojava. « Si on ne me reproche pas le Rojava, alors ne parlons pas du Rojava. »

Avec finesse, la juge enchaine : « Vous avez manipulé des armes au Rojava ? »

-« J’ai rejoint une unité de force armée, je n’avais aucun entrainement militaire. J’ai récupéré une arme pour m’entrainer parce que je n’avais jamais tiré un seul coup de feu. »

– « Vous avez pris un grand risque. »

– « Oui. C’est quelque chose un peu fou. Je prenais beaucoup de temps pour réfléchir, méditer, être sûr de ce que j’allais faire. A mon arrivée j’ai eu un mois de formation sur l’histoire du mouvement, la langue, un peu d’entrainement. »

– « Pourquoi êtes-vous rentré ? »

– « Vous ne voulez pas que je vous raconte ce que j’ai fait là-bas ?? »

– « Dans votre personnalité c’est votre arrivée et votre départ qui m’intéressent. » (cette réponse de la juge, comment la comprendre ? C’est d’une violence incroyable. F a raison, la seule chose qui importe ici c’est d’être allé au Rojava).

F d’expliquer qu’il avait promis à ses proches qu’à une certaine date il rentrerait, et qu’au bout d’un moment on n’en peut plus. 

La juge va insister avec plusieurs questions ensuite sur le traumatisme, sur la nécessité  d’accompagnement psychologique après cette expérience. F se dit conscient à son retour d’être chanceux, de ne pas avoir vu le pire, il ne se sent pas traumatisé, ne fait pas de cauchemars. Il parle, mais avec des ami-e-s.

Incrédulité de la juge : « Comment on peut reprendre une vie normale après ça ? »

F explique que la vie normale, il a bien essayé, reprendre les vendanges, voir des ami.es, se rapprocher de Toulouse, mais qu’il n’est pas serein par rapport à la police. Les contrôles sont différents, les flics pâlissent, ça dure longtemps, ils s’enferment dans leur voiture. Il sent qu’il y a quelque chose de pas normal. Il comprend pourquoi.  

– « Ce n’était pas le cas avant ? » 

Avant l’interpellation il a senti la pression policière, il se sent sur la sellette. Il a peur d’être criminalisé à cause de son séjour au Rojava, et c’est exactement ce qu’il se passe actuellement. Il dit à sa mère « J’ai peur de finir en prison ou qu’on me tue. »

La juge tique sur le fait qu’il ait peur qu’on lui « nuise ».

Elle le questionne sur ses projets après ça.

– « J’essaye de partager sur le Rojava, mais je n’y arrive pas, parce que j’ai l’impression de faire monsieur-j’ai-tout-vu. Je me laisse aller par le courant. Je vais au squat de Toulouse. j’ai pas de projet ».

– Juge : « Est-ce que vous rencontrez des gens pour les conseiller sur le Rojava ?

–  » Je ne les conseillais pas, je leur racontais. Je n’avais pas envie que les gens partent sans savoir où il mettaient les pieds. Qu’ils ne partent pas sur un coup de tête, une idée romantique. Les mettre au courant sur ce qui les attend ».

– Juge  : Vous vous considérez comme une personne violente ? 

– Non, je ne suis pas impulsif. Les seuls actes violents que j’ai posé c’était contre Daesh.

Il n’a pu voir de psy en détention malgré ses demandes incessantes

Une assesseuse veut revenir sur une condamnation antérieure. Kempf intervient et note qu’elle est réhabilité de plein droit, donc son client ne répondra pas.

— Assesseuse de droite : Période de la Grèce. 2 mois avant le départ. 

– « Un sas entre l’annonce du départ à mes proches et le départ. Des personnes rencontrées à Calais m’ont accueillies. C’était sur le chemin. J’ai fait un peu d’aide à des migrants, des cantines collectives. Mais sans trop m’engager, car j’avais la tête prise vers où j’allais ».

Elle note une contradiction entre le fait qu’il voulait parler du Rojava aux personnes qui voulaient en partir, mais pas les conseiller. 

– « Je n’ai pas de conseil à donner, ils ont fait leur choix. Je ne suis pas un soldat. Je n’ai pas grand chose à dire à part mes expériences et mes mises en gardes. 

– « Qu’avez-vous dit à Manu ? » 

– « Il a dit qu’il continuait sa route tout seul. Il voulait faire son expérience. Sur les sonorisations on nous entend surtout parler de où trouver des bons piments au marché ». 

– « Avez-vous dit des trucs pour comment faire ? Des conseils plus techniques ? Sur le maniement des armes ? »

–  » Non ».

— Asseusseuse de gauche : 

– « Comment ça se passe de passer d’un terrain à l’autre, d’un terrain de solidarité à un terrain de guerre ? Les destructions, ça ne vous a pas dissuadé de partir ? » 

– « Pas de lien entre les 2. Ce sont des choses différentes ».

Procureur :

– « Est-ce qu’il vous est arrivé de participer à des violences sur les ZAD par exemple ? » 

– « Non ». 

– « Manif ? » 

– « Non. La seule chose que j’ai fait lors des expulsions c’est une attitude de guignol, de faire courir les flics, pour faire perdre du temps à la destruction ».

– « On a trouvé chez votre mère des épaulettes, jambières, bouclier de policier ». 

– « C’est pour du jeu de rôle. » Le PNAT a en effet fait fuiter ces éléments dans la presse d’extrême-droite à plusieurs reprises, en laissant entendre que c’étaient des équipements de flics. F revient méthodiquement sur chaque élément en démontrant que ce ne sont pas ceux de flics. Il explique les jeux de rôles.

– « C’est de la violence, mais ludique, c’est ça ? » 

– « Ca s’appelle jouer. »

Le procureur cite une écoute de discussion. 

« Il s’agit d’un moment où je vois des personnes en manif qui se prennent en photo ». 

Flo le remet en contexte : « Il s’agit plus du fond que de la personnalité. Et il faudrait reprendre toute la conversation. »

– « Vous avez dit que votre motivation de partir au Rojava était en lien avec les attentats de Paris ». 

– « C’est un des éléments mais ce n’est pas le seul. »

– « Ce n’est pas neutre le combat, et il y a d’autres façons d’aider ! » 

– « Et ? »

– « Comment se fait-il que vous ayez réagi de cette manière aux attentats : à cette période, les écoles d’infirmiers se sont remplies, les rangs de la police aussi… Pourquoi vous avez considéré que c’était la meilleure réaction ? Vous êtes une personne non-violente et vous choisissez de donner la mort. C’est une situation où vous risquez la mort et risquez de la donner ». 

– Oui il y a différentes façons d’aider, mais c’est celle que j’ai choisi. Je ne pense pas que vous demanderiez cela à un militaire.

– L’armée c’est encadré.

-J’étais avec la coalition internationale.

– Non, c’est informel, ce n’est pas comme l’armée où vous êtes salarié. Ce n’est pas l’armée d’un État.

– Si, on était avec la coalition internationale.

–Avocat.es

Bouillon revient sur la relation proche entre F. et sa mère. Il y a un an, lors d’une audience pour modification de CJ pour demander de pouvoir se rapprocher de sa mère suite à des problèmes de santé, le procureur (Benjamin Chambre) a osé dire « il se souciait moins de la santé de sa mère quand il est parti au Rojava ou quand il a fait une grève de la faim!  » et la demande de modification a été refusé. Le procureur n’assume pas du tout et refute ce qu’avance Coline Bouillon. Le procureur n’est pas du tout a l’aise, il passe pour un gros con…

Kempf revient sur la ZAD de Sivens et lui demande comment cela s’est terminé. Flo rapelle la mort de Rémi Fraisse et le projet de barrage reconnu illégal deux ans plus tard.

Kempf revient sur l’engagement auprès des YPG et rappelle qu’ils étaient sur le terrain, en lien étroit avec la Coalition Internationale, qu’il  » travaillait en bonne intelligence  » avec les militaires.

