Fête à luttes ! aux Compeyres, 640 chemin des compayres, Lisle sur tarn (81)
En soutien autours de l’affaire du 8/12 : –> Présentation du livre « Anticiper le bruit sec des verrous » (Editions du Bout de la ville) –> Forum de collectifs militants d’ici & d’ailleurs –> Concerts et DJ Set (Throlz, Pediluve, Mixion, Dj’s Coralista, Dj’s Bisou biceps
Résumé : En 2017, comme tant d’autres militant.es internationalistes, Florian D. dit Libre Flot s’engage auprès des forces kurdes du Rojava pour défendre la révolution sociale alors attaquée par Daesh. À son retour, il est dans le viseur du Renseignement français qui, obsédé par les personnes revenues du front, échafaude autour de lui une affaire abracadabrante. Le 8 décembre 2020, Libre Flot est accusé avec six autres personnes « d’association de malfaiteurs terroriste ». Incarcéré près d’un an et demi en détention provisoire, il subit la « torture blanche » de l’isolement. Il écrit pour tâcher d’y survivre. Ses textes, d’une humanité bouleversante, auscultent la matière même de la conscience, qui s’atrophie inexorablement quand on la prive d’attachements.
Le 8 décembre 2020, dans divers lieux à travers toute la fRance, se déployait une opération judiciaire et policière « antiterroriste ». A l’approche de la date anniversaire, on avait envie de faire rapidement le point et donner des news.
Cette opération fût déclenchée suite à la surveillance systématique par la DGSI de personnes rentrant d’un séjour dans une des zones considérées par les services secrets comme « dangereuses ». Un juge d’instruction du Parquet National Anti-Terroriste s’est alors saisit de ces notes blanches et a enquêté par l’intermédiaire de la DGSI, sur des personnes entourant un camarade revenu justement d’un séjour au Rojava. Cette enquête, un dossier d’instruction de 1800 pages, se solde par une vague d’arrestations le 8/12/20, suivie de toutes les conséquences subies depuis 4 ans dont on fait un rappel non exhaustif ici.
A l’issue des arrestations, 14 lieux sont perquisitionnés. Après 96h de garde à vue dans les locaux de la DGSI, sous les pressions psychologiques, les interrogatoires sous médicaments, des pièces falsifiées ou hors contexte, 7 personnes sont inculpées. Elles sont alors déferrées devant le juge d’instruction et 5 d’entre elleux sont placées en détention provisoire.
L’affaire a également impacté de nombreuses personnes autour. 12 personnes en tout ont passé 4 jours en GAV à la DGSI, avec de nouvelles arrestations en février et septembre 2021. Un total de 29 convocations, dont la plupart ont été la menace pour obtenir un permis de visite en prison. Sans compter la quantité de matériel et de biens personnels ou informatique qui ont été saisis pendant les perquisitions et qui, à ce jour, n’ont pas été rendus.
Jusque là les inculpé.es ont fait 47 mois de prison cumulés, une mise à l’isolement, des fouilles à nu, des interrogatoires interminables, des refus de soin, des galères d’accès aux colis, cantine, courrier, etc… pendant l’instruction.
Des remises en « liberté » au compte-goutte, le PNAT faisant appel de la libération de l’un d’entre eux, un autre réussi à sortir après une grève de la faim de 36 jours, passant d’une sortie de l’isolement carcéral à 6 mois de bracelet électronique dans le cadre de son CJ. Pour l’ensemble, c’est 277 mois de CJ, comprenant le pointage, la limitation géographique des déplacements, l’obligation de résidence, de travail, les rdv avec « binôme de soutien » (éduc et psy) et le SPIP (Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation)…
Pour finir, c’est un total de près de 150 000e de frais comprenant le paiement des avocat.es, la préparation des colis en prison (habits, revues, livres), la thune pour cantiner, puis tous les frais et les déplacements des soutiens. Et tout ce qui ne se quantifie pas : les séquelles physiques et psychologiques, le mépris, les menaces, les pressions, des relations durablement affectées, la surveillance continue…
Seize après-midi d’audience, soit 1 mois de procès, un rendu 2 mois plus tard et les arguments de la juge donnés 9 mois après le rendu ! Tous.tes sont reconnu.es coupables d’« association de malfaiteurs terroriste » et trois d’entre-elleux de « refus de communiquer ses conventions de déchiffrement ». Iels ont été condamné.es en première instance à des peines allant de 2 à 5 ans de prison, dont 15 à 30 mois de sursis probatoire, impliquant un lourd contrôle médico-social : rdv SPIP, suivi addicto, psy, obligation de résidence, obligation de travail, et donc la menace de faire tomber le sursis en cas de manquement.
Pour 6 d’entre elleux une inscription au FIJAIT (Fichier des auteurs d’infraction terroriste) : contrôle des déplacements à l’étranger, pointage, justification de domicile tous les 3 mois et interdiction de travailler dans certains domaines (santé, fonctionnaire, animation…).
