Depuis plus de trois mois, sept personnes sont mises en examen et cinq d’entre elles croupissent dans plusieurs prisons d’Île-de-France pour «association de malfaiteurs à caractère terroriste». Leur crime? Partager des idéaux d’émancipation et de justice sociale.
Le 8 décembre 2020 à l’aube, s’est déployé simultanément dans plusieurs villes de France un «coup de filet anti-terroriste», donnant lieu à l’arrestation et la garde à vue pendant 96h de neuf personnes, présentées comme appartenant à ce que la police et le pouvoir politique désignent comme étant «l’ultra-gauche».
Depuis le premier jour de leur incarcération les cinq détenu.e.s sont toustes DPS (détenu.e.s particulièrement surveillé.e.s), c’est-à-dire soumis.e.s à un régime de détention strict, avec son lot de brimades et de privations (rétention aléatoire des courriers et des colis, absence d’activités collectives, impossibilité d’accéder à une formation ou à un travail, déplacements obligatoirement encadrés par deux surveillants, fouille au corps après chaque parloir…)
Le terme «d’ultra-gauche» est utilisé à dessein pour servir de repoussoir, sans jamais que soient définis sérieusement son contenu politique ni ce qu’il recouvre. Il résulte d’une construction policière, médiatique et politique visant à décrédibiliser en la criminalisant toute opposition progressiste un tant soit peu radicale.
Le chef d’inculpation «d’association de malfaiteurs à caractère terroriste» peut recouvrir aussi bien des intentions que des faits, faisant fi des preuves matérielles, ici très maigres et agrégées dans le seul but de servir le récit policier. Tout laisse à penser que leur adhésion supposée à des idées anticapitalistes et antiautoritaires a généré la croyance en leur culpabilité. Ce dossier semble illustrer parfaitement le biais de confirmation qui consiste à inverser le processus de jugement, partant d’une conviction que l’on cherche à étayer à tout prix.
Des «lois scélérates» il y a plus d’un siècle au fiasco de l’affaire Tarnac, le pouvoir politique a toujours cherché à réprimer les acteurs des luttes pour l’émancipation en les faisant passer pour «terroristes», les présentant comme faisant preuve d’une violence aveugle, irrationnelle et sectaire, sans jamais interroger sa propre violence et ses conséquences concrètes dans chaque parcelle de la vie de chacun.e.
Cette affaire est fondamentalement politique, elle vise à museler toute opposition et à terroriser les acteurs des luttes tels les militant.e.s libertaires et anti-autoritaires, syndicalistes, zadistes, et tout groupe ou personne aspirant à la sortie du capitalisme et son cortège d’injustices sociales, économiques, sexistes, racistes et validistes. Elle intervient dans un contexte qui voit se lever de nombreuses voix et un front large en opposition aux lois de surveillance et de contrôle toujours plus liberticides (loi Sécurité globale, loi séparatisme, Livre blanc de la sécurité intérieure, décrets PASP…).
Ces arrestations arbitraires prennent donc place dans un agenda politique, dont le but est de criminaliser toute contestation. Elles constituent un avertissement et font planer une menace visant à nous enfermer un peu plus chaque jour dans le défaitisme, la peur et la sidération.
Cela n’arrive pas qu’aux autres, désormais chacun.e d’entre-nous peut se retrouver en détention préventive, après 96h de torture blanche.
Nous avons tou.te.s des opinions politiques et des convictions, ce n’est pas un crime.
Nous croisons tou.te.s des centaines de gens chaque année, ce n’est pas un crime.
Ne nous laissons pas impressionner et refusons de nous laisser enfoncer dans un autoritarisme chaque jour croissant et plus répressif!
Nos camarades ne doivent pas sombrer dans l’oubli, réaffirmons notre soutien aux inculpé.e.s du 8 décembre! Liberté pour toustes!
Soutien aux inculpé.e.s du 8 décembre – Comité francilien
Aujourd’hui
Cela fait maintenant trois mois et demi qu’iels sont détenu.e.s et les demandes de remises en liberté ont toutes été rejetées.
La maltraitance institutionnelle dont iels font l’objet ne vise qu’à les briser. Jusqu’ici rien n’a pu justifier la débauche de moyens mis en œuvre pour les réprimer.
Vous pouvez nous aider à mettre en lumière cette affaire :
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