Il enchaine sur le pourquoi repartir au Rojava en 2019, F explique que même si Daesh est officiellement vaincu à cette époque, ils restent actifs dans certaines régions.

Will

La juge commence par parler des parents de W. en expliquant qu’ils sont tout les deux dans l’armée, et demande si c’est bien ses parents qui lui ont donné le gout pour la collection d’armes. Puis dit qu’elle n’en dira pas plus avant de le questionner sur ses études en affirmant qu’il a eu un parcours universitaire poussé.

W. atteste qu’il détient un master en Géographie et Environnement. Il détaille un peu les cours, à sa demande. Elle demande pourquoi il n’a pas exercé ensuite. « On se faisait passer devant par les personnes sortant des écoles privées. Face à eux, un vulgaire cursus universitaire ne valait pas grand chose. »  » Ce n’est pas vulgaire ! » « En tout cas face aux employeurs… » La juge hoche la tête, puis se veut rassurante :  » la fac c’est avant tout pour la réflexion personnelle… » La juge demande à W. de confirmer qu’il a tiré de ses études des choses sur le plan culturel mais peu sur le plan professionnel. W. confirme qu’il n’a pas travaillé en lien avec son cursus.

 Puis elle continue à le questionner sur son parcours et demande ce qu’il a fait à la suite de ses études .

W explique que après 3 mois chez ses parents, la Zad de Sivens est en train de se monter début 2014 et qu’il s’y rend par curiosité.

La juge questionne sur le temps qu’il y a passé et affirme qu’il s’agit d’une  » période qui vous a marqué »

W explique y être resté 2 mois, puis 1 mois , et être revenu le week-end de la mort de Rémi Fraisse.

La juge s’étonne qu’il ne soit pas présent lors des affrontements « je dormais » précise t’il.

Vient les questions sur Cubjac, et la suite du parcours de W. 

Il explique avoir entendu parler de Cubjac et du collectif par Loic. Qu’il ne connaissait aucun autre lieu collectif et qu’il n’avait pas de projet. Il explique qu’il était trop triste après Sivens « après avoir vu la forêt se faire raser »

La juge commence par se questionner sur les ressources dont il disposait pour vivre, puis se met à le questionner sur le fonctionnement dans un collectif et sur le partage des ressources entre les habitants. elle semble curieuse, en pleine expérience sociologique.  « Comment fonctionnez vous dans ce collectif ….. au niveau des ressources…?

W. n’y répond pas tellement mais explique faire les saisons et vivre du RSA. Et d’être parti après 1 an et demi / 2 ans passés à Cubjac

Il explique être parti en camion et fait chemin avec B.

 » Et c’etait quoi, le projet ? » 

W. explique avoir le projet d’un lieu collectif en autonomie et de tendre vers l’auto suffisance qui se concrétise en trouvant le moulin avec un potager et la forêt.

La juge: Vous souhaitiez acheter le bâtiment ?

W : Non c’était une colocation

La juge : « Qu’est ce qui vous guidait ? « 

W . : La possibilité de faire des saisons 

Puis la juge se prend pour une conseillère pôle emploi et lui demande pourquoi il n’a pas cherché à valorisé son diplôme , pourquoi il n’a pas postulé comme chargé d’environnement , pourquoi il n’a pas voulu compléter par une formation en horticulture… 

Il doit lui expliquer que la législation en environnement évolue tellement vite que ces connaissances se sont vite retrouvées caduques. Quand elle dit qu’il aurait pu faire une remise à niveau, il rétorque que ça n’aurait pas changé le problème de départ qui était que son diplôme ne faisait pas le poids avec certains autres.

Mais qu’il a eu une formation pour s’occuper des animaux domestiques.

La juge s’étonne: Domestiques ?

  » Oui, les chiens, les chats, chinchillas … » ( Rires) 

 « On me prêtait une maison en Bretagne où se trouvait une pension pour chiens ou je pouvais aider. »

Il cherchait plus de confort : « Quand tu commences à avoir des stalactites dans ta chambre, tu commences à te poser des questions. » 

Vient alors l’incessante question de la juge sur les dépendances.

W. répond qu’il n’a pas de problème d’alcool . «  C’est pas parce que ne n’ai pas de problème d’alcool, que je n’aime pas picoler non plus »

La Cour s’intéresse ensuite au régime alimentaire de Will

W : j’ai repris à manger de la viande, lié à différentes rencontres en fermes, techniques d’élevage et production, mais je garde une sensibilité. Aujourd’hui, je préfère passer par des producteurs locaux. Mais je m’oppose tout de même à certains aspects de l’exploitation animale.

Il précise qu’il parle de corrida et d’expérimentation animale. Avant, la mort le dérangeait alors il ne mangeais plus de viande, pour ne pas être hypocrite. 

Elle la questionne sur son rapport aux armes.

W : « J’ai fait du tir à l’arc au collège et lycée. A côté du Moulin de pommier, il y avait un stand de tir, et du coup j’y suis allé, c’était une bonne occasion pour commencer. Je n’ai pas d’armes en ma possession . Mon père m’avait proposé de tirer au stand plus jeune, mais je n’avais pas le temps avec mes études. »

La juge : »Je sens que vous n’avez pas envie de parler de vous…

W. C’est surtout que je ne sais pas comment… Mais allez y !  [rires de la juge, et de la salle]

J. Je vais le faire par moi-même, ne vous inquiétez pas, et je m’arrêterai quand je voudrai. » 

Elle veut bien être gentille, mais c’est elle qui a le pouvoir et ça, personne ne l’oublie.

La juge enchaine par la lecture et témoignage de la mère et de la copine. Cette dernière est très élogieuse, notamment sur son intelligence, et sur la manière de s’exprimer décrite comme érudite, et que les autres ne comprennent pas toujours. Il commente : « ça la fait passer pour une cruche, mais ce n’est pas le cas » (RIRES dans la salle)

« Est-ce que c’est pour cela que vous vous exprimez peu, pour éviter d’être mal compris ? » Non.

Elle évoque la réaction des parents qui ont essayé d’imaginer pourquoi il aurait participé aux actes qui lui sont reprochés. L’un.e dit qu’il est influençable, l’autre non. « Diriez-vous que vous êtes influençable ? » Non.

La juge soulève qu’à une époque il a voulu s’inscrire dans une formation d’artificier.

W : « Vu que le projet d’installation n’avançait pas, et que j’en avait marre de me casser le dos aux vendanges, que j’aime bien le spectacle, je me suis dit que c’était une bonne solution financière, et que ça serait moins dur physiquement. J’ai toujours aimé les pétards, et cela me permettait de garder mon mode de vie. Au final ça ne s’est pas fait »

La juge pose son éternel question sur l’anxiosité pendant la période de confinement.

W : « Ca nous touchait pas trop, puisqu’on était à la campagne… On était un peu inquiet pour les grands-parents. »

Juge Assesseure de droite :  « Vous avez des parents militaires, qui ont eu un poste en Allemagne à Baden Baden et vous avez vécu en caserne durant votre enfance, pendant 3 ans. En avez-vous gardé quelque chose ? » 

W : « Un peu d’allemand . On n’était pas séparé de la ville, ce n’était pas une caserne mais une base militaire. » 

Elle insiste longuement sur le fait que pour elle ça n’est pas anodin de vivre avec des militaires, elle creuse, elle s’embourbe… 

W : « Je ne me souviens pas d’être entouré de militaires, j’avais entre 6 et 8 ans !… »

J : « Vous avez déjà été à la ZAD de NDDL ? »

W : « Je suis allé aider aux troupeaux qui avaient peur lors de l’expulsion, et qui s’étaient dispersés.