Et toujours l’interdiction de communiquer, sauf pour 2 d’entre eux.
Sur les 7 condamné.es, 6 ont choisi de faire appel du rendu du procès, l’audience aura lieu en novembre 2025.
Au delà de la contestation de ce rendu pour les 6 inculpé.es, c’est aussi et surtout le choix de ne pas laisser s’ancrer cette décision comme une jurisprudence qui permettait à l’État de continuer de réprimer plus férocement encore nos luttes et modes de vie.
L’outil anti-terroriste, avec sa législation dite d’exception (qui l’est de moins en moins), reste un outil hyper utile pour l’état. Grâce à cette affaire, comme pour d’autres affaires précédentes, les moyens d’enquête déployés ont permis de faire un instantané de la géographie des relations au sein des groupes militants, anarchistes, anti-autoritaires. Peu importe la finalité, une culpabilité réelle ou non, d’un projet réel ou fantasmé, l’important pour la justice est de maintenir la peur, d’occuper les gens sur de l’antirep. Ainsi il lui est possible d’observer comment les groupes fonctionnent et d’affûter leurs outils de maintien de la paix, le tout grâce à des capacités de surveillance sans limite.
En attendant, l’épée de damoclès judiciaire reste menaçante au dessus de la tête des inculpé.es. On vous invite à aller jeter un oeil sur les blogs, qui contiennent l’historique de cette affaire, les actions mises en place, les comptes rendus du procès et les divers textes d’analyses publiés. On y mettra aussi la suite des évènements, stay tuned !
Nous encourageons toutes les personnes qui se sont retrouvées face à la justice à partager leurs expériences, via la rédaction de brochure ou autres. Parce que raconter comment la justice enquête nous apprend à mieux s’en sortir quand on se retrouve dans ses filets. Parce que réfléchir aux erreurs stratégiques de défense permettra à ce que d’autres puissent les éviter. Parce que discuter de nos expériences de procédures, de procès, de rapport aux avocat.es, de prison, de contrôle judiciaire, nous aide à mieux nous préparer à cette éventualité, pas comme une fatalité mais plutôt comme quelque chose qui peut arriver…
Se soutenir et s’aider dans ces situations nous rend plus fort.es ensemble et évite l’isolement face au rouleau compresseur de la justice.
Coucou! Le document que vous avez entre les mains n’est pas un résumé ni une analyse politique de l’opération antiterroriste du 8 décembre 2020.
Ce document décrit les faits et gestes des acteurs répressifs, que ce soit les flics ou les magistrats. Nous souhaitons rendre intelligible et publique leurs méthodes de travail pour apprendre à s’en protéger.
Ce document est incomplet. Il manque encore à l’analyse la suite de l’information judiciaire, les arrestations/perquisitions, la détention, les exploitations de scellés, les contrôles judiciaire, le procès, le sursis probatoire, le jugement, etc.
On parlera essentiellement de l’enquête préliminaire qui s’étend sur plus de 2 mois (du 7 février 2020 au 20 avril 2022), même si on va parfois évoquer des éléments de procédure de ce qui précède (du renseignement opéré par la DGSI) et de ce qui suit (l’ouverture d’une information judiciaire, le procès, etc.).
Nous évoquerons des aspects de procédure (qui fait quoi quand) mais surtout des détails de la mise en place des moyens de surveillance et de renseignement et ce qu’ils en obtiennent. On ne s’attardera pas sur ce que les camarades visées par l’enquête auraient fait ou pas fait. Cela relève de la Défense des inculpé·es.
Face à la répression, notre solidarité se doit d’être sans faille.
On passe un enregistrement qui parle de l’affaire dite du 8 décembre dans laquelle 7 personnes seront jugées à Paris du 3 au 27 octobre 2023 pour « association de malfaiteurs terroristes ». Le 8 décembre 2020, 9 personnes étaient arrêtées un peu partout en France et passaient 96h en garde à vue. Plusieurs ont fait de la détention provisoire, notamment Libre Flot qui a été enfermé 16 mois à l’isolement et dont on peut retrouver les lettres dans les émissions et les journaux de l’Envolée. Le dossier monté par la DGSI sur la base d’écoutes fabrique un groupe rassemblé autour d’un présumé chef. Ils prétendent s’attaquer à « l’ultragauche » pour justifier la surveillance et la répression de groupes militants. Mais il vise aussi à criminaliser les personnes parties soutenir les Kurdes du Rojava face à Daech.
On revient encore sur le procès de l’affaire du 8 décembre dans laquelle 7 personnes sont jugées à Paris par le parquet national antiterroriste du 4 au 27 octobre (on avait longuement présenté l’affaire et le début du procès dans la première émission d’octobre). On parle des deux semaines écoulées, des interrogatoires à rallonge qui poussent à bout les inculpé.es, la salle qui parvient à faire entendre sa solidarité. Les personnes à la barre, malgré les pressions et le stress, répètent qu’elles contestent la retranscription des écoutes et les déclarations qu’elles ont pu faire lors de leur 96 heures de garde à vue dans les locaux de la DGSI.