J : Est ce que cet épisode de ZAD, a impacté votre vie ? »

W : « Dans le cadre de faire une activité avec des gens, mener une vie tranquille, en collectivité

J : Etes vous allés aux affrontements ? »

W : « Non, je ne suis pas du tout attiré par la violence »

JA : « Etes vous allés dans les stands de tirs à plusieurs ? »

W : « Oui, avec Bastien « 

JA : « Oui, on a compris que vous étiez ensemble »

W : « C’est Pumba! » (RIRES dans la salle)

Procureure : 

Elle le questionne sur des propos qu’il aurait eu auprès du juge d’instruction, sur un fossé idéologique entre différentes formes de lutte, différentes postures militantes. Il répond qu’il ne saurait pas du tout développer. Elle insiste en disant que ce sont ses mots. « Je pense que j’ai eu des propos pédants devant ce juge d’instruction… »

P : »Est-ce que vous avez tiré une leçon depuis votre arrestation (antécédent judiciaire 2010)?  » W : « Rester dans la légalité ».

Evocation d’une ou plusieurs action(s) de libération animale : revendiquées comme des actions de FLA = Front de Libération Animale. Il assume ces actes mais dit qu’il ne la revendiquée ALF que par mimétisme des actions de l’époque, sans faire parti de ce mouvement.

« Diriez-vous que vous êtes antispéciste ? »

« Non »

Avocates :

A propos de son activité au stand de tir, il répond que c’est une activité de loisir, cela lui procure la même sensation que le tir à l’arc, détente, concentration…

L’avocate revient sur la formation d’artificier envisagé un temps, il répond que ces antécédents judiciaires lui aurait empêcher de mener à bien ce projet.

Simon

—- S débute par une déclaration spontanée :

    « Je ne me reconnais pas dans les accusations portés contre moi. Ma vie a été brisée sur le plan professionnel, amical et personnel. Depuis l’arrestation, où je me suis retrouvé braqué par un fusil d’assaut à 10cm du visage, à la détention jusqu’à aujourd’hui, j’en garde des séquelles irréparables. J’espère que ce procès pourra, à moi ainsi qu’aux autres prévenu.es, nous permettre de retrouver un semblant de dignité. »

La juge revient sur l’expertise psy en prison

Simon dit s’être fait piéger ce jour là car il attendait un rdv médical et s’est en fait retrouvé coincé avec l’experte psy. Il a ressenti qu’elle n’était pas là pour l’aider dans une démarche de soin, il a donc refusé le rdv suivant.

Les conclusions de l’experte lues par la juge :

        – parle facilement

        – n’a pas conscience des conséquences de ses actes

        – image de « rebelle » qu’il se donne

        – engagement professionnel dans le milieu du spectacle

        – tatouages

        -« énervé »

Lors de l’expertise, vous aviez envie d’exprimer au juge ce que vous pensiez des policiers, que vous souhaitiez pouvoir critiquer les institutions.

La juge le questionne alors sur le tatouage « d’une expression peu favorable à la police », ACAB, il lui répond : « Je l’ai fait quand j’avais 22 ans, période où on pouvait encore provoquer, ce qui est l’essence du punk. Ça permettait d’engager des discussions avec des gendarmes ou autres et de pouvoir partager les critiques de l’institution. Depuis les Gilets Jaunes en gros, je le cache pour éviter de me faire casser la gueule, l’époque a changé. » 

La juge revient sur le rapport psy qui catalogue S comme « personne énervée », mais admet qu’il n’est pas connu pour faits de violences.

Intervention de Becker : elle considère que l’experte est arrivé avec des préjugés. Elle rappelle la conclusion de l’expertise confirmant que S. est dans le dialogue, la communication et le questionnement.

La juge reprend ces questions à propos de l’itinérance, à laquelle il répond que ces différentes étapes de sa vie l’ont ensuite amené à plus de stabilité.

A propos de ses envies de travailler dans le spectacle, il explique que cela remonte à très tôt. On lui demande alors d’expliquer le fonctionnement du Lycée autogéré de Paris (LAP).

ll explique que le LAP est « d’un type particulier ». Il y a de nombreuses réunions où on apprend à débattre avec les profs (« on s’engueulait beaucoup »), il y avait une salle de répétition c’est là qu’il commence à se former

S mentionne une amie du LAP qui ne veut plus lui parler plus parce que son copain « s’est fait terroriser par la DGSI ». « C’est un interrogatoire qu’il a très mal vécu, ça lui a fait très peur ». cette personne sera citée plus tard par le procureur.

La juge aborde son métier. Elle le questionne sur les produits explosifs dans le cadre de son métier. 

S explique ce qu’est le travail d’artificier, dans lequel y a plusieurs spécialités. Il travaille comme technicien SFX sur les spectacles Disney et comme artificier pour Ruggieri qui a en charge le feu d’artifice tous les soirs à Disney. A côté, il travaille comme technicien SFX sur les tournages de cinéma, clips et pubs.

Il distingue deux manières d’exercer ce métier. Les feux d’artifices classiques, comme il fait à Disney, ne demandent pas de mélange de produits car les produits sont fabriqués en usine, et ont des champs d’application précis, définis. En revanche, pour les effets spéciaux, on doit utiliser des produits extérieurs. Dans ce domaine, il est courant de détourner des produits d’usage, pour essayer de faire des effets. En tant qu’indépendant, chaque artificier est amené à se constituer un portfolio d’effets spéciaux, pour pouvoir répondre au plus de demandes possibles. Il doit donc s’entrainer, faire des tests, pour mieux maîtriser les produits, et avoir toute une gamme d’effets à proposer, en s’adaptant aux budgets. 

Il évoque le travail avec sa compagne, qui est vidéaste, avec qui il fait des clips.

La juge lui demande s’il a des problèmes de santé.

S mentionne un accident adolescent avec multiples fractures et liste les problèmes engendrés par l’accident. Lors de sa détention, l’état de son genou se dégrade.

Puis elle lui demande s’il a un problème avec l’alcool.

Il lui répond qu’il n’a pas de problème particulier et que parfois il ne bois pas d’alcool pour être plus vite bourré par la suite. RIRES

La Juge Assesseure de gauche veut revenir sur l’accident de scooter mentionné auparavant. « Vous avez été victime d’un policier ? »

S explique que le policier en question était hors service mais que des policiers sont venus le voir à l’hôpital pour tenter de lui faire avouer que c’était lui qui avait grillé le stop.

JA : « Vous ne l’avez pas dit pour éviter qu’on ne fasse un raccourci et qu’on dise que ça aurait pu nourrir une volonté de vengeance ? « 

Elle insiste sur ses tatouages ACAB et les trois points et lui demande s’il les a faits juste après. Il rappelle qu’il les a faits alors qu’il était âgé de 22 ans.

Puis elle reparle de son père, alors que S avait clairement spécifié qu’il ne voulait pas en parler. Elle lui dit qu’il aurait de bonnes raisons d’être contre la violence. Elle insiste, alors que ça le tend visiblement, et la salle aussi. « C’est plutôt à décharge ! » dit-elle

C’est au tour de la Juge Assesseure de droite  : « Vous avez été arrêté en manifestation avec des vêtements noirs dans votre sac ».

Simon répond qu’il est content de pouvoir parler de ça pour faire arrêter ces fantasmes.

Je suis toujours habillé en noir, comme beaucoup de gens dans mon métier (spectacle). Ce serait un peu stupide [si j’étais un blackbloc] de se changer de noir pour noir, et qui plus est d’échanger un pull noir avec un t-shirt noir en hiver.

Procureur

Vous avez fait une formation d’artificier dans laquelle vous avez appris les règles de sécurité ?

S : la formation était de 5 jours

Vous reconnaissez que c’est une activité à risque ?

S : Pas si c’est fait correctement.

P : Mais on ne se procure pas soi-même des produits ?

S : Bah… Si. 

Il demande à son avocate de lui amener le document dispensé lors de sa formation 

P : On se procure pas soi-même les ingrédients ? Vous amenez toujours des inflammateurs, des mèches… sur un chantier?

S : Si il faut [liste] … Je peux vous retrouver la liste des choses à emmener.

Questions et réponses sur les règles de sécu, les différences de règles en live ou sur un tournage…

S : les règles sur un tournage sont floues, ça passe… jusqu’à ce qu’il y ait un problème. (évoque un accident aux USA avec une arme chargée sur un tournage )

P : Mais si on utilise du matériel factice, il ne devrait pas y avoir d’accident ?

S : Si, même avec du matériel factice, si c’est mal utilisé il peut y avoir des accidents. (exemple arme à blanc) 

Avocates :

Av : PMA vs en êtes où ?

S : Je ne suis pas papa, merci de m’avoir fait perdre un an avec la détention.

Av : Sur la prétendue animosité de S. suite à l’accident de scooter : votre mère parle d’un policier qui loue son gîte, et à qui vous avez donné une place pour un feu d’artifice.

S : Oui, il s’est fait fouiller le sac à l’entrée du feu d’artifice je lui ai demandé « ça fait quoi de se faire fouiller ? ».

Av : Quand avez-vous obtenu votre agrément d’artificier ?

S : Je l’ai obtenu le 31/07/2020

Av : vous ne trouvez pas ça étrange ? alors que vous êtes, sans le savoir, dans une instruction pour terrorisme?

S : Un peu paradoxal oui…

Av : Quelle est votre explication ?

S : C’est normal que j’ai eu mon agrément, la préfecture a mené son enquête et me l’a donné.

Av : Vous ne représentiez donc pas un danger à cette date ?

S : C’est ce qui écrit oui.

Av : Mme la présidente vous a questionné sur l’accident et vous a laissé le choix d’en dire plus. Puis Mme l’assesseur a précisé que l’auteur de l’accident était policier. Auriez-vous peur que cet évènement dont vous êtes la victime puisse vous être reproché ?

S : Oui, on a peur que ce genre d’évènement se retourne contre soi puis devienne un élément à charge.

Av : En avez-vous nourri un ressentiment ?

S (rire) : Non, ça reste un accident banal. 

Av : Comment vous situez-vous ? Comment définiriez-vous vos opinions politiques ? Vous dites être de gauche et d’extrême-gauche sur certains sujets.

S : J’aime pas me définir dans tel ou tel courant politique. On fait ses propres choix.

Av : Et vous travaillez pour Disney ?

S : J’aime l’autoflagellation. Il y a Disney et les personnes qui y travaillent c’est différent

Av : C’est là la preuve de l’homme de compromis que vous êtes.

LOIC

Permis de conduire retiré à cause d’usage de stupéfiants

– « J’en consommais de manière très irrégulière ».

Rapport de personnalité. 

– « Vous êtes dans cette commune de Cubjac où vous avez grandi et toujours habité avec votre mère ? 

Projet professionnel ? » 

– « Lycée du bâtiment, pour faire maçon comme mon père. Je n’aspire pas à grand chose à part avoir plus de liberté, je voulais juste passer à la vie active.

– « Vous avez beaucoup voyagé avec vos grands parents ».

– « Oui, iels ont pris le rôle de mon père absent ».

– « Vous êtes particulièrement sensibles aux effets du cannabis. Quand vous en êtes-vous rendu compte ? »

– « Vers 18 ans ».

– « C’est pour manifester la colère que vous étiez dans le mouvement punk ? »

– « J’ai une tendance à être anxieux des humains, je developpe d’abord une forme de retrait puis quand je me sens en sécurité je suis très sociable. 

La période de la rue a duré 2 ans, puis il y a eu le camion en 2011/12, j’avais fais le choix de faire une rupture avec ma famille, trop colérique ».

– « Vous êtes devenu sédentaire ? » 

– « Premier appart en Ariège en 2017. Pour la première fois je m’entendais penser et j’ai pu me pencher sur mon développement personnel ».

– « Passage à Sivens ? »

– « Après le collectif à Cubjac. J’en ai marre de ce lieu et de ma mère, je me rapproche de Toulouse pour faire du maraîchage, j’entends alors parler de Sivens comme d’une nouvelle aventure, les gens étaient sympas alors j’y suis allé. » 

– « Vous êtes en colère à ce moment là ? » 

– « Colérique oui mais violent non. Il y avait une cause qui permettait de canaliser cette énergie dans un projet constructif ».

– « Projet de fabriquer du jus de fruit ? avec W et B ? »

– « Oui, mais le projet n’est pas arrivé au bout car trop de désaccords sur la manière de s’y prendre, même si nous étions tous d’accords sur le fond. »

– « Pourquoi ce projet n’a pas abouti ? »

– « De manière générale, les choses ont du mal à aboutir dans mon parcours ».

– « Alcool ? »

– « Auto sevré petit à petit ».

– « Le confinement, quelle a été votre réaction ? » 

– « Paradoxale. A la fois c’était une période où j’allais bien, où j’étais dans un endroit que j’aimais, et à la fois chaque fois que j’allumais la télé ou internet ou que je parlais avec des gens j’avais l’impression que tout allait mal ».

– « La collectivité ? Vous aimez bien ? Vous la subissez ? » 

– « Un peu de tout ».

– « airsoft ? entraînements ? » 

– « On joue. Je ne peux pas qualifier d’entraînement une initiation de quelques heures ».

– « Problèmes de santé ? » 

– « J’ai une tendance à somatiser beaucoup, surtout depuis le début de cette enquête.

Avec les arrestations et la répression, j’ai développé des douleurs aux cervicales ». 

– « Armes ? »

– « J’ai essayé une fois avec W à Parcoul »

Assesseuse :

– « Association « la passion des amies » : délire de survivalisme ? » 

– « C’est le jeu dans lequel je me suis mis pour faire ça, j’avais envie de passer du temps avec mes potes. Je n’ai jamais pris ça au sérieux

– « Zad sivens / nddl ? contexte d’affrontements ? » 

– « Ca m’a donné encore plus envie de déplorer cette violence, des deux côtés, car elle fait du mal des deux côtés. J’en retire une grande expérience militante, des valeurs, du lien social, mais aussi des séquelles par rapport à la mort de Rémi. Après ce qui lui est arrivé je ne pouvais plus écouter un feu d’artifice sans avoir les larmes qui coulent ». 

Procureure :

– « Je crois que ce que vous avez dit est très intéressant et que vous vous êtes pas mal livré.

Vous répétez beaucoup « fatiguant », cette lutte vous a t elle pesée ? »

– « Un peu. A ce moment là j’ai envie de faire une rupture avec tout ». 

Est-ce que cette rupture avec vos ami•es à ce moment peut être liée avec une volontés de rompre avec une atmosphère de violence et de haine envers la police et l’État ?

L répond sur son cheminement personnel et émotionnel, il parle de valeurs humaines et non d’idéologie.

– « Quel est votre problème avec la trahison ? »

– « C’est de l’anxiété, anxiété que des proches puissent faire des choses à mon encontre, anxiété générale. Une fois que je fais confiance, s’il y a quelque chose qui entrave cette confiance je peux me sentir trahi ».

L’avocate fait le rapprochement entre ce sentiment de trahison et la petite enfance.

L : « C’est évident ».

L’avocate reprend la déclaration de personnalité de sa mère: qu’a-t-elle dit sur vous ? 

L: Que j’etais chiant?

Elle a déclaré que vous étiez le meilleur fils du monde. 

Liens : 

    M 2020

    S pas du tout

    F 2013

    W sivens

    B sivens

Déclaration : « Si j’ai gardé lien avec F W et B c’est parce qu’ils ont quelque chose que je n’ai pas, c’est leur humour. C’est eux qui m’ont fait découvrir le plaisir de jouer ». 