On en profite pour revenir sur le travail qui a été fait cette semaine pour montrer comment ces GAV particulièrement éprouvantes constituent des moments de sidérations traumatiques au cours desquels les enquêteurs parviennent à imposer leurs mots et leur récit préétabli dans l’esprit des personnes.
On revient sur le procès qui a commencé cette semaine pour les 7 personnes inculpées dans l’histoire dite du 8 décembre. On revient un peu sur l’affaire, depuis les 96h de GAV dans les locaux de la DGSI et les périodes d’incarcération plus ou moins longue, les contrôles judiciaires qui courent toujours, la fabrication du dossier par les renseignements … L’audience pour association de malfaiteurs terroristes a commencé ce lundi et beaucoup de soutiens sont présents au TGI de Paris, hésitez pas à passer ! et on peut retrouver les comptes rendus détaillés des audiences sur le blog des soutiens des inculpés ici.
je fais partie des sept personnes qui ont été mises en examen à la suite de ce fameux « coup de filet dans l’ultragauche » le 8 décembre 2020.
Depuis plus d’un an, l’institution judiciaire s’est abbatue sur nous avec une férocité et une violence inouie. Aujourd’hui, je suis réellement, profondément fatiguée et désemparée face à cette machine à broyer. Nous avons connu des conditions d’incarcération particulièrement rudes avant d’être libéré.es. Nos amis, familles, entourages, se sont tour à tour auditionner par la DGSI, l’instruction continue de faire exister un « groupe » quand bien même l’absence de lien entre plusieurs d’entre nous a été prouvée et surtout un projet qui n’existe nulle part ailleurs que dans le récit construit par la DGSI. Si quelques entorses à la loi ont pu être démontrées, celles-ci remontent à 8 mois avant nos arrestations et aujourd’hui encore, personne ne comprend quels seraient les éléments qui enclenchent nos arrestations ce 8 décembre.
Depuis le début de cette procédure, chacun des accès à nos droits a dû faire l’objet d’une rude bataille pour être arraché. Je suis d’abord rentrée en procédure pour dénoncer les fouilles à nu systématiques à chaque fin de parloir dont je faisais l’objet et que le chef d’établissement refusait de m’enlever. Je n’ai pu avoir accès au dossier qu’au bout de 5 mois après avoir fait appel sur le refus des juges d’instruction de me le donner et ce alors qu’ils m’avaient déjà plusieurs fois auditionné. Toutes les nullités déposées par mes avocat.es, portant principalement sur la légalité des méthodes d’enquête utilisées à notre enconre, se sont vues rejetées.
Récemment, nous avons pu obtenir deux nouvelles avancées: la levée des interdictions de communiquer entre Libre Flot et moi, ainsi que la livée de l’isolement. Mais une fois encore, force est de constater qu’elles ont dû être arrachées. La livée des interdictions de communiquer n’intervient qu’au bout de 15 mois de procédure, plus de 3 semaines de grève de la faim et une hospitalisation, quand bien même la relation que nous partageons est clairement établie au dossier. La sortie d’isolement intervient au bout de nombreuses tentatives de procédure pour y mettre fin de la part de ses avocats et surtout dans un contexte dramatique où, désormais alité et ne pouvant plus se lever, il n’est de toutes façons pas à même d’en profiter.
Malgré l’immense soulagement qu’elles provoquent, ces avancées ne peuvent donc pas être considérées comme des victoires. Elles répondent tout juste au minimum de dignité et d’humanité que l’on aurait dû nous octroyer dès le début de nos mises en examen.
La logique judiciaire a jusqu’ici voulu que chacun d’entre nous soit relaché à l’issue de ses interrogatoires devant monsieur Jean-Marc Herbaut. Encore une fois, ce n’est pas le cas de Libre Flot. Il a alors décidé, depuis le début de sa grève de la faim, de déposer chaque jour une demande de mise en liberté, qui ont jusqu’ici toutes été refusées. Dans les motifs invoqués, on retrouve une nouvelle fois l’amalgamisme qu’il ne cesse de dénoncer avec force: « le contexte anxiogène des attentats islamistes ». Ce que demande Libre Flot aujourd’hui à travers sa grève de la faim, ce n’est pas d’arracher des miettes, c’est simplement la fin du traitement d’exception qu’il subit depuis le début, basé uniquement sur son engagement au Rojava. Il demande que l’on cesse de le comparer aux terroristes qu’il a combattu. Il demande, tout comme nous, à pouvoir se défendre correctement.
Monsieur Herbaut, il est temps que cet acharnement cesse. »