VENDREDI 6 OCTOBRE: LES EXPLOSIFS

En passant

06/10

Demande d’ajout de vidéos au dossier : Les avocates ont sollicité l’ajout de vidéos au dossier, enregistrées  à Parcoul. La séquence, reçue le matin même d’une personne présente sur place, montre un petit bateau sur l’eau produisant un son risible, un pétard. Bien que le procureur ait consenti à l’ajout, il a stipulé que seuls de courts extraits seraient acceptés. La visualisation complète de la vidéo est prévue d’ici le mardi prochain, le 10 octobre.

Questions de la juge à Simon : 

 Métier d’artificier : Simon, spécialiste en feux d’artifice, est interrogé sur son métier et ses essais individuels, soulignant leur caractère artisanal. La juge explore le RDV anticipé avec F en février et énumère les éléments saisis lors des perquisitions, dont des équipements pyrotechniques. Simon informe sur son passage à Paulnay, soulignant la nature amicale de sa visite, survenue dans une période difficile de sa vie, marquée par des problèmes conjugaux et un burnout.

 La juge interroge Simon sur le contexte des retrouvailles en amont de son passage à Paulnay. Il mentionne que F, avec qui il s’était réuni en décembre, était potentiellement fiché S et sous surveillance après son retour du Rojava. Simon précise qu’ils ne s’étaient pas vus depuis au moins deux ans avant le départ de F vers le Rojava. La rencontre de février visait à renouer des liens amicaux dans un contexte personnel complexe pour Simon.

 La juge interroge Simon sur la connexion entre son expertise des explosifs et celle de Flo. Simon explique que ces discussions étaient anodines, centrées sur son intérêt pour les effets pyrotechniques. La découverte d’un explosif de guerre aurait pu lui permettre de découvrir de nouveaux effets, intéressants par exemple pour de la reconstitution, des films de guerre… Durant leur rencontre à Paulnay, Simon a apporté son équipement d’artificier de base, sans connaître les éléments que F allait fournir, et ils ont saisi l’occasion pour expérimenter, un matin.

La juge poursuit en interrogeant Simon sur sa fabrication d’explosifs et les matériaux utilisés. Simon confirme qu’il fabrique des explosifs selon les demandes qu’on lui fait dans le cadre professionnel, en utilisant divers éléments tels que la poudre noire, des chandelles à gâteau, un ventilateur, de l’essence, du gasoil, un mortier ou du gaz. Il regarde beaucoup de vidéos et de tutos sur le sujet.

Ses expérimentations ont lieu en hiver au camping ou sur le terrain de sa mère lorsque les gîtes sont inoccupés, afin de ne déranger personne.

Simon explique également avoir acheté du nitrate de sodium et du potassium (perquisition), nécessaire car, paradoxalement, les artificiers ne peuvent pas acquérir de la poudre noire en armurerie avec leur certificat. La recette de fabrication de la poudre noire a été trouvée sur WikiHow.

Enfin, la juge questionne Simon sur la présence de poudre noire à Paulnay. Simon précise qu’il n’a pas fabriqué la poudre en amont, mais a apporté l’équipement nécessaire. La poudre utilisée était de la poudre d’étoile récupérée à Disneyland, provenant de feux d’artifice défectueux où les étoiles sont des retombées non brûlées.

On précisera que la poudre qui a été trouvée en perquisition, a été fabriquée après Paulnay, donc ça n’a rien à voir…

La juge explore ensuite la question des tentatives de Florian pour fabriquer des explosifs.

Simon pensait que Florian avait cette compétence, mais ce n’était pas le cas. Pour Simon, c’était une opportunité d’apprendre quelque chose de nouveau, bien que le test nitrate d’ammonium et sucre n’ait pas abouti. Il souligne que ses aspirations à apprendre témoignent d’elles-mêmes.

Aviez-vous conscience du danger ?

Simon explique qu’il était conscient des risques pour lui-même, mais il était catégorique sur le fait de ne jamais mettre autrui en danger. Ils sont d’ailleurs tous les deux conscients des risques, lui en raison de son métier, et Florian en raison de son expérience au Rojava.

La juge questionne Simon sur le choix de Paulnay comme lieu de rencontre.

C’est juste un compromis pratique en termes de distance.

La grande question inutile : et comment communiquiez-vous ?

Ils utilisaient l’application Signal. La juge répond que ce mode de communication n’est en effet pas interdit. Maître Kempf demande a la juge de répéter la phrase pour être sûr d’avoir bien entendu 🙂

Puis, concernant ses audiences avec le juge d’instruction puis au tribunal, la juge semble s’interroger sur la peur que ce qu’il dise soit mal interprété.

Simon exprime qu’au début, lors de son premier interrogatoire, il avait cette appréhension, craignant que tout soit retourné contre lui. La pression de la prison et la complexité de la procédure ont également contribué à cette inquiétude. Aujourd’hui, bien qu’il soit plus à l’aise pour discuter, la juge rappelle que ce n’est pas une simple conversation.

Enfin, la juge interroge Simon sur une mission confiée à son amie.

Simon confirme, expliquant qu’il avait demandé à son amie de publier sur Facebook à sa place avec son compte. C’était un stratagème pour créer du mystère autour de leur rencontre afin qu’elle ne lui en veuille pas. Il a éteint son téléphone pendant cette période.

La juge interroge Simon sur le vol d’engrais et ses intentions.

S confirme, « On devait dérober de l’engrais, mais je me suis dégonflé et je suis parti me coucher. » La juge cite un passage d’une retranscription : « C’est maintenant ou jamais qu’il faut se prendre des objectifs ».

S : Oui, c’était le plan, mais j’ai changé d’avis et ai décidé de ne pas participer. La citation reflète probablement mon état d’esprit à ce moment-là.

En ce qui concerne la perspective de se revoir avec Florian, Simon précise qu’ils avaient envisagé de se revoir, mais pas nécessairement pour refaire des essais. 

La juge cite une écoute, à propos d’une tierce personne : « Elle n’est pas du genre à poukav, elle ne connaît même pas ton nom de famille. » À cette période, les inquiétudes tournaient en réalité autour d’un potentiel envoi d’argent au Rojava, pour l’achat d’armes ou d’équipement, mais qui a ensuite évolué vers le soutien à l’association humanitaire Roja Sor. 

La juge revient sur le sujet du vol d’engrais.

Simon relate avoir tenté de contacter une amie au téléphone, C, pour obtenir un alibi, mais n’ayant pas obtenu de réponse, il a renoncé après que l’effet de l’alcool avait diminué, et est parti se coucher. Il reconnaît n’avoir eu aucune connaissance de la provenance du produit recupéré dans le camion de F. 

Concernant la journée du 15/02/2020, la juge cite des sonorisations, relatives à une recette détaillée avec du nitrate d’ammonium et du sucre. 

S. émet des doutes sur les connaissances de Florian, suggérant que ce dernier cherchait davantage à se mettre en avant qu’à contribuer à un véritable apprentissage. Après l’échec initial, ils ont cherché en vain d’autres types de nitrate dans des magasins.

La juge aborde ensuite la journée du 16/02/2020.

Simon explique qu’ils ont discuté de l’échec de la veille, constatant que le produit ne séchait pas comme prévu. Il exprime sa déception et note n’avoir jamais retrouvé cette recette spécifique sur internet.

Quelques courts échanges sur des éléments des écoutes et sonorisations :

La juge interroge Simon sur l’utilisation des talkies.

C’était au cas où pour le vol d’engrais, mais on se chauffe mutuellement.

La juge demande des clarifications sur les mentions de « big brother. »

C’était pour vérifier s’il y avait des caméras.

La juge aborde la question de prévenir les avocats.

C’était au cas où on se ferait prendre.

Sur un truc à cacher ?

Les téléphones portables.

La juge veut des précisions sur la mise au point de certains codes.

Tout cela se réfère uniquement au vol d’engrais.

La discussion porte ensuite sur des propos saisis lors d’écoutes concernant des réactions en manifestation, notamment des propos violents envers les forces de l’ordre.

S : Il s’agit de discussions virilistes, « juste qui a la plus grosse. » Ce ne sont que des fictions, des hypothèses. Dans ce genre de discussion, il faut surenchérir pour être à la hauteur. Et je suis face à quelqu’un que j’admire. Mais ça reste des conversations de gens à moitié bourrés.

L’avocate intervient alors pour signaler qu’il y a 30 minutes de pause entre les 2 conversations dans cette écoute.

De nouvelles questions concernant le couple de S ou portant sur la confiance que Florian pourrait avoir en C., même si on est sensé aborder les faits (explosifs) et si la juge a pris le soin de préciser qu’elle n’était pas là pour questionner ses relations privées, les questions reviennent très souvent sur la vie privé et les relations… 

Questions du procureur à Simon :

Le procureur national antiterroriste interroge Simon sur les circonstances de ses retrouvailles avec Florian.

Simon explique qu’ils trainent de toute façon dans le même milieu, donc forcément, au fil des discussions avec des amis communs, il apprend que Florian est parti au Rojava. Inquiet de son retour, cela devient le catalyseur pour renouer le contact. Le rendez-vous a lieu sur le terrain à Bollène le 08/12/2019. Ces retrouvailles ne sont que des rencontres amicales et des discussions, avec naturellement des sujets liés aux explosifs, domaine professionnel de Simon.

Le procureur argue que les déclarations de Flo ne coïncident pas sur ce sujet. S lui explique donc qu’ils sont de vieux amis et qu’ils parlent d’un peu de tout…

Le procureur interroge Simon sur une écoute où ce dernier évoquerait de manière mystérieuse son intérêt pour le Rojava.

Simon explique qu’il avait déjà effectué des recherches sur la région et s’était posé la question de partir là-bas. Ses discussions avec Florian ont fourni des réponses à ses interrogations, mais finalement, cela l’a dissuadé d’envisager sérieusement cette option.

Le procureur aborde une autre écoute où Simon et Florian mentionneraient « l’ennemi. »

Simon clarifie qu’il s’agissait d’un abus de langage, probablement en référence à Daech.

La discussion se tourne vers une publication Facebook de Simon : « 2020, pas mal de décisions à prendre »

Simon souligne que c’est typiquement le genre de phrase (qui l’énerve parce que depuis le début on nous refuse des accès aux écoutes pour des questions de respect de la vie privée, et là, vous l’étalez et le détournez) peut aisément être détournée ! Il explique qu’en l’occurrence cette déclaration était relative à des problèmes de couple, sans aucun lien avec des activités suspectes.

Le procureur questionne Simon sur une conversation portant sur des tests d’ammonitrate antérieurs.

Simon rejette ces allégations en soulignant les différences notables entre les enregistrements audio et les retranscriptions de la DGSI.

Le procureur aborde le sujet de potentielles discussions sur des violences contre l’Etat.

Simon admet qu’il s’agissait simplement d’une conversation entre deux personnes sous l’influence de l’alcool, échangeant des propos virils sans réelle intention d’action : « Mettez deux gauchistes ensemble dans un camion avec des bières et voilà ! »(rires dans la salle)

Le procureur cite les déclarations d’un autre artificier interrogé par la DGSI.

Simon lui expose la loi en matière de transport de matière active, en sa qualité d’artificier. C’est assez agréable de voir le prévenu expliquer la loi au procureur ! 

Un artificier a le droit de transporter jusqu’à 333 kg de matières actives.

S précise que l’ammonitrate est en vente libre, que ses projets de tests étaient conformes aux règles, même si il est aussi parfois en dehors des clous. Un artificier de niveau 2 engage sa propre responsabilité lors de tests, réalisables sur tout type de terrain. Lui faisait les siens une fois le camping fermé, pour ne déranger personne.

Le procureur veut alors savoir si S est au courant de potentiels « buts » de Flo…

S se dit qu’il voulait peut-être s’entraîner pour retourner au Rojava. Mais le fait que les essais ne marchent pas n’est pas étonnant, il reconnait mieux là son vieux pote, c’est plus logique.

Le procureur, peu convaincu sur ses volontés d’apprentissage, souligne qu’on dirait que c’est plus lui qui vient lui donner des coups de main que l’inverse. En fait, S. et F. se voyaient en effet, et S. pouvait lui filer des coups de main, mais c’était pour organiser des concerts de soutien pour le peuple du Rojava. 

Questions des avocates à Simon :

    Maitre Camille Souleil Balducci remet en évidence l’origine douteuse des sonorisations du terrain de Paulnay :

La DGSI apprend l’existence de ce terrain quatre jours avant la venue de F et S sur les lieux et demande dans la foulée la sonorisation et la pose de caméras sur ce terrain en justifiant qu’ils vont certainement s’y rendre et probablement tester des explosifs… La DGSI aurait donc des dons de médium? Ou bien nous n’avons pas connaissance de l’entièreté de la surveillance qui leur était imputée.

    Deuxième point soulevé par l’avocate, la vidéo prise a Paulnay par la DGSI est récupérée sur les lieux le 17/02/20. Des mois s’écoulent et le 30/11/20, à la veille des arrestations, alors que la vidéo devrait être expertisé, retranscrite et mise sous scellés depuis longtemps, la DGSI écrit un PV pour signaler que cette vidéo a été effacée suite à une erreur, et qu’il n’y a jamais eu de retranscription. Du jamais vu…

    Autre question sur des hypothétiques « tirs de rafale », séquence de « tirs d’airsoft » qui apparaissent dans les rapports de surveillance des agents alors que les retranscriptions des écoutes stipulent des bruits de marteaux et de spatules. (ce qui correspond aux tests de fabrication en cours). Ces tirs en rafale ont largement été repris par le PNAT alors qu’il était évident à la lecture des PV que c’était une erreur de retranscription.

    Maitre Alice Becker interroge Simon sur une conversation avec Carglass intercepté durant son séjour à Paulnay au sujet d’une explosion de vitre et qui a engendré de la part de la DGSI des filatures multiples les jours suivants. Simon explique que pour un projet de court métrage, la demande était de faire exploser une vitre de voiture et qu’il a appelé Carglass pour se renseigner sur les débris de glace et autres précautions à prendre.

    Autre question de l’avocate, au sujet d’une photo considérée comme suspecte par la DGSI : un empaquetage, entouré de scotch marron avec des tiges de métal qui en sortent = PIPE BOMB ?? et bien non, c’est un colis reçu quelques jours avant composé des tiges de métal pour construire une étagère industrielle en kit.

  Fin des 4h d’interrogatoire.

MERCREDI 4 OCTOBRE

En passant

04/10

La séance a débuté par l’énoncé du planning du procès :

– lors des premiers jours, la parole sera donnée à chacun.e des inculpé.es pour qu’iels puissent s’exprimer, répondre aux questions visant à esquisser leurs parcours, éventuels antécédents judiciaires, personnalités et déterminer quels étaient leurs liens au moment des arrestations

– le 09 octobre sera abordée la question des explosifs

– le 10 octobre au matin l’expert mandaté par la cour viendra témoigner

– les 11 et 12 octobre la question de la détention d’armes par les prévenu.es et celle des parties d’airsoft seront étudiées

– le 13 octobre l’audience portera sur le cryptage des moyens de communication des prévenu.es et leurs potentiels « projets »

– le 17 octobre seront entendu.es des témoins de « contexte »

– le 18 octobre des témoins de « personnalité » seront appelés par la défense pour s’exprimer à la barre

– les 18 et 19 octobre des interrogatoires plus approfondis sur les personnalités de chacun.des prévenu.es auront lieu (C et M le 18, B, W, F, S le 19)

– le 20 octobre auront lieu les réquisitions du Parquet

– les 24 et 25 octobre se tiendront les plaidoiries de la défense

– les 26 et 27 octobre auront lieu les délibérés

– le 27 octobre le jugement sera rendu

La requête des avocats de la défense de faire témoigner les enquêteurs de la DGSI a été refusée par la présidence.

4/10

Les avocats de la défense ont argué que les policiers sont des citoyens comme les autres et à ce titre doivent pouvoir répondre de leurs actes et être soumis à comparution. Plus de 150 procès-verbaux leur sont attribués dans la procédure, dont certains essentiels à l’accusation, qui repose pour beaucoup sur leurs investigations. Ils sont donc des témoins qui doivent absolument être entendus.

Certains éléments, notamment une vidéo filmée à Paulnay, sont manquants au dossier alors que ce sont des éléments décisifs qui pèseront sur le délibéré, et seuls ces deux agents peuvent témoigner de ce qu’ils contenaient. De même, un « tri » a été effectué au sein des écoutes à la discrétion de ces agents, sans l’aval d’un magistrat, sans que l’on sache sur quelles bases.

La citation à témoigner de M. Barraud, expert en explosif, ne repose que sur les éléments reccueillis et sélectionnés par ces agents sans que l’on puisse savoir sur quels critères ces éléments ont été transmis, nourrissant le soupçon d’une instruction uniquement à charge.

A cette requête le parquet a répondu qu’aucune demande préalable d’entendre ces témoins n’avait été formulée avant le procès, que les agents de la DGSI ne sont pas des témoins « lambda », et que c’est une stratégie de diversion de la défense de s’attaquer à l’institution pour éviter de parler du fond de l’affaire, à savoir l’accusation de sept personnes d’avoir des intentions terroristes.

« les principes du contradictoires s’appliquent en toutes circonstances » (présidente)

1207SI et 856SI sont les principaux agents (environ 150 PV dans le dossier) il est donc primordial pour la Défense d’avoir leur témoignage. Ils sont témoins directs des éléments à charge qui doivent être débattus.

Par exemple, ils sont les seuls à pouvoir expliquer pourquoi la vidéo de Paulnay a été effacée et ce qu’elle contenait. Ou encore les éléments manquants dans les réquisitions, ou le tri qui a été effectué dans les retranscriptions d’audios.

Si le PNAT souhaite faire citer en témoin un expert en explosif, qui lui même s’est basé sur des retranscriptions de la DGSI, la Défense doit interroger ces agents sur la manière dont ces retranscriptions ont été effectuées.

Selon une avocate, il y a là une « rupture de l’égalité des armes entre le ministère public et la Défense ». Elle demande à ce que soit, en dernier recours, utilisé l’art. 439 du CPP qui demande l’intervention de la force publique pour faire citer un témoin.

4/10

Le Parquet fustige les avocats de faire diversion et d’invoquer l’article 6 de la CEDH comme un « point Godwin ». Il déclare « j’en suis presque à tenir un décompte sur toutes les mentions aux atteintes aux droits de la Défense » et dénonce un « sur-activisme de la Défense ». Afin de délégitimer les atteintes graves aux droits de la Défense, il dénonce une stratégie de « détourner l’attention du fond du dossier ».

Sur le « tri » opéré par la DGSI concernant les écoutes, il évoque l’article 100-5 du CPP qui stipule que seuls les éléments à charge doivent être retranscrits.

Les avocat·es rappellent que leur rôle et l’honneur de leur profession est bel et bien de fustiger toute atteinte aux droits de la Défense et qu’iels continueront tant qu’il y aura lieu de le faire. Iels rappellent notamment que des choses banales, telles que l’accès au scellé du contenu d’un disque dur, sont rendues impossibles par la DGSI. Une autre avocate rétorque qu’il est primordial pour la Défense de comprendre comment des PV peuvent dire le contraire des sonorisations ».

Suite à la remarque d’une avocate, la présidente rappelle que « nous ne sommes pas dans une juridiction d’exception » (lol).

4/10

Les juges prendront presque une heure pour délibérer du fait d’insister auprès de la DGSI pour que les agents répondent à leur convocation, pour finalement ne donner aucune réponse claire au retour du délibéré.

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PHASE DE PRESENTATION DE CHAQUE INCULPÉ

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La présidente souhaite procéder par ordre alphabétique. Elle dit vouloir « mieux connaitre » les inculpé·es et passer en revue le CV de chacun·e. Les questions sont en général soit banales soit perfides. Au final, elles insistent énormément sur les points au cœur des présomptions de culpabilité : opinions politiques, voyages, chocs liés aux violences et crimes policiers à la ZAD de Sivens, critiques de la justice, réactions au confinement, etc.

Les questions des juges poussent dans le sens du PNAT et tentent de faire parler les inculpé·es sur leurs rapports aux violences policières, aux institutions, à l’écologie, à la lutte, etc.

~~~ Bastien

Il aurait du avoir un CDI au moment du début de l’affaire, qui a empêché cela.

Il voulait s’installer sur un terrain.

Est évoquée une sensibilité à la cause animal dont il avait parlé plus tôt : « Est-ce que cette sensibilité irait jusqu’à arrêter la viande ? »

Une tentative est faite par les juges pour déceler si B serait adepte du survivalisme, on lui demande de s’expliquer longuement sur ses craintes du futur (éco-anxiété, fascisme, etc.). « Est-ce qu’il faut se protéger d’un péril à venir ? » Une juge lui demande s’il est en « rupture avec la société ». Il répond que non, qu’il consomme, notamment des jeux vidéos. Son avocat lui fait dire que non, qu’il est très sociable.

Questions sur ses expériences des ZAD de Sivens et NDDL : « Je lis dans votre enquête de personnalité que vous avez été très marqué par la violence que vous y avez vu. » Elle cherche à le faire raconter, mais il ne parle que de rencontres, de personnes avec des savoirs-faire artisanaux (brasseurs, boulangers, éleveurs…) Elle finit par évoquer l’assassinat de Rémi Fraisse, et donner le fond de sa pensée : « Y a-t-il eu un problème avec les forces de l’ordre ? Pas de ressentiment ? »

Des propos recueillis en GAV sont cités. Il ne s’en souvient pas. Kempf lui demande « Pourquoi ? » B se met à pleurer. La Juge note son émotion. C sort en pleurant par empathie.

La juge enchainera des remarques mesquines contre C, comme si sa sortie était un affront à son autorité. Lors de son interrogatoire, l’une des juges cherchera à donner du sens à cette empathie, comme si c’était surprenant, étrange, signe de quelques chose d’autre que de l’empathie.

La juge termine sur les liens entre les inculpé·es : il ne connait pas deux d’entre eux, et à peine deux autres.

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~~~ MANU

Il commence par une déclaration spontanée pour rappeler la violence et l’incompréhension de cette procédure. Il dit qu’il est en colère d’être là face à elles, et qu’il est terrorisé. Évoque la violence de cette répression, et des 10 mois d’enfermement. Il rappelle que dans ce contexte il aura peut être du mal à répondre à certaines questions.

Des applaudissements spontanés sont très vite réprimés par la présidente qui ne tolère aucune réaction du public.

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Il revient sur son parcours de vie et ses voyages. Notamment la Colombie. Il rappelle que la DGSI avait émis une suspicion qu’il était entré en contact avec l’ELN là-bas, suspicion que le Juge d’Instruction a déformé en affirmation. OKLM quoi.

« Tous les mots sont piégeux » nous enseigne la présidente. (bac +10 en philo)

Il est interrogé longuement sur les motivations qui l’ont conduit à vouloir rejoindre le Rojava. Un choix murement réfléchi d’aller aider le peuple kurde sur laquelle les juges laissent planer leur suspicion que ce serait dans le but de s’aguerrir aux techniques militaires (on sent que l’article de Mathieu Suc en 2019 a bien été lu!). Les juges cherchent à lui faire dire qu’il voulait y aller pour prendre les armes. Il répond brillament « je voulais être cohérent avec l’amour que je porte pour les gens, la nature et les animaux ». Mais la juge persiste : « vous vouliez apprendre des expériences en milieu… hostile ? » Les questions tordues continuent : il aurait déclaré vouloir « lutter contre l’intolérance », Il lui est demandé de préciser laquelle. ça a quelque chose à voir avec les violences policières ? s’interroge la juge, hors sujet complet.

Lui demandent comment il envisage sa lutte. Il prend l’exemple du fait de réagir à des propos lors de discussion. La juge :  » donc la lutte ça peut être par la parole ? » « oui. » « Et ça peut prendre d’autres formes ? » « 

Vient le tour de la Procureur, qui ouvre également les hostilités : « vous pratiquiez l’airsoft pour vous entrainer à partir au Rojava ? » Elle insiste sur le Rojava, son contact sur place, comment il a communiqué et ce qu’il lui a dit. Elle revient également sur la thèse du « terrain d’expérimentation », qui pour le PNAT, incapable de comprendre ce que signifie une révolution sociale, écologiste et féministe, se résume à expérimenter le maniement des armes pour s’aguerrir. Elle continue en faisant référence à des propos tenus en GAV concernant la culture du « martyr » et laisse penser que ce serait pour y mourir en martyr que Manu aurait souhaité rejoindre la révolution du Rojava. Conception réductrice et raciste de la procureur, qui encore une fois est à des années lumières de ce que peut signifier, pour un peuple en proie à une politique génocidaire, que de « mourrir en martyr » et rejoindre le bataillon immortel. Elle demande ensuite si en décembre 2020 il avait toujours l’intention de se rendre au Rojava, afin de faire valider la thèse du PNAT qui consisterait à dire que les parties d’Airsoft sont des entrainements dispensés par Libre Flot.

S’en suivent des questions stupides sur son choix d’avoir traversé l’europe en camion avec son ami pour se rendre en Irak au lieu de monter dans un avion asceptisé à Paris pour atterrir directement là bas.

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Elle tente d’insister sur l’aspect TRAUMATIQUE (la psychiatrisation est constante pour chacun·e des inculpé·e) de l’expérience de Libre Flot là bas, et demande si ce ne serait pas cela qu’il aurait cherché (encore l’idée de partir pour mourir en martyr).

Enfin, les avocat·es prennent brièvement la parole. Iels observent que l’entièreté de la personnalité de Manu ne semblent pas réellement intéresser le ministère public, avant de revenir sur les valeurs de Manu (autonomie, entraide, lien avec la nature) et son trait de personnalité principal : c’est une vraie piplette!

Enfin, la présidente fait un rapide bilan de ses liens avec les autres inculpé·es: il connait bien Libre Flot mais les autres très très peu.

~~~ CAMILLE

Elle déclare être dans un état émotionnel très éprouvant et suivre un traitement médical. Elle rappelle (sans le nommer ainsi) que les procédures judiciaires sont violentes et que se présenter devant un tribunal est une violence. Elle rappelle également l’absurdité des accusations et de la procédure.

Les juges sont très hostiles avec elle. Après avoir passé en revue son CV et ses engagements dans la vie : le soin, le sport, l’animation, le militantisme, etc.

4/10

La discussion se crispe pendant 1h autour de son refus des expertises ordonnées par le JI, et du refus de certain.es de ces proches de répondre à l’enquête de personnalité. « Vous donnez l’impression que vous étiez presque en colère qu’on cherche à vous connaitre ». Elle répond à plusieurs reprises qu’elle préfère répondre d’elle-même à des questions qui la concernent. Elle évoque le contexte particulièrement bouleversant dans lequelle elle a écrit cette lettre, et tient à ce qu’elle soit comprise en lien avec ce contexte (arrestations, prison, Contrôle Judiciaire, flou du dossier). Et en même temps, elle affirme être ouverte au dialogue.. Les juges ne démordent pas de la question et s’acharnent à la confronter à une lettre qu’elle a écrite au juge d’instruction, dans laquelle elle dénonce, juste après sa sortie de détention, la présomption de culpabilité et les biais évidents de ce type d’expertise. Elle s’appuie sur un livre de Véronique Blanchar « Sous l’oeil de l’expert » qu’elle a lu en détention.

Les juges se surprennent qu’elle remette en question cette démarche, et cherchent à interpréter sur ce que cette critique cacherait. Une juge assesseuse se montre particulièrement agressive en faisant le lien entre cette lettre, cette critique d’une institution étatique, et une potentielle volonté de « s’en prendre aux institutions », comme cela était énoncé par la DGSI dans son rapport de judiciarisation. Elle cite, interpellée, un extrait de la lettre de Camille où elle dénonce les oppressions classistes, racistes et sexistes de la « Justice ». « La juge que je suis dois vous poser la question : Est-ce que vous reconnaissez la Justice française ? »

4/10

Camille revient sur le contexte de l’écriture de cette lettre. Elle souligne aussi le fait que cette critique des institutions n’est pas faite par elle seule. Sur une citation de Véronique Blanchar qu’une des juges relève dans la fameuse lettre, Camille lui répond que ce serait à l’intéressée de développer plus avant, et qu’il y a des spécialistes sur le sujet dont elle n’est pas.

Les juges n’ont de cesse d’insister : « Je vous rappelle que nous rendons la Justice au nom du peuple français! » s’exclame la présidente. La salle pouffe de rire. La messe est dite !

Cette même assesseuse de continuer, éberluée : « Vous dites qu’il y a des réflexions à avoir sur le fonctionnement des institutions. Vous réflechissez dans quel cadre ? »

Au détour d’une réponse de Camille, une personne applaudi. La juge demande aux flics de sortir la personne. Ils prennent quelqu’un dénoncé par le Proc. D’autres proches de Camille se lèvent et protestent en quittant la salle. C’est un procès politique.

Puis une autre assesseuse embraye sur les études de C. Elle la fait parler du sujet de son mémoire de Master de littérature qui en gros est autour de l’impact de l’expérience de la guerre sur la création littéraire de 3 auteurs comme Dino Buzzati. Elle cherche à savoir ce que ça lui a apporté comme vision du monde, comme projet de vie. C évacue l’absurde question sur le projet de vie, mais elle développe sur les enjeux autour du rapport à la mort, au deuil :  » faire son deuil seul ou pouvoir le faire collectivement par exemple, ce n’est pas du tout pareil ». L’assesseuse de tenter plus frontalement, en annonçant qu’elle risque d’être « à côté de la plaque » : « Vous avez étudié des auteurs qui ont vécu la guerre, est-ce qu’il y a un lien avec un projet d’action violente ? » C de préciser qu’elle n’a pas étudié la guerre, que les écrits n’étaient pas historiques, mais qu’il s’agit de littérature. L’assesseuse de reconnaitre qu’elle n’y est pas « je n’ai pas fait d’études littéraires »…

Le procureur : « Qu’est-ce que vous pensez de l’usage de la violence ? »

– « Mes positions sont très claires : je ne cherche pas de violence, et aucun fait de violence ne m’est repproché. » Le procureur évoque des « formes de violences » comme chez les blacks blocs, et dans les ZAD : « Quelle est votre position par rapport à la légitimité de ces violences ? »

Son avocat Guillaume Arnaud vient clôturer la séance, en revenant sur le sujet de la lettre :

– Est-ce que vous l’avez écrite parce que vous pensez que vous étiez la meilleure personne pour répondre à des questions vous concernant ?

– Oui.

– Est-ce que vous pensez qu’on peut critiquer la Justice ?

– J’espère qu’on peut le faire !

– Est-ce que vous pensez que critique signifie violence ?

– Non.

– Est-ce qu’il est difficile de se défendre d’un projet qui n’existe pas ?

– Oui.

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